Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Le blog de Robert
tranches de vie, mode de vie, travail et passion, vie...

Durandalem livre 4 L'empereur Charlemagne

robertditsch

Chapitre I       La vie au village

 

 

-  Les occupations des habitants

-  La venue de l’Empereur Charlemagne

- Vendredi 10 février

- Samedi 11 février

- La journée des filles

- Dimanche 12 février

- Le départ de l’Empereur

- La visite des filles à l’abbaye

- Le voyage à Falkenberg

- Les obsèques de Mme Claude

- Samedi 25 février

 

 

Les occupations des habitants

 

       Nous sommes en hiver, le jeudi 9 février 801.

     Marion Wasch, trente-et-un ans, et Julie Wasch, trente-et-un ans, sont les aubergistes actuels. Esther, mon épouse, soixante-sept ans, est toujours active derrière le comptoir, et notre fille Ariston , quarante-sept ans, s’occupe des clients attablés.

     Dans l’auberge, en ce jour, il n’y a pas d’étranger, les chambres restent vides.

     Une table est occupée par les jumeaux Joel et Gael Wasch, cinquante deux ans, et par Aline Hair, cinquante-et-un ans, la blanchisseuse du village, qui elle aussi attend des clients.

       Personne ne se présente aux douches communales.  Rares sont les gens du village qui y viennent, chaque maison et chaque appartement étant pourvus de tout le confort, douche et coin d’aisance. Joel n'attend donc plus que les clients extérieurs. Mais par ces temps de neige, rares sont les voyageurs en Austrasie !

 

     À l’ancienne école, Chantal Iser, soixante quatre ans, herboriste, assistée de Valérie Burg, vingt sept ans, herboriste également, cultivent toutes sortes de plantes. En particulier la fameuse trémulonde, dans une pièce qui reproduit les conditions de température, d’humidité, d’obscurité nécessaires à son développement et à ses propriétés uniques !  Même les reptiles de la grotte, les leevancliffus cornus, sont de la partie, délocalisés à l’école pour recréer l’écosystème adéquat, en attendant la repousse naturelle dans la grotte. En effet, à force d'être exploitée, la grotte de la colline Nord, lieu d'origine de la trémulonde, est maintenant quasiment vidée de ses plantes.

     Rappelons à nos lecteurs que c'est la trémulonde qui permet la transmission de pensée, ainsi que le vol en lévitation, avec l’aide de potions dont Jacou Artz avait le secret, qu’il avait lui-même reçu de son Maître Sirius, le Maya, et dont il a transmis les recettes à Chantal, à Valérie, et à Marie Brett, le médecin du village.

     Quant à la frigidaire, issue des marais, dont on extrait le gaz naturium, elle a permis la construction de chambres froides pour aliments et boissons, ce qui est bien utile en été.

     Mais Chantal continue les expériences avec d’autres plantes. Même Jacou y participe encore parfois, cela a toujours été une passion pour lui.

     Les jumelles Christine et Christel Martinet, quatorze ans, avides de connaissances médicales et médicinales, suivent avec intérêt les cours de Chantal, de Jacou, et de Marie Brett.

 

 

     Dehors, la neige s’est remise à tomber. Tout est blanc, à part le tas de charbon sur le dessus de la colline de charbon. qui sort petit à petit de la mine, sur une bande transporteuse, mue par un moteur à piston actionné par la vapeur.

      Les mineurs sont des jeunes et robustes gaillards : Philippe Maigret, trente-et-un ans, Fabrice Spohr, vingt neuf ans, Louis Basin, vingt huit ans, Georges Basin, vingt huit ans, Roger Basin, vingt huit ans et Mikael Thiel, trente deux ans, tous issus de familles de Durandalem et nés au village.

     Ils alternent les chantiers.  Une semaine ils extraient le charbon, et la semaine suivante le filon d’or, qui est encore prospère après plus de trente ans d’exploitation. Les galeries du filon d’or parcourent plusieurs lieues sous terre vers l’Ouest. Elles doivent être parvenues actuellement sous le village de Laudrefang !

     Quant aux galeries de charbon, elle s’orientent plutôt au Sud, mais les veines de charbon descendent. Il faut aller de plus en plus profond pour y accéder.

      Le système de ventilation que j’ai conçu il y a trente ans fonctionne toujours. Ce sont les fondeurs, Charlotte Wilkinson, vingt sept ans, fondeuse, et Léon Wilkinson, vingt huit ans, agent d’entretien, qui ont la charge de vérifier le système.

     La réserve d’or du village est conséquente ! Il a fallu creuser une nouvelle chambre forte derrière la banque, sous la colline Nord, pour y stocker les milliers de lingots d’une pinte, soit quarante livres-or chacune. Axell Wilkinson, cinquante trois ans, et Gabrielle Krier, cinquante deux ans, s'en occupent depuis trente ans.  Ce trésor de Durandalem met les habitants du village à l’abri du besoin pour bien des décennies encore !

     De nombreuses créations en or, des bijoux de toutes sortes émanent de l’imagination fertile de l’orfèvre, Raymonde Frisch, cinquante cinq ans, assistée de son fils Emmanuel Frisch, trente deux ans.

     Raoul Frisch, cinquante trois ans, le banquier, est souvent en voyage, faisant fructifier quelques lingots en investissements de toutes sortes, au nom du village de Durandalem. C'est Emmanuel qui tient la banque durant ses voyages.

 

    À côté de la maison de la ferme, une grande serre est installée à demeure, avec un système de chauffage permettant la culture de légumes toute l’année. Le Fernand Bauer en parle tous les jours, quand il apporte à l’auberge ces légumes dont les clients raffolent.

     La serre est gérée par Pierre Dor, vingt neuf ans, maraîcher, Paul Dor, vingt sept ans, maraîcher et Pauline Basin, vingt sept ans, maraîchère.

      En hiver, quand les champs ne sont pas accessibles, c’est toute la population des fermières et fermiers qui travaillent dans la serre. Édouard Basin, cinquante deux ans, commis, Gildas Dor, cinquante deux ans, commis, Jacques Basin, cinquante trois ans, commis, Le Borgne Bauer, quarante neuf ans, fermier, Audrey Lemas, quarante sept ans, fermière, François Bauer, cinquante ans, fermier, Isabelle Nacht, quarante huit ans, fermière, et Francis Bauer, Vingt-et-un ans, fermier.

     Et c’est un plaisir pour toutes et tous de travailler nus dans cette serre chauffée au charbon et à la vapeur.

     La récolte journalière est suffisante pour nourrir tout le village, ainsi que les clients de l’auberge et du restaurant des Thermes.  Même lors de visites exceptionnelles comme celle d’aujourd’hui : rien de moins que l’Empereur Charlemagne et sa suite, qui seront logés aux Thermes pour quelques jours !

Les commis vendent aussi les légumes sur les marchés de Naborum, de Falkenberg et de Tenquin, malgré le froid hivernal. Un char fermé, mu à la vapeur, permet le transport des marchandises et des hommes au chaud, et roule aussi vite qu’une charrette. Néanmoins, il faut prévoir suffisamment de charbon et d’eau pour les trajets !

     Dans la grande forge, près du portail Ouest, une industrie de chaudières a vu le jour. Les jumeaux Nathan et Léo Mayer, vingt six ans, sont allés à bonne école.  Je leur ai enseigné toutes les techniques de constructions que j’ai expérimentées à Durandalem, à Laudrefang et à Falkenberg. Des techniques éprouvées, qui permettent la construction de chaudières de toutes tailles, de générateurs de vapeur grands et petits, et de compresseurs de gaz de frigidaire permettant la production du froid.

      Un atelier contigu à la forge s’est construit, et le carnet de commande est bien rempli. La réputation des douches de Durandalem n'est plus à faire ! Les gens de Naborum, de Tenquin, de Laudrefang, de Falkenberg, et jusqu’à ceux de Pont-de-Sarre et de Gmunden, tous veulent des douches dans toutes leurs demeures !

     Il y a quelque quinze ans, une expédition formée de Jacou, Chantal, Jérémoy, Michel Wald, des frères Stein et de moi-même, est allée jusqu’à Strateburgo. Cinq chariots remplis de matériaux fabriqués dans la grande forge, ou venant de Mousson, pour installer des douches au Blauersland, chez Maître Clément Sandre et sa communauté de nudistes. Jacou avait déjà quelques années auparavant installé des douches pour le sauna. Là, toute la communauté sera équipée de douches ! Nous avions une escorte de six hommes conduite par Dillon.

     Plus proche, l’abbaye des Glandières a été rapidement entièrement équipée comme l’ancienne école, avec un sauna, un hammam, des douches pour chaque cellule de moine. 

Une réserve d’eau a été construite dans l’enceinte de l’abbaye, avec un système de chauffage empêchant l’eau de geler. 

     Quant à Jérémoy Mayer, cinquante deux ans, mon gendre, le forgeron du village, celui qui officie dans la forge, il construit des machines suivant les plans que je lui fournis encore.

     Je suis maintenant un vieil homme de soixante-et-onze ans. Mais je conçois et fabrique encore des objets pour mon plaisir. Une de mes réussites est le char couvert à mouvement autonome, qui fonctionne à la vapeur, et dont j'ai parlé un peu plus haut. Des pistons mus par la vapeur font tourner un axe monté entre les deux roues de l’avant, ce qui entraîne les roues, et par là même tout le char.  Non seulement le char se déplace tout seul - je n’ai qu’à manœuvrer un guidon pour le faire tourner - mais en plus, le petit générateur de vapeur fournit la chaleur dans l’habitacle prévu pour quatre personnes.

     Les frères Bauer, le Borgne et François, m’ont demandé de fabriquer un char plus costaud, pour tirer un soc lors des labours. Je m’y suis attelé, et la machine fonctionne parfaitement. Une chaudière fournissant la vapeur qui entraîne les roues est en remorque derrière le char. Ils en sont très contents !

     La vapeur a aussi été mise à contribution pour chauffer l’église. Une pompe mue par la vapeur fait circuler de l’eau chaude dans des tuyaux traversant de grandes pièces de fonte, qui elles-mêmes rayonnent la chaleur dans l’église. L’abbé Charles Higgins, trente ans, en est ravi. Il peut ainsi officier nu, montrant ainsi l’image de Dieu à toutes ses ouailles aussi nues que lui. Même en hiver, quand il fait très froid, comme aujourd’hui !

     Une autre utilisation de la vapeur, c’est le moulin. En hiver, quand l’eau est gelée, le moulin a besoin d’une autre énergie pour tourner. Des pistons autour de la roue l’actionnent en continu, la faisant tourner sans arrêt, permettant de moudre le grain toute l’année. Finis les stocks de farine qui se gâtent et qu’il faut jeter.  En plus, il fait bon travailler nu dans le moulin. La chaudière réchauffe et chasse l’humidité, ce qui apporte une qualité supplémentaire à la farine.

     Grégoire Muller, quarante trois ans, meunier, et Charles Muller, vingt huit ans, meunier, œuvrent pour Isabeau Muller, cinquante deux ans, Boulanger et Annie Stock, quarante trois ans, pâtissière. Les époux Muller, P’tit Louis, soixante treize ans, et Bertha, soixante douze ans, coulent des jours heureux en compagnie de leurs enfants. Ils aiment regarder tourner la roue, nus, en se balançant sur des chaises à bascule, en rêvassant.

 

     La vapeur sert aussi à l’automatisation de la menuiserie installée dans le chalet de feu Michel Wald.

     Mikael Thiel, trente deux ans, est devenu le bûcheron-menuisier-ébéniste de Durandalem. Il a construit, avec mon aide, des systèmes de découpe par gabarit, permettant des reproductions exactes de pièces de bois en tous genre.

     Toujours avec mon aide, il a conçu une machine pour scier les arbres. Machine mue par la vapeur, et à déplacement autonome. Ce qui permet à Mikael de travailler seul, vite et bien ! Sa machine est capable de tirer les grumes et de les ramener à la scierie au chalet !

     Deux ados de Durandalem, les jumeaux Jules et Julie Stock, quinze ans, sont les apprentis de Mikael. Ils bénéficient aussi de cours dispensés par les filles de Michel Wald, Marianne et Mariette, cinquante trois ans, expertes en sculptures sur bois. Des cours auxquels assiste aussi Mikael !

 

     À l’entrée du village, après les Garderie et Garderie II, les écuries d’Émile ont grandi aussi !

     L’écurie des Thermes, qui permet aux voyageurs de poser leurs monture à l’abri, au chaud, à côté des Thermes, est gérée par Hantz Burg, cinquante huit ans, palefrenier, Vivien Stock, quarante ans, palefrenier, et José Pferd, vingt cinq ans, palefrenier.

      Nestor Pferd, cinquante deux ans, éleveur de chevaux, et Norbert Burg, vingt quatre ans, constructeur charretier ont repris l’affaire d’Émile Pferd, qui de temps en temps leur donne un coup de main.

     Des magnifiques poulains sont nés cet hiver. Ils nécessitent les plus grands soins, dans les écuries chauffées. Adèle Pferd, malgré ses soixante douze ans, s’en occupe on ne peut mieux.

   

     La nouvelle église, construite sur l’emplacement de la chapelle, est spacieuse et bien chauffée, ainsi que je l'ai décrit plus haut. Il y fait bon vivre nu, et le nouveau curé, Charles Higgins, trente ans, après un moment d’hésitation quant à la nudité dans le village et à l’église, a pris le pli. Il officie donc nu devant ses ouailles nues...

     Il est assisté par Gertrude Beten, quatre vingt un ans, qui l’aide de son mieux.

     Lors des offices, des enfants du village, filles et garçons, viennent servir la messe : Marguerite et Pétulla Martinet, douze ans, Michael Hoste, douze ans, Piotr Hahn, treize ans, Christine et Christel Martinet, quatorze ans, Jules et Julie Stock, quinze ans, se relaient pour servir, suivant les offices.

     Un cimetière digne de ce nom a été construit il y a dix ans, derrière la maison de l’église, sur la route du chalet. La population tout entière, en particulier les gens âgés, est ravie de cette dernière demeure... tout en espérant bien sûr y emménager le plus tard possible !

     Les métiers de bouche sont aussi représentés à Durandalem. Fabien Hune, quarante deux ans, fils de Clovis, soixante treize ans et de Clothilde, soixante douze ans, est notre volailler. Il a repris l’entreprise familiale. Quant à la boucherie et à l’abattoir, ils ont été repris par Georges Wilkinson, vingt deux ans, boucher, et Isabelle Spohr, vingt trois ans, vendeuse. L'ancien boucher Alvin Koch et Elvire son épouse reposent maintenant au cimetière de Durandalem...

     Toutes les habitations bénéficient de l’eau courante, même durant le froid hivernal, grâce à un système que j’ai installé il y a maintenant trois décennies. Depuis les réserves d’eau, qui occupent toute la muraille Nord, et jusqu’à l’évier ou la cuve de douche de chaque maison, l’eau est chauffée par des tuyaux où circule la vapeur générée par des chaudières installées tout le long desdits tuyaux.

      Les techniciens chargés de l’entretien des chaudières et de leur approvisionnement sont Julien Stock, quarante-et-un ans, Alain Koch, dix neuf ans et Armand Bardot, trente ans. La nuit, ce sont les gardes de nuit qui alimentent les chaudières, lesquelles marchent en feu continu.

La venue de l’Empereur Charlemagne

 

     Charlemagne vient d’être couronné Empereur du Saint-Empire Romain Germanique, par le pape Léon III le jour de Noël de l’an de grâce 800, dans la chapelle Sixtine à Rome. Il est le monarque absolu de toute l’Europe.

 

      Jeudi 9 février 801

     Ce matin donc, il gèle à pierre fendre sur l’Austrasie.

     Des colonnes de fumées s’élèvent de toutes les maisons de Durandalem, mais aussi des tours de garde sur les remparts, et dans la colline Nord, où le système de sauvegarde de l’eau courante est en fonction, la vapeur réchauffant les tuyaux qui alimentent en eau les habitations et les Thermes. Les techniciens communaux, Julien Stock, Armand Bardot et Alain Koch veillent au bon fonctionnement des chaudières dans le village.

     Aux Thermes, les chaudières ronflent. La température dans toute la bâtisse est très agréable, et toutes et tous œuvrent nus dans l’établissement.

     C’est Dillon d’Ortega qui gère les gardes de Durandalem, et qui fait la police quand il le faut dans le village. C’est lui qui décide des tours de garde, un rituel établi déjà quand il était Capitaine des gardes du roi Charles. Le village est gardé jour et nuit, nul ne peut y pénétrer sans être vu. Six équipes de deux gardes aux portails est et Ouest, et de trois gardes aux remparts Nord et Sud se relaient toutes les quatre heures. Les gardes ont commencé leur service sur le rempart Est à dix heures ce matin.   Ils sont sur les tours.

 

     Sur le mur, on peut lire : « Par édit du roi Charles, le village de Durandalem est nudiste. »

     Un bon feu crépite dans l’âtre au coin de la tour. Gretel Wilkinson est à son poste de garde, nue, avec Stéphane Spohr.

     Voilà qu'une colonne de soldats, de cavaliers et de chariots se présente au portail.   Gretel fait coulisser la fenêtre de verre, se penche et leur crie :

     « Qui va là ? 

     - Ouvrez, au nom de l’Empereur Charlemagne ! » répond le soldat en tête de la troupe. 

     Gretel revêt son gros manteau de fourrure, ses chausses, et descend ouvrir le grand portail, tandis que Stéphane, par télépathie, prévient Dillon de cette arrivée en nombre.

     La troupe pénètre dans l’enceinte du village : une vingtaine de cavaliers, suivis de quatre chariots. Vingt gardes à cheval ferment la marche.

     « Allez aux Thermes vous réchauffer, il y fait bon et vous pourrez prendre une bonne douche chaude, et y trouver du réconfort ! leur dit Gretel, bien emmitouflée dans son épais manteau. Notre bourgmestre, maître Jacou Artz vous accueillera là-bas !  Je l’ai prévenu de l’arrivée de l’Empereur. Les palefreniers vont s’occuper de vos montures, il y a des écuries chauffées à côté des Thermes ! »

     Et à cet effet, elle prévient mentalement Hantz Burg et ses assistants Vivien Stock et José Pferd.

 

     Dans les Thermes, c’est l’effervescence. Le branle-bas de combat est sonné, tout le personnel s’affaire pour accueillir la troupe et l’Empereur. 

     Dillon a mis en alerte tous les gardes disponibles, six sont en fonction sur les remparts, Bernard Spohr, Paul Frisch, et Johan Martinet, sur le rempart Nord et Albert Fart, André Martinet, et Pierre Martinet, sur le rempart Sud, Jacques Martin, et Paul Spohr, au portail Ouest, Gretel Wilkinson, et Stéphane Spohr, au portail est.

 

     Jacou se tient debout devant la porte des Thermes, nu sous un gros manteau et des chausses hautes, accompagné par les nouveaux vigiles Michel Hoste, et Amandine Bardot, tout aussi nus et emmitouflés. Il faut dire qu’à l’intérieur, il y fait si bon que tout le monde est nu.

     Il a convoqué Gabriel Holz, le garde champêtre.

     « Tu vas annoncer à tout le village la venue dans nos murs de Charlemagne, Empereur du Saint Empire Romain Germanique. »

     Bien habillé, Gabriel va de maison en maison, prévient les concierges des immeubles, passe par l’auberge…

     Charles arrive dans un chariot, il descend devant les Thermes, flanqué de quatre soldats de sa garde rapprochée, épée à la main, qui s’interposent entre lui et Jacou.

     « Bienvenue à Durandalem ! dit Jacou. Vous pouvez ranger vos armes.  Ici, l’Empereur est en sécurité, et vous aussi ! »

     À ces paroles rassurantes, les gardes s’écartent et rangent leurs épées dans leurs fourreaux.

     Jacou ouvre la porte. Charles pénètre dans les thermes, suivi de près par sa garde rapprochée. Aussitôt il ressent cette chaleur bienfaitrice qui le pénètre. Jacou lui propose de prendre une douche bien chaude afin de réchauffer ses os transis de froid par ce long voyage hiémal.

     Hantz Burg et ses assistants prennent en charge les chevaux et les chariots pour les mener à l’écurie.

     « N’ayez aucune crainte, vos montures seront soignées et choyées le temps de votre séjour ! » affirme Hantz qui déjà les emmène vers les écuries. 

     L’Empereur sourit. Il reconnaît Hantz, le géant qui l’avait impressionné, mais surtout Jacou, le bourgmestre qui jadis l’avait accueilli et lui avait fourni la meilleure garde qu’il ait jamais eue !

         Il dit à Jacou que lui et ses hommes vont profiter de son hospitalité quelques jours pour se reposer, avant de marcher sur Oche.

     Brigitte Bardot, et Martine Bardot, les agents de service des Thermes depuis le début, sont nues. Elles s’occupent de Son Altesse impériale, tandis que Nina Stock, et Paulette Stock, ainsi qu’Etienne Lombard, tout aussi nus, s’occupent des quatre gardes.

      Brigitte et Martine déshabillent Charles, l’emmènent sous la douche, et le frottent énergiquement. Il grogne de plaisir sous la douche chaude qui lui tombe dessus, et quand elles s’affairent sur le bas du ventre, elles se rendent vite compte que Charles, du haut de ses cinquante huit ans, n’a rien perdu de sa virilité.  Cette virilité dont leur ont tant parlé Juliette Stone, quarante neuf ans, et Émilie Stone, quarante huit ans, qui étaient les "anges" du roi lors de sa venue il y a trente-trois ans, alors âgées de seize et quinze ans...

     Charles demande d'ailleurs lui-même à Brigitte s’il pourrait compter sur ses chers anges pour un nouveau moment de plaisir...  Il en a gardé un si bon souvenir !

     Brigitte lui dit qu’elle va les faire mander. Elle les appelle télépathiquement et leur expose la requête de Charles.

     Peu de temps après, les deux femmes sont là. Elles sont toujours buandières aux Thermes et n’ont qu’un étage à descendre. Et puis, faire l’amour à un Empereur, cela ne se refuse pas !

     Charles, sortant de la douche, séché par les bons soins de Brigitte et Martine Bardot, voit arriver ses deux anges, nues et souriantes. Elles ont bien grandi ! Ce sont maintenant des femmes matures, et Charles remarque bien évidemment leurs rondeurs appétissantes !

     Elles s’empressent de l’amener dans la suite royale, rebaptisée pour l’occasion la suite impériale.

     Les quatre soldats de sa garde rapprochée sortent aussi des douches, et accompagnent l’Empereur et les filles jusque devant la suite, occupant la salle de garde attenante.

     Là, ils attendent que son Altesse Impériale ressorte.

 

     La troupe de soldats, à son tour, pénètre dans les Thermes, au chaud. Les quarante soldats et charretiers se déshabillent pour profiter de la chaleur ambiante, en attendant leur tour de passer sous la douche.

     Aussitôt, les remplaçantes des buandières occupées avec l’Empereur ramassent les habits de toute la troupe pour les laver. Ce sont Joséphine Basin, et les jeunes Mia Fart et Amandine Bardot.

     La partie restaurant des Thermes est aménagée en grandes tables. Les soldats sont libres d’aller où bon leur semble dans l’établissement. Certains essaient le sauna, d’autres profitent de la piscine...  Mais la majorité est tentée par le bon vin servi à discrétion par Joelle Lutz, et Joseph Wirth, toujours tenanciers des boissons.

     À midi, tout le monde est attablé.  Les cuisinières Josiane Lutz, et Agnès Fergusson, assistées des jeunes Marianne Tritz, et Paulette Holz, ont concocté un repas de banquet. Des mets raffinés côtoient les vins de rêve…

     Jacou prend la parole et souhaite à tous la bienvenue à Durandalem. Il présente à Son Altesse Impériale deux des soldats qui l’ont suivi vingt-deux ans plus tôt : les frères Bauer, François, cinquante ans, et le Borgne, quarante neuf ans, ainsi que le chef de sa garde, Dillon d’Ortega, cinquante quatre ans.

     « Oui, je vous reconnais bien, dit l’Empereur. Même si toi et tes compagnons avez pris un peu d’embonpoint... Ah, vous avez bien servi votre roi ! Et vous étiez les meilleurs que j’aie jamais connus ! Comment ne pas se souvenir de vos attaques aériennes, quand vous fondiez sur l’ennemi, tels des aigles sur leurs proies ? »

     « C’est un honneur que de vous recevoir, Votre Majesté ! répond Dillon.

     - Vous resterez ici le temps qu’il vous plaira. Vos désirs et souhaits lors de votre séjour seront tous exaucés ! ajoute Jacou.

     Puis, s’adressant aux soldats :

     Je vous demande de respecter les filles qui sont à votre service, ici et dans le village. Je sais vos envies après cette longue marche dans les campagnes gelées. Des filles expertes des plaisirs de la chair viendront tantôt assouvir vos besoins en ce domaine ! 

      L’Empereur ajoute : - Il va de soi, soldats, que toute dérive sera sévèrement punie ! Soyez patients, Durandalem sait recevoir ! »

     Dans le village, la relève de la garde a lieu à midi, une fois que la cloche de l’ancienne école a sonné douze coups.

     Joseph Spohr et Pierre Spohr reprennent leur service au portail Ouest, après le repas qu’ils ont pris à l’auberge à onze heures.

     Ils relèvent Jacques Martin et Paul Spohr qui à leur tour vont manger à l’auberge.

     Il en de même de l’équipe en pause, Benoît Spohr, Georgette Fart et Alexa Dumas, qui après le repas de onze heures, vont relever l’équipe des remparts Sud, Albert Fart, André Martinet et Pierre Martinet, qui viendront eux aussi à l’auberge prendre leur repas.

     Les équipes 3 et 4 mangent à l’auberge à onze heures, les équipes 5 et 6 à midi, et les équipes 1 et 2 à quatorze heures.

 

   Aux Thermes, tout le monde est repu à la fin du repas et aspire à une bonne sieste. Le tenancier de l’hôtel, Guillaume Bardot, leur indique les chambres pour les gradés, et les dortoirs pour les soldats.

     Roger Koch, cinquante quatre ans, est toujours le coursier attitré du village. Jacou l'a envoyé à Falkenberg auprès de Madame Claude, quatre vingt cinq ans, tenancière de la Maison des filles, afin d’obtenir le plus possible de filles pour les soldats de l'Empereur.  Le messager est escorté par Christian Hahn et Jeanne Martinet, deux gardes gens d’arme, aguerris à la défense rapprochée, et maîtres archers entraînés par Dillon d’Ortega.

     Quatre filles de joie sont installées au village depuis la précédente visite de Charles, voici trente ans. Sur suggestion de Jacou, Ulla Fonte, Fifi Adour, Pam Suzon et Prune Fruscht proposent déjà leurs services à qui le demande. Et bien qu’elles aient toutes les quatre dépassé la cinquantaine, elles ont su entretenir leurs corps, et suscitent encore bien des envies parmi les soldats. Des femmes d’expérience, qui savent satisfaire tous les désirs des hommes !

     Après une bonne sieste bien au chaud dans les chambres et dortoirs des Thermes, tout le monde se retrouve au restaurant, où sont servis des en-cas, et diverses boissons qui plaisent aux soldats.

     Voilà Roger Koch de retour de Falkenberg. Après une bonne douche, Il donne les dernière nouvelles.

     « Madame Claude décline beaucoup. Le médecin à son chevet a déclaré qu'elle ne finira sans doute pas l’hiver.  Elle ne regrette rien. Partir à quatre vingt cinq ans est une belle fin ! Et malgré tout, elle a tenu à faire tout le nécessaire pour qu’une charrette remplie de filles arrive aujourd’hui même. Elle sera là d’ici peu. Mais ce n'est pas tout : dès demain, d'autres filles arriveront !  Madame Claude n’a rien à refuser au village de Durandalem, à Jacou, et à Robert. Robert qui lui a permis d’installer du chauffage et des douches dans son établissement, il y a déjà plus de trente ans... »

      Jacou est attristé par la nouvelle. Lui-même, à soixante dix huit  ans, n’est plus en grande forme, usé par le poids des ans, par toutes ces années au service des autres…

    « Dillon, dit-il, tu recevras ces dames, et tu les logeras dans les chambres de l’hôtel ! »

     Il est presque seize heures quand une charrette se présente au portail Ouest.

      « Qui êtes-vous ?  demande Joseph Spohr, de garde au portail avec Pierre Spohr.

     - Nous sommes les filles de Madame Claude, Jacou Artz nous a fait mander en hâte !  répond celle qui tient les rênes.  Les deux cavaliers sont notre escorte ! »

À l’arrière de la charrette, huit filles transies de froid.

     « Entrez vite, et allez aux Thermes, la deuxième bâtisse sur votre gauche, vous serez accueillies ! » dit Pierre Spohr  en enfilant son manteau et ses chausses pour descendre ouvrir le portail.

     La charrette s’ébranle et arrive devant les Thermes. Dillon, enveloppé dans un manteau de fourrure, les attend devant la porte.

     « Bienvenue, les filles ! Je m’appelle Dillon, et je vais m’occuper de vous installer ! Venez vite vous chauffer ! 

      Les cavaliers, emmenez la charrette et vos montures à l’écurie à côté, Hantz est prévenu et vous attend. Puis vous reviendrez ici pour vous aussi vous réchauffer ! Les vigiles, Jean d’Ortega et Aimé d’Ortega, vous feront entrer ! » Et les vigiles acquiescent de la tête.

     Les neuf filles s’empressent de descendre de la charrette, et pénètrent dans les Thermes, aussitôt accueillies par le personnel... Et surprise ! toutes et tous sont nus ! Brigitte Bardot, Martine Bardot, Etienne Lombard, Zoé Lombard et Mia Fart.

     Les filles sont étonnées, elles qui n'ont que l’habitude de la nudité sexuelle, alors qu’ici, la nudité semble toute naturelle !

     « Donnez-nous vos habits, et prenez une douche bien chaude ! leur dit Mia Fart  en leur indiquant le chemin.

     - Après la douche, je vous présenterai à l’Empereur, vous pourrez avoir une collation, et je vous conduirai à vos appartements ou vous pourrez vous reposer avant de rencontrer les soldats. » leur dit Dillon , qui a quitté son lourd manteau de fourrure et se présente nu devant elles. Elles ne peuvent s’empêcher de remarquer le membre de Dillon...

     « Allons, les filles ! présentez-vous, plutôt que de rester bloquées sur l’entre-jambe de Monsieur Dillon ! » ordonne celle qui conduisait la charrette, et qui semble être la cheffe .

     Elle commence : elle s’appelle Tatiana, elle a vingt cinq ans, et elle est la responsable de ce groupe. Blonde, six pieds, fine, avec des seins bien ronds et le pubis rasé, comme toutes les autres filles.

     Nina, vingt deux ans. Brune aux cheveux courts, cinq pieds quatre pouces, des petits seins et une croupe bien rebondie.

     Prisca, vingt deux ans. Blonde, des cheveux longs sur ses seins pointus, six pieds deux pouces.

     Angèle, vingt-et-un ans. Rousse, six pieds cinq pouces, des seins ronds et fermes.

     Ella, vingt-et-un ans, brune, six pieds, cheveux courts, des seins énormes.

     Isabelle, vingt trois ans, brune, cinq pieds dix pouces, des petits seins pointus.

     Louise, vingt deux ans blonde, cinq pieds trois pouces, des beaux seins bien ronds.

     Léa, vingt ans, blonde, six pieds, des cheveux très longs, une croupe charnue, des seins ronds.

     Ida, vingt trois ans, rousse, petite, cinq pieds avec des gros seins et une croupe bien ferme.

     Une fois toutes douchées et séchées, Dillon les emmène à l’étage du restaurant, où Charlemagne est en train de déguster, nu avec sa couronne sur la tête, un cru de vin d’Austrasie qui le ravit.

     « Votre Majesté ! voici Tatiana et ses compagnes qui vont faire oublier l’hiver à vos vaillants soldats !  dit Dillon.

     - Magnifique ! Quel joli bouquet de beautés ! j’espère que nous aurons l’occasion de nous connaître mieux dans les prochaines heures !  dit l’Empereur .

     - Ce sera un honneur que de vous satisfaire, Votre Majesté !  répond Tatiana , sidérée de voir l’Empereur nu !

     - Pour l’heure elles vont manger et boire, puis se reposer dans leurs quartiers. annonce Dillon, qui voit bien l’intérêt qu’elles suscitent auprès des soldats.

     Venez, les filles, je vous montre vos quartiers, ou vous pourrez exercer votre art. »

      Et Dillon, suivi des neuf beautés, gravit les marches qui mènent à l’hôtel. Le gérant, Guillaume Bardot, les attend.

     « Bienvenue chez vous, mesdemoiselles ! Je suis à votre service pour tout problème d’intendance. Vous avez chacune une chambre, que vous pouvez fermer, pour plus d’intimité !  Voici les buandières, Lydie Stone, Joséphine Basin et Léa Fart qui vous fourniront tout le linge dont vous aurez besoin. Vous avez aussi deux jeunes agents de sécurité, qui sont là pour veiller à votre respect... et non à vos désirs, n’est-ce pas ? »

     Et il désigne les jumeaux Jean et Jacky Muller, dix huit ans, des apollons blonds bien musclés qui leur sourient et leur disent en chœur : « Nous resterons discrets, nous n’interviendrons que s’il y a des problèmes ! 

     - Voilà, mesdemoiselles, ajoute Dillon. Les soldats vont monter, et patienter dans le dortoir. C’est là que vous viendrez les chercher. »

      Puis, s’adressant à Tatiana :

     « je vous suggère d’emmener une de vos collègues attendre avec vous dans la suite impériale, Charlemagne ne va pas tarder ! »

      Entre-temps, Jérôme Binz et Raphael Krips, les deux cavaliers qui  escortaient les filles, ont rejoint les Thermes. Une fois douchés, les voilà qui s’installent nus à une table. Josie Bern, la nouvelle serveuse des boissons vient leur apporter des pintes de vin. C’est une belle fille musclée, avec des seins comme des melons, recouverts par ses cheveux d’or.

     Dans les Thermes, des cellules sont réservées à l’enseignement.

     Charlemagne désire savoir si cette école perdure encore. Jacou l’emmène donc visiter les classes. L’Empereur est admiratif des enseignements que reçoivent les élèves de Durandalem !

     « Eh oui, lui dit Jacou. Tous les enfants de Durandalem savent lire et écrire plusieurs langues, ils savent compter, et ils ont une grande connaissance des choses de la vie ! 

      Charles s'enquiert :

     -  Mais le barde qui jadis m'a tant réjoui les oreilles, il n’est plus là ? 

     - Si fait, répond Jacou. Mais il n’enseigne plus. Cela dit, si tel est votre bon plaisir, il jouera et chantera pour vous ce soir, avec ses musiciens ! »

     Et mentalement, il prévient aussitôt Apollinaire et les musiciens Jenny Stein, Benjamin Schmit, Garfield Schmit, et Béatrice Spohr ainsi que le jeune barde Simon Schmit, afin qu’ils se réunissent en hâte.

      Ils devront concocter un programme pour l’Empereur, un récital qui lui sera présenté ce soir aux Thermes. L’Empereur est ravi !

     Jacou poursuit :

     « Nous avons trois classes et trois enseignantes : Jeanne Muller, Nadège Schaff, et Agathe Stein. Jeanne Muller s’occupe des grands, qui se partagent entre les cours théoriques en classe et l’apprentissage d’un métier chez un artisan. »

     Jeanne donne tous les détails :

       « Les jumeaux Jules et Julie Stock, quinze ans, sont en apprentissage chez Mikael Thiel, l’ébéniste menuisier, et y reçoivent aussi des cours dispensés par Marianne et Mariette Wald, pour la sculpture sur bois. 

       Les jumelles Christine et Christel Martinet, quatorze ans, sont intéressées par les métiers de la santé, les massages, la médecine. Elles sont apprenties chez Chantal Iser, à l’ancienne école, et bénéficient ainsi de l’enseignement de Jacou. 

      Elles passent aussi des moments au cabinet de médecine de Marie Brett, au village, à l’ancien cabinet de Jacou. 

      Piotr Hahn, treize ans, est fasciné par les lames, les épées et les couteaux, il est apprenti chez Denis Pepin, soixante treize ans. Le rémouleur est à la retraite, mais veut bien enseigner son savoir au jeune Piotr.

      Nadège Schaff s’occupe des moyens, qui n’ont pas encore d’option de métiers en vue.  Ce sont Michael Hoste, douze ans, les jumelles Marguerite et Pétulla Martinet, douze ans, Bernard Bardot, onze ans, Georgette Hahn, onze ans, Manon Hoste, dix ans, et les jumelles Josiane et Joelle Bardot, dix ans. 

       Agathe Stein s’occupe des plus petits :  Eli Thiel, neuf ans, Gilles Bardot, huit ans, les jumeaux Robert et Pascal Mayer, six ans, Abraham Thiel, cinq ans. 

     - Grand merci, mesdames, grand merci, Jacou, conclut l'Empereur. Car c'est grâce à votre exemple et à Durandalem que j’ai instauré l’école des enfants dans tout mon empire ! »

 

     Puis il remonte dans sa suite, et là, ô surprise... Tatiana la blonde et Angèle la rousse l’attendent ! Un alléchant programme...

 

 

      Les filles sortent de la suite impériale, vont dans leur chambre prendre une douche, et rejoignent le dortoir, où plusieurs soldats attendent.

     C’est un va-et-vient incessant. Les filles s’occupent des soldats trop pressés qui bâclent la chose en quelques coups. Mais elles savent y faire pour qu’ils éprouvent le plus grand plaisir !

     Les buandières ramassent les serviettes au fur et à mesure du passage des soldats, qui prennent quand même le temps de se doucher avant de sortir des chambres, hygiène oblige. Tout le monde est nu, et tout le monde se doit d’être propre !

    Jérôme Binz et Raphael Krips, les deux cavaliers qui accompagnaient les filles, se sont mêlés au groupe en attente dans le dortoir. Ils ont aussi eu leur part de bonheur entre les cuisses des filles !

     Les filles de joie ont rejoint le mouvement, et bientôt les quarante hommes de la troupe de Charlemagne sont satisfaits.

     Demain, une autre charrette devrait arriver. On pourra remettre cela plus longuement, plus doucement. Plus nombreux, plus nombreuses, en variant les plaisirs !

     Dans les chambres, Louis Hoste, Bérengère Stark, Léon Starck et Francine Hoste nettoient les douches. Les buandières renouvellent le stock de serviettes propres et les literies.

 

       Dans le village, la relève de la garde a eu lieu à seize heures.

     A l’Ouest, Joseph et Pierre Spohr sont en pause, remplacés par Gretel Wilkinson et Stéphane Spohr. Ils en profitent pour descendre par la voie des airs à l’auberge, pour boire un truc qui réchauffe !

      Ils sont rejoints par Benoît Spohr, Georgette Fart et Alexa Dumas, de retour des remparts Sud, remplacés par Bernard Spohr, Paul Frisch et Johan Martinet. Ils en profitent pour se mettre à l’aise, et laissent tomber leurs chauds et lourds habits pour se réchauffer nus devant la cheminée, qui ronfle d’un beau brasier.

     Comme à l’accoutumée, ils commentent les paysages hivernaux, les animaux qui galèrent pour trouver une frêle nourriture, et le froid qui les pénètre, surtout quand ils se déplacent dans les airs !

     Mais aujourd’hui, avec la charrette de filles qui vient d’arriver, ils ont de quoi papoter...

     « J’en connais qui vont se payer du bon temps ! » dit Joseph.

     Gabriel, le garde champêtre, annonce la venue de Charlemagne, ainsi que des filles de Falkenberg. Il se réchauffe après sa tournée d’annonce, nu devant l’âtre rayonnant, un grog à la main.

     Ma fille Ariston Schmit, la serveuse attitrée, leur dit être au courant. L’Empereur et ses hommes, elle les a vus passer tantôt. Elle leur sert un grog, la gnôle au Fernand, avec une tisane faite de plantes issues de la culture de l’ancienne école.

     Il est dix sept heures, les classes sont maintenant vides, les enfants se sont rhabillés et sont rentrés chez eux.

     Les bardes et musiciens se sont réunis dans une cellule des Thermes pour répéter les chants et musiques qu’il vont interpréter ce soir devant l’Empereur.

      À l’auberge, Child, qui fête ses soixante dix neuf ans cette année, est attablé avec  le Fernand Bauer, soixante treize ans, P’tit Louis Muller, soixante treize ans, Émile Pferd, soixante treize  ans, et moi, soixante-et-onze ans. Une belle table d’ancêtres ! Nous buvons tranquillement un vin que Child a déniché dans sa cave, et qui s’est bien gardé !

     « Ha ! dit Child, si nous avions trente ans de moins, nous serions bien allés voir de près ces jouvencelles toutes fraîches, n’est-ce pas, les amis ? »

     Roger Koch est revenu des Thermes, accompagné des deux gens d’arme. Ils viennent boire un coup à l’auberge, et raconter les dernières nouvelles de Falkenberg : Madame Claude qui ne va pas bien, et d’autres filles qui vont arriver…

     Gabriel Holz, prévenu mentalement par Jacou, est chargé d'annoncer le concert de ce soir en l’honneur de l’Empereur Charlemagne. Toute la population est invitée.

     Il se rhabille et refait le tour du village, pour claironner l’événement.

     Quelque temps plus tard, il est de retour à l’auberge, transi. Un bon grog nu, et cela va mieux !

 

     Nous sommes le soir, aux Thermes. Les tables sont dressées pour le souper, au fond du restaurant. On installe une estrade, sur laquelle prennent place les musiciennes et musiciens pour le concert de ce soir en l’honneur de l’Empereur.

     Hormis Apollinaire de Valz, qui a toujours sa belle voix, sont présents Jenny Stein, qui joue de la flûte, mon fils Benami Schmit, à la lyre à doubles cordes, son fils le jeune barde Simon Schmit, à la voix de soprano, mon autre petit-fils Garfield Schmit, au buccin, et enfin son épouse Béatrice Spohr, au tambourin et aux chœurs.

     Charlemagne fait son entrée, suivi de sa cour.  Il est coiffé de la couronne d'empereur que lui a posée le pape Léon III, il y a deux mois.

     Une fois qu'il est installé, le service à table débute, et tout le monde se régale !

     Roger Koch et Gabriel Holz ont répandu la nouvelle du concert dans tout le village, toute la population a été invitée. Tandis que les convives mangent, les habitants arrivent, se déshabillent et se douchent, avant de se sécher et monter nus dans la salle de restaurant, où des chaises ont été mises en place pour le public. Chacun ne manque pas de se présenter devant l’Empereur et de lui présenter ses respects !

     Quasiment tout le village est là, réuni aux Thermes. Il n’y a que les gardes de nuit qui veillent, ainsi que les gens d’arme qui effectuent des rondes. Notre doyenne Gertrude Beten, quatre vingt un ans, n’est pas là non plus. elle se sent partir. L’abbé Charles Higgins, qui vient de la quitter pour présenter ses respects et bénir l’Empereur, retourne à son chevet. Tout comme le médecin Marie Brett, il pense qu’elle ne passera pas la nuit...

     Le concert débute, les airs et les chansons enchantent le public. Surtout Charles, qui adore cette musique jouée tout spécialement pour lui.

     Pour l’occasion, le coin des boissons est ouvert. Chacun peut se prendre une pinte de vin ou une autre boisson, par exemple un coup de la célèbre gnôle du Fernand.

    La magnifique soirée se poursuit. Les musiciens entonnent des airs des plus enjoués, au grand bonheur de toute l’assistance.

     Vers vingt trois heures, le concert prend fin sous les applaudissements de l’Empereur et du public.

     Les villageois redescendent aux vestiaires, et s’emmitouflent bien chaudement pour rentrer chez eux. Les rues et les chemins du village seraient difficilement repérables sous la neige, qui ne cesse de tomber si, heureusement, tous les cent pas, les gens d’arme n’avaient pas allumé les réverbères... Une attention que la population tout entière apprécie. Sous la lueur de ces candélabres, on trouve plus facilement son chemin !

     Demain, l’Empereur et tous ceux qui le voudront auront droit à des massages et à une bonne relaxation aux bains des Thermes.

     Aux Thermes, l’heure est aux rangements. Charlemagne et ses soldats ont regagné leurs quartiers. Ce soir, l’Empereur désire deux filles pour passer la nuit avec lui, et quatre filles pour ses gardes.

     Ce sont Ulla et Prune qui se portent volontaires pour passer la nuit avec Charles. Cela ne lui déplaît pas d’avoir des femmes mûres et bien expérimentées !

 

     Quant aux gardes, ils reçoivent Ida, Isabelle, Louise et Léa.

 

     Les concierges, Thomas Fergusson et Émile Lutz, sont affairés à éteindre les luminaires partout dans les Thermes, tandis que les techniciens Rémi Stock, Raymond Stock, et Paulin Martinet, font le tour des chaudières. Ils s’assurent qu’elles pourront tourner toute la nuit.

     Le système de crémaillère monté sur chaque chaudière, alimenté par une trémie, mû par des pistons actionnés à la vapeur, a automatisé le chargement en charbon. Cela facilite grandement la tâche des techniciens. Ce n'est pas du luxe, car en plus de la chaudière de leur appartement, ils doivent également gérer celle des bains, celle de l’eau de la piscine, celle de l’étage du restaurant et des suites, celle de l’étage de l’hôtel et des appartements, et enfin celles des machines à laver dans les buanderies et les cuisines...

     Vendredi 10 février

 

     Il neige toujours. La neige est tombée toute la nuit, atteignant une hauteur moyenne de plus de trois pieds...

     L’abbé Charles Higgins sonne le glas. Comme il l'avait pressenti, Gertrude Beten n'a pu passer la nuit. Elle vient de décéder, à l’âge de quatre-vingt-un ans, après toute une vie consacrée à servir Dieu. Elle était la doyenne du village.

     Le nouveau doyen est donc Childéric Germain, alias Child, qui va fêter ses soixante dix neuf ans.

Gabriel Holz, le garde champêtre, est chargé d’annoncer la nouvelle et d'expliquer pour qui sonne le glas.

     Avec l’aide de mon gendre Jérémoy, à l’avant de ma chariote à vapeur, je fixe un grand godet en biais, afin de pousser la neige sur le côté. Le système fonctionne bien, et je me promène, nu dans ma chariote surchauffée, dans tous les chemins et toutes les rues du village, afin de dégager la neige...

     Jacou m’a narré les constructions qu’il avait faites il y a longtemps à Strateburgo avec l’aide des compagnons du Blauersland et des artisans de la ville. Ils avaient dégagé toutes les rues, et il y avait jusqu’à huit pieds de neige !

     L’abbé Higgins, profitant du chemin bien dégagé, se rend chez Mikael Thiel, au chalet. Il vient lui passer commande d'un cercueil pour Gertrude. 

      « On ne pourra pas l’ensevelir avant le printemps, lui dit-il. Nous allons donc devoir la garder tout l'hiver dans la chapelle réfrigérée. Il faudrait un cercueil étanche. » Mikael promet que le cercueil sera prêt l'après-midi même. 

     L’église possède en effet une annexe, une chapelle réfrigérée pour conserver les corps avant l’ensevelissement. Nous l'avions construite avec Michel Wald et les frères Stein.  Bien utile en hiver, quand la terre est vraiment trop dure pour creuser. Bien utile aussi en été : cela permet la veillée des corps quand il fait très chaud.  Dans la chapelle, deux cercueils reposent déjà, en attente de mise en terre : celui de Jules Lang, décédé en décembre à l’âge de soixante-et-onze ans, et celui de Bruno Martinet, décédé en janvier à l’âge de soixante dix sept ans. Gertrude Beten sera donc la troisième... Les frères Stein, qui font aussi office de fossoyeurs, auront du travail dès le redoux !

    

     Ce matin, c’est session de massages. 

     Toutes les masseuses du village se retrouvent aux Thermes.

     Pour l’occasion, Fleur, Delphine et Alice, les trois épouses Martinet, quoique retraitées, ont repris du service aujourd’hui !

     Marianne et Mariette Wald, les jumelles masseuses de l’ancienne école sont là. Les cuisinières et les buandières de l’ancienne école sont aussi de la partie. Josiane Welch, Josette Wasch, , Manon Germain,  et Pénélope Field, toutes aguerries aux massages avec les soldats... il y a déjà trente trois ans !

     Elodie Spohr, masseuse de la résidence est venue aussi.

     Et les masseuses des Thermes, Pauline Lang, Rose Spohr, Zoé Lombard, Sophie Kami et Justine Kami, sont bien sûr présentes.

     Avec cette équipe de quinze masseuses, la matinée devrait suffire pour assurer le bien-être de toute la suite et de l’Empereur.

     En plus des salles de massage, au rez de chaussée, des tables de massages ont été installées dans les chambres de l’hôtel, et bien sûr une autre table dans la suite impériale.

     Zoé Lombard est préposée à s’occuper de l’Empereur. Elle se présente devant la suite impériale. Elle est accueillie par Charlemagne en personne.

   « Bonjour, Votre Majesté ! Voulez-vous bien vous allonger sur le ventre ? Je vais vous masser la nuque et le dos.

    - Ravissante masseuse que voilà... Je me confie à vos jolies mains ! 

     Et elle commence par l’enduire d'une huile préparée par Chantal, une huile tout à la fois stimulante et relaxante. Tandis que Zoé lui masse tout le corps, Charles s'extasie :

      Oh...Oooh... Comme c'est agréable, ces massages... Que cela me fait du bien ! »

     Massé complétement, Charles titube en se levant. Zoé l’aide à s’installer dans la baignoire où coule une eau bien chaude. Il sent qu’il est en train de partir... 

     « Laissez-vous aller, vous ne risquez rien, je veille, je reste à vos côtés ! » Et aussitôt, il s’endort comme un bébé…

     Jacou, ne voyant revenir ni la masseuse, ni le massé, s’inquiète un peu. Il demande mentalement à Zoé si tout va bien. Elle lui répond que tout va pour le mieux, que pour l’instant il récupère, et qu'il sera bientôt en pleine forme !

     Tous les soldats du roi passent sur les tables de massage, certains massages sont plus poussés, mais tout le monde est satisfait de l’opération. 

 

     Il est presque midi quand, au portail Ouest se présente une grande luge, tirée par deux chevaux et précédée par trois cavaliers.

     Jacques Martin et Stéphane Spohr sont de garde.

    « Qui êtes-vous ? demande Jacques en faisant glisser la fenêtre.

     - Nous venons de Falkenberg, de la part de Madame Claude, disent les cavaliers. Et nous escortons ces jeunes filles mandées par Jacou.

- Dans ce cas, allez vite aux Thermes, le deuxième bâtiment à gauche, vous y êtes attendus ! Je me rhabille et je descends vous ouvrir. »

  Depuis la tour, Stéphane prévient mentalement Jacou, Dillon, et Hantz.

  Le long traîneau s'arrête devant les Thermes. Les vigiles Michel Hoste et Amandine Bardot aident les filles à en descendre. Elle sont dix. Vraiment des jouvencelles. Certaines, apparemment, ont à peine dix huit ans.

Les masseuses proposent d'emblée aux filles et à leur escorte de se faire masser, ce que toutes et tous acceptent avec joie.

 « Emmenez vos montures et le traîneau aux écuries juste à côté, dit Michel. Hantz Burg vous y attend pour les prendre en charge. Et revenez vite vous réchauffer ici, il y fait bien bon !  

     - Bienvenue aux filles de Falkenberg ! Je m’appelle Dillon d’Ortega, Je suis chargé de m’occuper de vous et de votre bien-être lors de votre séjour ici.  Entrez, et déshabillez-vous aux vestiaires !

   - Déjà ?!  s'étonne une des filles.

   - Oui, ici, tout le monde vit nu ! Vous allez prendre une bonne douche bien chaude. Une fois que vous serez séchées, je vous présenterai à l’Empereur Charlemagne, qui nous fait l’honneur d’être parmi nous. 

  - Toutes nues devant l’Empereur ? !  s'exclame une autre.

   -  Mais oui, vous verrez... Lui aussi est tout nu, comme tout le monde ! » 

    Brigitte Bardot, Martine Bardot, Étienne Lombard, Zoé Lombard, et Mia Fart... Le personnel des Thermes est là, pour leur donner des serviettes et les réceptionner à la sortie des douches.

     Dillon tombe son manteau de peau, laissant apparaître son imposante anatomie. Les exclamations fusent : « Whouah ! »

     « Comment vous nommez-vous, mesdemoiselles ?  demande Dillon pour détourner la conversation et les regards.

    - Je suis Marie, la responsable du groupe, j’ai vingt cinq ans. 

C'est une blonde, cinq pieds six pouces, avec des seins pointus, et, comme toutes, elle a le pubis rasé.

     - Bernadette, dix neuf ans.  Blonde aux seins ronds, six pieds.

     - Adèle, dix huit ans.  Rousse, six pieds, les cheveux courts et des gros seins.

     - Paulette, vingt ans.  Blonde, cinq pieds cinq pouces, des seins très pointus.

     - Gertrude, dix neuf ans.  Rousse, six pieds.

     - Germaine, dix neuf ans.  Rousse, six pieds, jumelle de Gertrude.

     - Claudine, vingt-et-un ans.  Brune, des seins énormes couverts par une chevelure abondante, six pieds.

     - Claudette, vingt-et-un ans.  Sœur jumelle de Claudine, et sa copie conforme.

      - Margot, dix huit ans.  Rousse, cinq pieds trois pouces, des seins ronds et fermes.

    - Sylvie, dix neuf ans.  Brune, cinq pieds cinq pouces, des petits seins ronds.

     - Bien ! conclut Dillon. Il est midi.  Je vais donc vous présenter à Charlemagne, et vous vous restaurerez avant que je vous montre vos quartiers ! »

     Et, suivi par les dix jouvencelles, il gravit les marches et arrive devant l’Empereur. Un Empereur apparemment très bien remis de son vigoureux massage d'hier...

     « Votre Majesté, voici les filles attendues, en renfort de celles qui sont arrivées hier !

    - Hmmm... Comme elles sont belles, bien fraîches... Et elles semblent si délicates, si fragiles...

    - Votre Majesté est bien bonne, lui répond Marie. Elles sont déjà toutes bien aguerries aux plaisirs de la chair ! 

     - Je n’en doute pas... Et tantôt je voudrais goûter à toute cette fraîcheur !

     - Vos désirs seront exaucés, Sire ! Commandez, nous sommes vôtres...

   - Passons d'abord à table, les interrompt Dillon. Nous verrons cela plus tard. »

Il sent que les désirs de l’Empereur montent bien vite...

     Entre-temps, Michel Bailly, Édouard et Gérard Chop, les escorteurs, sont arrivés eux aussi au restaurant des Thermes. Ils ont rejoint les deux gardes arrivés hier, leurs copains Jérôme Binz et Raphael Krips.

 

     Au village a lieu la relève de la garde de midi.

     Albert Fart et Hankel Thiel vont relever Jacques Martin et Stéphane Spohr au portail ouest. Gretel Wilkinson, Christina Hahn et Alexa Dumas vont relever Benoît Spohr, Georges Frisch et Georgette Fart au rempart ouest.

     Les gardes arrivent en volant à l’auberge, pour le repas de midi.

     Gabriel Holz, le garde champêtre, après avoir annoncé le décès de Gertrude Beten, est là lui aussi.

     Tous les midis, il mange à l’auberge avec les gardes.

     Les commentaires vont bon train, encore une fois, à propos de ce traîneau rempli de superbes jouvencelles.  Réservées hélas, semble-t-il aux soldats du roi !

     Child, qui ne dit rien, demande en pensées à Jacou si les gardes ne pourraient pas, eux aussi, disposer des filles s’ils en avaient le désir.

     Jacou lui répond que demain pourra être une journée des filles pour tout le village, y compris pour les gardes ! Car demain, l’Empereur se rend à l’abbaye des Glandières avec toute sa troupe. Donc, jusqu'au soir à leur retour, il n'y aura plus de soldats du roi à Durandalem !

      « Demain donc, dit Gabriel, oui, toutes les filles seront à votre disposition, messieurs. Et à la vôtre aussi, mesdames, bien sûr. Un cadeau de notre bourgmestre ! Oui, demain, pendant les pauses, vous pourrez profiter des filles, qui seront ici à l’auberge pour vous ! »

     Voilà une nouvelle bien agréable...

   « Folâtrer avec une jouvencelle, cela va être un plaisir ! se réjouit Georgette Fart. Vivement demain ! »

     Gabriel refait alors le tour du village pour annoncer à tout le monde la venue des filles.

 

 

     Aux Thermes, on s’organise pour le voyage de demain. Roger Koch, escorté par les deux gens d’arme Aline et Pascal Spohr, va partir vers l’abbaye des Glandières, pour annoncer la venue de l’Empereur.

 « Il y a beaucoup de neige, fait remarquer Roger. La chariote de Robert pourrait ouvrir la marche et déblayer la route, comme elle l’a fait ce matin au village ! On pourrait faire cela dès maintenant...

 - Bonne idée, approuve Jacou. Je fais mander Robert et sa chariote immédiatement ! »

    Puis, s’adressant mentalement aux buandières des Thermes, il leur dit de se tenir prêtes demain matin pour habiller en conséquence l’Empereur et sa suite.

     J’arrive prestement aux Thermes à bord de ma chariote. Heureusement, la chaudière est encore allumée. Je l'arrête à côté des Thermes, et je demande aux techniciens de remplir le chariot que j’ai en remorque. Deux lieues séparent Durandalem de l’abbaye. J’ai estimé à une heure la durée du trajet.

     « C’est toi, Roger, qui vas conduire la chariote. Sois prudent et emporte un manteau à enfiler pour quand tu sors. À l’intérieur, tu devras être nu, il fait très chaud !

     - C’est entendu, Robert...  Allons-y ! » dit-il à son escorte. 

     Tout en se déshabillant pour enfiler le manteau et les chausses, ils s’engouffrent tous les trois dans la chariote. Aline et Pascal ont emporté leur épée et leur arc, pour se défendre en cas d'attaque imprévue.

     Et les voilà partis ! Au portail est, les gardes Jacques Martin et Stéphane Spohr viennent de prendre leur poste. Voyant arriver la chariote, Jacques enfile le manteau et les chausses et descend ouvrir.

     La chariote attaque la couche de neige gelée, sans difficultés. La traction est puissante et pousse facilement la neige sur le bas-côté.

     Il est quatorze heures passées. Ils doivent être de retour avant dix sept heures. Plus tard, de nuit, ce serait plus périlleux.

     Au bout d’un moment, la chariote, chargée de ses joyeux occupants bien au chaud, arrive au carrefour de Naborum et prend la route de Mettis, en direction de l'abbaye.

     Quand ils arrivent en vue des Glandières, les gardes sur les tours donnent aussitôt l’alerte ! On les comprend : jamais ils n’avaient vu une machine infernale comme celle-ci, qui fume de toutes parts et crache la neige sur le côté !

« Qui va là ? » s'écrie Pierre Gross, le chef de la garde.  Lui et ses hommes bandent leur arc, prêts à tirer...

     Il voit sortir de la chariote un homme nu, qui enfile vite un manteau. Puis une fille et un garçon tout aussi nus, qui font de même.

      « Bonjour Pierre... Ne me reconnais-tu point ? je suis Roger Koch, le coursier de Durandalem. Et je te présente mon escorte, Aline et Pascal Spohr ! Quant à cette machine qui vous a tant surpris, c'est une nouvelle invention de Robert le forgeron, qui permet de dégager la neige devant elle, et de voyager bien au chaud.  Pouvons-nous entrer ?

   - Bien sûr. Ouvrez la porte, vous autres ! »  

Voilà la machine derrière les remparts, qui fait un tour en dégageant la neige devant la bâtisse.

     « Mais c’est une invention géniale ! Et pourquoi êtes-vous là ?

    - Je viens porter un message à votre père supérieur, l’archiprêtre des Glandières, Simon de Beauvoir ! 

     - Suivez-moi, je vous mène à lui. 

L’archiprêtre est maintenant âgé de soixante dix huit ans.

      - Alors, il paraît que tu as un message pour moi ?

     - Oui, Monseigneur ! L’Empereur du Saint Empire Romain d’Occident, Sa Majesté Charlemagne en personne, est de passage à Durandalem. Il y fait étape avant de retourner à Oche. Il a émis le souhait de venir prier ici même avec vous demain ! 

     - Demain !!  Mais combien sont-ils avec lui, et combien de temps resteront ils ?

     - Une quarantaine. ils viendront le matin, et repartiront dans la journée, pour être de retour à Durandalem avant la nuit. Ils apporteront des victuailles pour nourrir tout le monde.

     - Soit ! Mais la route est fort peu praticable, avec toute cette neige...

     - Monseigneur, ne vous inquiétez pas pour cela, dit Pierre. Venez donc voir dehors la dernière trouvaille de Robert, leur forgeron ! 

Et il entraîne l’archiprêtre dans la cour.

      - Voici la chariote qui écarte la neige, et nous fait voyager au chaud !  réexplique Roger. Charlemagne et ses gens arriveront à l'abbaye une heure après le lever du jour !

     - Très bien ! Nous allons nous organiser pour les recevoir au mieux. Merci pour votre visite !

    - Oui, maintenant, nous allons rentrer, pour être de retour avant la nuit, et nous élargirons encore le chemin !

     Sous les yeux ébahis de l’archiprêtre, les deux hommes et la femme se mettent nus devant la chariote et y pénètrent, refermant la porte. Puis il repartent par le portail que Pierre a fait ouvrir.

     Le trajet de retour se fait sans aucune difficulté. Le chemin est bien large et bien dégagé. Dès avant dix sept heures, ils se retrouvent devant le portail est de Durandalem.

 

« Qui va là ? » demande machinalement Jacques Martin ... Alors que, bien sûr, il a reconnu la chariote qui revient de l'abbaye !

     Stéphane enfile les chausses et le manteau, et va ouvrir le portail.

     Roger, Aline et Pascal sont de retour aux Thermes. Mission accomplie ! Une bonne douche est nécessaire. Ils ont eu chaud dans la chariote ! Puis ils montent tous les trois prendre du plaisir. Rendez-vous au dortoir, leur a-t-on dit...

   Demain, c'est moi qui transporterai l’Empereur à l’abbaye !  Je récupère la chariote pour descendre à l’auberge. Ce soir, je vais lui faire une révision complète.

     Aux Thermes, les filles attendent les clients dans le dortoir. Elles sont dix-huit, plus les quatre filles de joie. Elles ont rassasié la majorité des soldats de Charlemagne. L'Empereur lui-même a eu droit à Gertrude et Germaine, les jumelles rousses. Elles l'ont quasiment anéanti ! À ce rythme-là, il risque de trépasser... Heureusement, les remèdes et les potions de Jacou savent redresser toutes les situations !

     Le personnel des Thermes a lui aussi le droit de profiter des filles, et il ne s'en prive pas !   Marianne Tritz et Paulette Holz se sont prises au jeu. Avec les jumelles brunes Claudine et Claudette, elles ont eu de très grands moments de plaisir.

    Une fois contrôlés les niveaux d’eau et de charbon des chaudières, les techniciens des chaudières sont montés tous les trois, prétextant une vérification technique. Après vérification, ils confirment : tout fonctionne à merveille !

     Même Jacou s’est laissé tenter.

    Les buandières et les agents d’entretien sont au taquet ! Les buandières Josiane et Josette, de l’ancienne école, et Madeleine Stone de la Résidence, sont venues en renfort, apportant un stock de serviettes et de draps. Celui des Thermes arrive à sa fin.

     Toutes les chambres de l’hôtel ont été occupées.  Tous les agents d’entretien se mettent à la tâche :  Nina et Paulette Stock, Eugène, Bérengère et Léon Stark, Françoise, Francine  et Louis Hoste, Claude Bardot. Plus le renfort de ceux de la Résidence, Joshua et Gisèle Levy, de ceux de la Garderie, Sophie Maigret et Jenny Tell, et celui de Patrick Martinet, de la Garderie II. Tout ce monde n'est pas de trop pour arriver à suivre la cadence de nettoyage des douches et les changements de literie. D'autant qu'au passage, ils profitent eux aussi des bienfaits prodigués par les filles, ce qui ne manque pas de ralentir la cadence de nettoyage !

     Les machines à laver tournent à fond, et même celle de l’ancienne école est en fonction. Mariette, Marianne, Josette et Josiane s’y sont mises aussi. 

     Bien sûr, les agents de sécurité Jean et Jacky Muller ont été sollicités, et n’ont pas fait de manières pour satisfaire les jouvencelles.

   C'est ainsi que presque tout le personnel a eu des rapports avec les filles de madame Claude...

Mais le calme revient petit à petit dans la maison. La table pour le repas du soir se prépare.  L’Empereur est remis de ses émotions. Mais côté sexe, lui a préconisé Jacou, il ne doit plus rien entreprendre avant deux jours !

     Demain, rappelons-le, avec sa troupe, il doit rendre visite à Monseigneur Simon de Beauvoir, à l’abbaye des Glandières.

     Au repas du soir, Jacou prend la parole.

      « Vaillants soldats de l’Empire, vous avez profité des plaisirs de la chair. Nous espérons que vous en êtes satisfaits ! »

    Une clameur de satisfaction et de bravos s’élève dans l’assistance.

     « Demain, dès le lever du jour, vous escorterez l’Empereur jusqu’à l’Abbaye des Glandières, à deux lieues d’ici. Vous y passerez la journée, et vous serez de retour demain soir.  Je vous suggère donc de vous coucher tôt, afin de récupérer de vos efforts de tantôt ! »

     Puis il se tourne vers la table des filles :

     « Demain, les filles, vous irez dans le village, au contact de la population, qui est avide de vous connaître ! Vous aurez des chambres à l’auberge, à la Résidence, aux deux garderies, à l’écurie, à la ferme. Dillon vous indiquera les différents lieux où vous vous rendrez ! Vous y passerez la journée, et la population viendra vous solliciter. Mais sachez que vous ne serez contraintes en aucune manière !  Ce soir, reposez-vous, vous avez quartier libre, vous pouvez faire ce que bon vous semble. Après toutes ces rudes sollicitations, nul doute que vous apprécierez les tisanes et les pommades apaisantes que Chantal Iser et Valérie Burg vont venir vous distribuer... »

     Et le repas se poursuit dans le calme. Des rires fusent parfois. La bonne humeur règne parmi les soldats, ce qui ravit Charlemagne, vraiment très heureux d’être revenu à Durandalem.

     Et bientôt, tout le monde s'en va prendre du repos, d’aucuns dans leurs appartements, les filles dans les chambres.  Le personnel retourne chez lui.

     Après toute cette joyeuse agitation règne un silence bien apaisant. Les concierges font leur tournée d’extinction des candélabres, les techniciens contrôlent les chaudières, et toute la maison s’endort.

     Il ne neige plus depuis que Roger est revenu de l’abbaye.

     La lune brille et illumine la blanche campagne austrasienne. Plus aucun bruit dans le village, si ce n’est le bruit des pas des gardes de nuit qui font leur ronde sur les remparts.

La vie au village

 

Samedi 11 février

 

     La cloche de l’ancienne école sonne sept coups. Le jour se lève. Le responsable de l’hôtel, Guillaume Bardot, cinquante quatre ans, fait le tour des chambres et des dortoirs pour réveiller toute la troupe, et va prévenir la garde de l’Empereur que le petit déjeuner est servi.

     Dans l’écurie, c’est l'effervescence. Il faut préparer quarante chevaux !   Hantz Burg et ses palefreniers, Vivien Pferd et José Stock sont à pied d’œuvre. Ils avaient déjà tout préparé la veille, et sont en train de seller les chevaux recouverts au préalable d’une chaude couverture.

     Tout le personnel des Thermes est là pour aider les soldats à se vêtir. Chaudement, car il gèle dehors !

     J’arrive aux Thermes aux commandes de ma chariote à vapeur. Je sors nu de la chariote et je m’engouffre prestement dans l’établissement. Après une douche bien chaude, je me présente devant Charlemagne.

     « Votre Majesté, je vous invite à faire le trajet à bord de ma chariote jusqu'à l’abbaye des Glandières, vous voyagerez bien au chaud !

     - Ce sera avec le plus grand plaisir, Maître Forgeron du Royaume. Au retour, je te nommerai Maître Forgeron de l’Empire !

     - Votre Majesté est trop bonne... Inutile de vous habiller. Dans la chariote, il fait une chaleur d’enfer !  Agnès Hune, notre buandière de dix sept ans, fera le voyage avec nous. Elle s’occupera de vos impériaux vêtements, ceux que vous revêtirez à l’abbaye. »

     Le moment du départ est arrivé. Un grand chariot tiré par deux chevaux est rempli de victuailles, pour se nourrir sur place. Il y en a bien assez pour nourrir aussi tous les habitants de l’abbaye ! À bord, Josiane Lutz et Marianne Tritz, les cuisinières qui s’occuperont du repas. Et les jumelles Marlène et Hélène Basin, qui feront le service. Le chariot sera mené par Hantz Burg en personne ! Un braisier est installé dans le chariot, avec quelques bûches, afin de réchauffer les voyageurs.

     Les soldats vont à l’écurie reprendre leurs montures. L’Empereur monte dans la chariote et confie son manteau à Agnès. Je m’y installe, et nous ouvrons la marche, en roulant doucement sur le sol gelé.

     La veille, à l’aide de la lame devant la chariote, Roger avait dégagé la neige. Et comme elle a cessé de tomber, j’ai pu démonter la lame, ce qui nous allège.

Il est huit heures sonnantes quand le convoi franchit le portail Est. Les gardes Gretel Wilkinson et Georgette Fart viennent de prendre leur poste, et ouvrent grands les deux battants du portail, en saluant l’Empereur et la troupe. 

Le voyage se passe sans encombre. Les soldats sont partis devant pour s’assurer que la route est bien libre.

     Charlemagne est ravi d’être au chaud. Et en ravissante compagnie, ce qui ne gâte rien. Si Jacou ne lui avait pas interdit la gaudriole, il aurait bien profité de la fraîcheur de son habilleuse...

      « Tu me plais beaucoup, sais-tu, mignonne !

     - Dès que votre Majesté le souhaitera, je serai à votre disposition... »

     Et la troupe arrive en vue de l’abbaye. Il est bientôt neuf heures. Les gardes de l’Empereur sont devant le portail :

     « Ouvrez, au nom de l’Empereur Charlemagne ! »

     Pierre Gross, le chef des gardes de l’abbaye, donne aussitôt l’ordre d’ouvrir.

     Nous mettons tous les trois nos chausses fourrées. Je sors le premier. J'enfile mon manteau. Agnès, qui s'est déjà tout habillée à l’intérieur pour ne point trop perturber la piété des moines, sort à son tour. Elle présente à Charles la tunique impériale et le manteau de pourpre et d’hermine. Il s'en revêt prestement. Puis elle le coiffe de sa couronne et s’écarte avec respect.

     Simon de Beauvoir, l’archiprêtre dirigeant l’abbaye s’avance dans la neige qui crisse sous ses pas :

     « Quel honneur, votre Majesté ! Au nom du pape Léon III, représentant de Dieu sur la Terre, et au nom de tout le Clergé, nous vous souhaitons la bienvenue en nos murs !

     - Je suis touché par votre accueil. Mais entrons vite, ce sera sûrement plus confortable à l’intérieur !

     - Certes. Si Votre Majesté et sa suite veulent bien me suivre… »

     Et tous pénètrent dans le réfectoire de l’abbaye, chauffé correctement.

     Pierre prend en charge le chariot et les filles, pour les mener à l’office. Hantz, à l’aide de quelques moines, emmène les chevaux à l’abri.

     Simon de Beauvoir indique un trône dressé là pour l’occasion, et Agnès débarrasse l’Empereur de son manteau d’hermine, avant de s’éclipser discrètement pour rejoindre les filles à l’office. Car une présence féminine ne saurait être bienvenue lors de ces conversations entre le Clergé et l’Empereur, elle le sait bien...

    Les discussions vont bon train entre Simon de Beauvoir et Charlemagne. On discute de religion, de l’emprise du Clergé sur la population et de son contrôle, on parle de Sa Sainteté le pape Léon III, et de son emprise sur la Lombardie, grâce à Charlemagne et à son armée…

     Mais on parle aussi des filles de Falkenberg, actuellement en résidence à Durandalem... L’archevêque souhaiterait que l’Empereur ordonne à Jacou Artz d’en envoyer quelques-unes ici, pour satisfaire les gardes. Eux, ils n’ont pas prêté serment à Dieu et n’ont pas fait vœu de chasteté !

« Je n’ai aucun ordre à donner à Jacou Artz, rétorque Charlemagne. Au village, je suis son hôte, et non son Empereur ! Néanmoins, je vais intercéder en votre faveur pour que votre requête soit entendue... »

     Les soldats de l’Empereur sont attablés dans une pièce annexe, servis par les moines, mais aussi par les filles venues de Durandalem. Les pichets de vins apportés dans le chariot sont fort sollicités, et quelques moines se laissent eux aussi tenter par ce nectar. C'est un très gouleyant vin de Bourgogne, envoyé spécialement pour le village par les négociants en vin de Lugdon.

     Un moine arrive, il murmure un mot à l’oreille de Simon, qui dit :

     « On me fait savoir que votre Majesté peut, si elle le désire, passer à la salle à manger. Le repas est servi ! »

     Dans l’office, je fais savoir à l’abbé Jean Christian, le second de Simon de Beauvoir, que j’ai avec moi quelques fioles que m’a confiées Jacou.

   « Notamment, ajouté-je en souriant, celle qui dégrise et retape en un instant celui qui a trop bu. Vu l’avidité avec laquelle certaines de ses ouailles consomment, cela pourrait servir.

   - Grand merci, Robert... Effectivement, je le crains, nous risquons d'avoir besoin de tes potions magiques à la fin du repas ! »

     Ledit repas est succulent. Les cuisinières des Thermes, assistées de moines de l’abbaye, ont servi un banquet digne de l’Empereur. Il les félicite pour ces mets, tous plus délicieux les uns que les autres.

     Les soldats ont fait bombance. Pierre suggère à l'Empereur que quelques-uns des soldats pourraient prendre le relais des gardes de l’abbaye. Ainsi lesdits gardes pourraient eux aussi profiter de ces excellents mets... Charlemagne lève une main. Aussitôt, sa garde personnelle se lève et va relever les gardes sur les remparts.

     « J’ai toute confiance en eux, soyez certains qu’ils ne failliront pas ! dit-il à Simon. Quand les beaux jours reviendront, vous viendrez, vous et ceux de Durandalem, passer du bon temps dans mon fief d’Oche !

- Votre Majesté nous honore, en nous invitant en son palais. C’est un privilège qui nous touche ! »

     La visite de l’abbaye débute par la chapelle. L’Empereur et Simon de Beauvoir s'y recueillent un moment.

      Puis l'on passe aux caves. Là sont fabriquées diverses liqueurs à base de fruits des vergers alentours : pommes, raisins, quetsches, cerises, poires...  On en tire d’excellents alcools distillés et macérés.

     Enfin, l’Empereur visite les cellules des moines. Ils vivent de façon austère, loin des conforts de la haute société bourgeoise. Néanmoins, chaque cellule est équipée d’une douche, et d’un coin d’aisance, et le système d’eau chaude que j’ai installé il y a quelque temps fonctionne parfaitement.

     « Votre Majesté, dis-je, sans vouloir vous commander, il se fait tard, et il serait prudent de retourner à Durandalem avant la nuit !

    - Tu as raison, Robert le Schmit ! Il est temps de prendre congé de nos hôtes... »

     Et pendant que Charlemagne fait ses adieux à Simon de Beauvoir et à ses disciples, je prépare la chariote, en lançant vivement le feu qui était en veille. Au bout d’un temps, la pression est à nouveau suffisante. Nous pouvons partir !

     Les chevaux sont sortis des écuries. Hantz veille à ce que tout se déroule bien, et les soldats enfourchent leurs montures. Les filles remontent à bord du chariot vide, si ce n’est quelques bûches pour le brasier. Toutes les denrées et boissons restantes ont été laissées à l’abbaye. Le braisier est réactivé.

     Agnès est devant la chariote, Quand Charlemagne arrive, elle lui enlève son manteau, et le masquant à la vue, elle lui enlève aussi sa tunique, le faisant monter nu dans la chariote.

     Puis elle monte dans la chariote et se déshabille tant bien que mal à l’intérieur, où règne une chaleur d’enfer. Il est temps que nous démarrions.  Je tombe les habits à mon tour, et je m’installe nu aux commandes. Je referme la porte, nous voilà prêts. Pierre donne l’ordre d’ouvrir le portail, et la troupe se met en branle, avec la chariote en tête escortée à cheval par la garde de l’Empereur. Direction Durandalem !

     Le voyage se passe sans problème. Le soleil de midi a fait un peu fondre la glace, apportant une meilleure adhérence aux roues de la chariote. Il est dix sept heures quand notre convoi est de retour devant le portail est.

Albert Fart et Georges Frisch sont de garde.

« Qui va là ?  lance Albert du haut des remparts.

- Ouvrez, au nom de l’Empereur ! » dit un des gardes à cheval.

     Il nous avait bien sûr reconnus, mais le protocole doit être respecté, c’est la même consigne depuis plus de trente ans !

     Albert et Georges se vêtent prestement, et descendent ouvrir les deux battants du portail pour laisser entrer la troupe.

     Tous sont contents d'être de retour. Les soldats déposent les chevaux aux écuries des Thermes, où les palefreniers les prennent en charge. Hantz y emmène aussi le chariot vide.

     Puis Charlemagne sort de la chariote, nu, et se dépêche d’entrer dans les Thermes. Il est suivi de près par Agnès, qui porte ses habits, et qui les dépose à l’entrée afin que les buandières les prennent pour les laver.

   Quant à moi, je conduis la chariote jusqu’à la grande forge. Mon gendre Jérémoy me fait alors savoir qu’il a bricolé quelque chose d'intéressant, et qu'il va me le montrer.

La journée des filles

    

Les filles reviennent des maisons des habitants après avoir passé une journée épuisante - mais ô combien jouissive - auprès de quasiment toute la population de Durandalem. Le personnel des Thermes, quant à lui, avait déjà eu droit hier à leurs faveurs.

     - Tatiana a œuvré dans les bains communaux et à l’auberge.                        

     - Nina et Prisca ont rencontré les mineurs et les clients de l’auberge.

    - Claudine, Claudette et Margot se sont occupées des gardes lorsqu’ils étaient en pause, ainsi que des clients de l’auberge.

     - Angèle a pris en charge la maison d’Émile et ses palefreniers. Elle est allée ensuite visiter la maison des cantonniers. Elle ira rendre visite aux cantonniers cet après-midi.

     - Paulette s'est chargée des banquiers-orfèvres, puis est allée prêter main forte à Angèle chez les cantonniers.

     - Gertrude et Germaine sont allées visiter la Résidence.

     - Ella et Isabelle ont goûté aux produits de la ferme.

     - Louise officiait dans la maison des forgerons.

     - Ida était au four et au moulin, puis, elle aussi, chez les cantonniers.

     - Adèle et Sylvie ont visité la fonderie, puis se sont chargées des deux garderies et des gens d’arme.

     - Bernadette, Marie et Léa ont passé la journée à l’ancienne école.

 

     Pour l'occasion, Chantal Iser, Marie Brett et Valérie Burg ont ouvert un cabinet de soin dans un des dortoirs des Thermes, afin de soigner, calmer et requinquer toutes les filles, dont les anatomies ont été soumises à rude épreuve !

     Une fois remises, elles se présentent au repas.

     Jacou prend la parole :

     « Ce soir, c'est à vous toutes, mesdemoiselles, que je veux rendre hommage. Vous n’avez pas failli lors de votre mission. Une mission des plus difficiles.... Vous en serez généreusement récompensées  ! Je sais que pour vous, c’est un plaisir autant qu’un métier. Le village de Durandalem a donc prévu des cadeaux pour vous ! »

     À ce moment, Emmanuel Frisch entre dans la salle de restaurant avec une petite charrette, dans laquelle brillent des objets dorés.

     Il en sort deux et les apporte à Jacou.

     « Voici pour vous, mesdemoiselles, des outils de plaisir.  En bois recouvert d’or. Ils pourront être vos assistants sexuels. Un outil anal, en forme de sapin, et un outil vaginal, en forme de phallus. Ils ont été confectionnés par notre orfèvre, Emmanuel Frisch. Il les a testés sur l’une d’entre vous, qui lui a rendu visite...

     Paulette se lève alors et témoigne :

     - C’est vrai, ces outils sont formidables. Qu'ils soient utilisés seuls, ou ensemble, ou avec un bon mâle ! 

     Et toute la salle s’esclaffe...Voilà des paroles qui donnent envie d’essayer.

     - Chacune d’entre vous recevra un exemplaire de chacun de ces outils !  Demain, mesdemoiselles, nous vous offrons en outre une remise en forme dans notre ancienne école, des soins prodigués par nos masseuses expertes.  Ces soins durent à peu près deux heures. Il vous faudra former trois groupes de cinq à six personnes, un groupe le matin et deux l’après-midi. Rendez-vous en bas, Dillon est désigné pour vous y emmener. Trois d’entre vous ont déjà testé ces soins. Demandez-leur ce qu’elles en pensent !

       Alors Bernadette, Marie et Léa se lèvent, enthousiastes.

      - C’est fantastique ! dit Marie. Que du plaisir, que du bonheur !

     - C’est vrai, renchérit Bernadette. C’est vraiment incroyable ! »

    - Et après, ajoute Léa, nous sommes dans une forme éblouissante, comme vous pouvez le voir ! »

    - Voilà, conclut Jacou.  Mesdemoiselles, Sa Majesté l’Empereur voudrait maintenant vous dire quelques mots ! »

     Charlemagne alors se lève et proclame :

     « Mesdemoiselles, vous avez su rendre heureux votre Empereur et toute son armée, ainsi que la population de tout un village. Un village qui me tient particulièrement à cœur, j'ai nommé Durandalem ! Vous êtes et vous serez toujours respectables et respectées par votre Empereur ! 

     Et votre Empereur à une faveur à vous demander :

     Seriez-vous prêtes à donner de votre personne, lors d’un voyage à l’abbaye des Glandières, un jour prochain ?  Il y a là-bas une communauté de moines, et des gardes défendant l’abbaye. Ils seraient ravis de vous accueillir.

     Alors Marie se lève.

     - Les filles, qu’en pensez-vous ? 

     Toutes acquiescent à la demande de l’Empereur.

      Ce sera une joie et un honneur que de satisfaire cette communauté ! reprend Marie. Est-ce loin de Durandalem ? 

     Alors Charlemagne se tourne vers Jacou qui dit :

     - L’abbaye des Glandières se trouve à seulement deux lieues d’ici, nous y sommes en moins d’une heure ! 

     Je demande à l’Empereur si je peux prendre la parole.

     Charles en profite pour tenir une promesse qu'il m'a faite durant le trajet :

     - Que l’on m’apporte Joyeuse, mon épée ! 

     Et une fois en possession de l’épée, il m'ordonne :

      - Maître Forgeron du royaume, à genoux ! 

     Je m’exécute et m'agenouille devant lui.

     - Robert le Schmit, tu m'avais jadis fabriqué une épée magique, Durandal, que j’ai offerte à mon neveu Roland, prince des Marches de Bretagne. Hélas, Roland a péri lors d’un combat en Hispanie, dans la passe de Roncevaux, et Durandal a disparu à jamais ! Je te présente sa remplaçante, mon épée Joyeuse. Par les pouvoirs qui sont les miens, et par la volonté de Dieu, Robert le Schmit, je te nomme ici Maître Forgeron de l’Empire Romain d’Occident ! 

     Et il me pose le plat de Joyeuse sur l’épaule gauche, puis sur la droite.

      Relève toi, Maître Forgeron de l’Empire ! Tu as la parole maintenant...

     -  C’est un immense honneur d’être ainsi nommé par Votre Majesté !   

     Puis me tournant vers les filles :

      Mesdemoiselles, une bonne nouvelle pour vous : j’ai inventé une chariote qui permet de voyager à l’abri des intempéries.

     - Je l’ai expérimentée moi-même aujourd’hui en me rendant à l’abbaye des Glandières ce matin !  m'interrompt l’Empereur.

     - Si fait ! Outre cela, mon gendre, digne héritier de mon art, vient de mettre au point  une chariote plus grande, qui permettra de vous transporter toutes à la fois, au chaud et à l’abri des intempéries, jusqu’à l’abbaye des Glandières, et d'en revenir. Tout cela sans devoir vous vêtir ! »

     À ces mots, les filles sont ravies !

     « Certes, dit Marie, devoir prendre la route en hiver n’est pas très agréable... Mais la perspective de voyager dans un tel confort a de quoi nous réjouir !

     - Au terme de votre séjour parmi nous, ajouté-je, je vous ramènerai de la même manière à Falkenberg ! »

     Un signe de tête approbateur de Charlemagne, et c'est au tour de Jacou de prendre la parole.

     - Maintenant, fêtons dignement la nomination de Robert le Schmit au grade le plus élevé de l’Empire ! Buvons tous à sa santé ! »

     Et le repas se prolonge jusque tard dans la nuit. On boit, on festoie, on célèbre ma nomination. Ma gloire de ce soir rejaillit sur tout le village !

     Prenant congé, je retourne chez moi. Ma chariote a encore assez d’énergie pour m’y ramener sans encombre et à l’abri du froid.

     Il gèle particulièrement fort cette nuit. La campagne est éclairée par une lune brillante. Demain, il va faire bien froid !

      Petit à petit, tout le monde va se coucher. Bientôt, il n’y a plus d'éveillés que les concierges qui font leur tour d’extinction des chandeliers, et les techniciens qui font leur ronde des chaudières de l’établissement.

Dimanche 12 février

 

     Les gardes qui sont de réserve aujourd’hui, à savoir Paul Spohr, Pierre, Roland, et André Martinet, vont aider les techniciens communaux Julien Stock, Alain Koch et Armand Bardot à entretenir et à réparer les foyers pour la production de vapeur. En effet, une partie des conduits a gelé cette nuit, et quelques maisons sont privées d’eau.

     Comme il fait très froid, ils se relaient, et se réchauffent à l’auberge, en attendant de retourner au travail.

     À dix heures, Benoît et Stéphane Spohr, qui viennent du portail Est, ainsi que Hankel Thiel et Joseph et Pierre Spohr, qui viennent des remparts Nord, arrivent à l’auberge, après s’être fait relever par Gretel Wilkinson et Georges Frisch au portail Est et par Jacques Martin, Christina Hahn et Johan Martinet au rempart Nord.

     Joseph Spohr annonce qu’une partie de la réserve d’eau de la muraille Nord a tendance à geler.  Et Pierre Spohr précise que si l’eau gèle, elle risque de faire éclater la muraille ! Il faudra renforcer la production de vapeur sur les murs, tout le long...

    « J’ai prévenu Jérémoy et ses fils Nathan et Léo, dit Hankel Thiel. Ils vont arriver avec du matériel pour ajouter des générateurs de vapeur. »

     Peu de temps après, les forgerons sont là. Jérémoy a inauguré à cette occasion sa grande chariote à vapeur, pour transporter les générateurs et des tuyaux. La chariote permet en plus à chacun de se réchauffer sur place !

     Il y a déjà plus de trente ans, un chemin pavé a été construit tout le long des murailles du village, pour faciliter l’accès aux chariots livrant le charbon nécessaire aux générateurs de vapeur.

     Tout le monde se met au travail. Les gardes de réserve retournent à la muraille, les employés communaux terminent la réparation de la conduite descendante, et l’eau se remet à couler. Bientôt elle arrivera à nouveau aux maisons.

     Les forgerons, et les gardes de faction sur les remparts Nord commencent à installer des tuyaux et des générateurs. Les braises fournies par la chariote permettent d'allumer les générateurs et de produire de la vapeur. Et bientôt, toute la muraille est renforcée du côté du village, contre la réserve d’eau.

     Jérémoy a prévu de renforcer au printemps ces murailles-réserves d’eau. Une muraille supplémentaire de chaque côté isolera complétement la réserve. Il n’y aura plus de problème de gel !

 

     Charles Higgins, Ce matin à onze heures, va dire une messe en mémoire de Gertrude Beten, décédée vendredi dernier, munie des sacrements de l’Église. Une messe annoncée à tous par Gabriel Holz, le garde champêtre.

     Gertrude était notre doyenne, et restait la seule bigote de Durandalem, après le décès de sa sœur Germaine, il y a deux ans. Sa dépouille repose dans la chambre froide de la crypte, en attendant une terre plus meuble pour l’ensevelir.

 

     Quelques-uns des enfants sont là pour servir la messe.

      Les filles de Falkenberg et leurs gardes ne sont pas là. Ni Dillon et les masseuses de l’ancienne école, qui s’en occupent ce matin. Quant aux aubergistes Marion Wasch, Julie Wasch, Esther Schmit et Ariston Mayer, elles s’occupent des gardes en pause. Roger, lui, doit partir en chariote prévenir l’abbaye des Glandières de l’arrivée des filles demain. Mais la plupart des autres habitants sont présents, et l’église est bondée.

     Toutes et tous sont nus. Il fait bien chaud dans l’église, malgré le froid glacial qui règne dehors.  L’Empereur Charlemagne en personne assiste aux funérailles, nu et couronné, en présence de plusieurs de ses fidèles gardes. Des gardes nus, mais armés, comme le veut le protocole.

     Le bourgmestre, Jacou Artz, prend la parole, évoquant la longue vie de cette ouaille de Dieu, et le service exemplaire qu’elle a accompli sans faillir durant toutes ces années.

     Elle sera inhumée au printemps, aux côtés de sa sœur Germaine et de l’abbé Angst, qu’elle a servi jusqu’à sa mort.

 

     Après la messe, un peu avant midi, les habitants se retrouvent à l’auberge. L’Empereur, sa garde et quelques quidams se rendent aux Thermes, pour y prendre le repas de midi.

     Les soldats de l’Empereur sont restés bien au chaud. Certains n'ont pas manqué de profiter des bienfaits dispensés par les filles disponibles.

     Les gardes en pause à l’auberge ont fini de manger, et repartent à leurs postes. Benoît et Stéphane Spohr prennent la relève au portail Ouest, remplaçant Bernard Spohr et Georgette Farts.  Hankel Thiel et Joseph et Pierre Spohr se rendent aux remparts Sud, remplaçant Albert Fart, Alexa Dumas, et Paul Frisch.

     Même après toutes ces années, les habitants sont toujours épatés de voir ces gardes volants passer au-dessus d’eux. Aujourd’hui, ils sont particulièrement emmitouflés. La vitesse du vol renforce la sensation de froid glacial !

     À l’auberge, ma fille Ariston fait le service, aidée par Aline Hair, la blanchisseuse, qui assure aussi la distribution de vêtements chauds pour celles et ceux qui en font la demande.

     Notre nouveau doyen Child se rappelle un hiver semblable dans les années 770... La glace avait alors atteint une épaisseur de plus d’une demi-toise dans l’étang d’Oderfang, au Nord de Naborum !

      Vers treize heures, une charrette se présente au portail Ouest.

     « Qui êtes-vous ? demande Benoît Spohr, en ouvrant la fenêtre du poste de garde au-dessus du portail.

     - Paul Priest et Pierre Kirsch. Nous venons de Falkenberg, nous apportons une nouvelle à Jacou Artz, votre bourgmestre. 

     - Entrez ! dit Benoît, tandis que Stéphane s’est habillé pour descendre ouvrir le portail.

     - Vous trouverez Jacou Artz aux Thermes. Présentez-vous aux vigiles à l’entrée. »

      Prévenus mentalement par les gardes du portail, les vigiles Amandine Bardot et Jean d’Ortega sont sortis devant les Thermes pour les accueillir.  Hantz Burg est venu des écuries tout à côté pour prendre en charge leurs chevaux et les réchauffer.

     « Entrez vite ! dit Amandine. Venez prendre une bonne douche bien chaude, le voyage a dû vous geler jusqu’aux os !

    - Si fait ! Nous sommes transis de froid !

     - Après la douche, ajoute Jean, je vous accompagnerai voir Jacou. Il est en train de déjeuner avec l’Empereur Charlemagne. 

     Une fois douchés et réchauffés, ils se rendent nus au restaurant et s’inclinent devant l’Empereur.

     - Relevez-vous, messieurs ! leur dit-il.

     - Quelles nouvelles vous ont fait braver le froid ? demande Jacou. 

     Paul Priest prend la parole :

     - Eh bien voilà...Madame Claude a rendu son dernier soupir hier au soir. Ses funérailles auront lieu en l’église de Falkenberg, ce mercredi. Elle aurait souhaité que ses filles soient là, elle espérait qu’elles seraient présentes...

     - Voilà une bien triste nouvelle... Madame Claude était ici une personne estimée !

     - Elle l’était tout autant à Falkenberg ! ajoute Pierre.

     - Eh bien soit ! dit Jacou. Les filles et leurs gardes seront de retour à Falkenberg mardi dans la soirée. Installez-vous à table, restaurez-vous, reprenez des forces. Je suppose que vous repartez tantôt !

     - Oui, Maître Artz, nous repartons dès que possible... »

    Jacou me demande alors si ma chariote pourrait faire l’aller-retour à Falkenberg. Roger la piloterait. Je lui réponds que c'est tout à fait possible. Il se tourne vers les deux émissaires :

  « Messieurs, nous disposons d'un nouveau moyen de locomotion qui va vous épargner le froid pour le trajet du retour ! Il s'agit d'une chariote à vapeur mise au point par notre infatigable inventeur Robert Schmit, que vous connaissez déjà... Roger va vous conduire à bord de la chariote à vapeur. Nous attellerons la charrette derrière.

   - Vrai ? C’est une joie de savoir que nous n’arriverons pas gelés à Falkenberg ! »

     Et après le repas, les deux émissaires attendent au chaud que Roger soit là avec la chariote.

     Roger est passé chez moi. J’ai fait le plein de charbon et d’eau, et j’ai installé le chasse-neige à l'avant. Ainsi, le trajet du retour sera beaucoup plus aisé !  Roger se déshabille, monte dans la chariote, et se rend devant les Thermes. Hantz sort de l’écurie avec la charrette attelée, l’accroche à l'arrière, puis retourne vite au chaud.

     Les deux émissaires sortent, un peu surpris qu’on leur dise de sortir nus. Ils s’engouffrent vite dans la chariote, et apprécient grandement la chaleur qui y règne. Amandine leur tend leurs vêtements pour qu’ils s’habillent en arrivant à Falkenberg. Et les voilà partis !

     Au portail Ouest, c’est Benoît qui s’y colle.  Se rhabillant chaudement, il descend ouvrir le portail pour laisser passer cet étrange attelage avec une charrette attelée sans charretier ! Et il remonte prestement dans la salle de garde bien chauffée.

     « Ce qui serait pratique, dit-il, ce serait de pouvoir ouvrir le portail depuis ici, sans être obligés de descendre dans le froid...   Il faudra demander ça à Robert ou à Jérémoy, ils vont bien encore nous trouver un système à leur façon ! » 

     La chariote affronte les rigueurs de l’hiver. La lame fait son office et dégage des blocs de neige gelée sur le côté. Le chemin pour le retour est libéré.

     « Quelle belle invention ! dit Paul. Robert est vraiment un génie !

     - Oui, et en plus, nous avons le modèle familial, qui permettra de ramener toutes vos filles ensemble au chaud mardi !

     - Il nous faut cette technologie ! Crois-tu que Robert y consentirait ?

     - Je le lui demande ! »

     Et Roger m'appelle mentalement. Je réponds que je suis d'accord, et qu’il n’a qu’à mener la chariote chez Albert et Norbert Feuer, les forgerons de Falkenberg. Ils comprendront vite le principe, je les ai enseignés sur la vapeur, il y a déjà longtemps. Et ils ont installé des douches et des saunas dans la maison de Madame Claude, ainsi qu'à l’hôtel Pax.

     « Oui, c’est possible, leur dit Roger.  Je vais séance tenante présenter la chariote à Albert et Norbert Feuer, vos forgerons. » Paul Priest et Pierre Kirsch sont subjugués par cette communication mentale !

     Les voilà sans encombre à Falkenberg, en ayant dégagé le chemin sur la route. Roger, sur les indications des deux émissaires, arrive devant la forge des frères Feuer. Ils en sortent nus, au grand étonnement des rares personnes dehors par ce froid, et se rhabillent prestement, comme le fait Roger.

     Roger leur explique alors tous les bienfaits d’une telle machine, qui permet non seulement de voyager au chaud, mais peut aussi déblayer la neige ! Et il leur suggère de construire un modèle similaire.

    La charrette a été décrochée.  Roger remonte dans la chariote, tombe le manteau et les chausses, et nu, commence à déneiger les rues de Falkenberg. En quelques minutes, il a dégagé la place, les accès à l’hôtel et à l’église, la rue commerçante et les entrées Nord et Sud du bourg...

     « Robert Schmit est vraiment un génie ! s'extasie Norbert. 

     - Le meilleur qui soit ! renchérit Albert. »

    L'ancien bourgmestre de Falkenberg, Simon Lang, est décédé voici quelques années. C'est son successeur, Joseph Nau, qui se présente à la forge. Pierre Kirsch l’informe de la réussite de la mission qu’il leur avait confiée, à lui et à Paul Priest.

     « Les filles seront là dès mardi soir, et c’est Roger, que tu vois à bord de cette chariote, qui les conduira ! C'est la dernière invention de Robert Schmit, de Durandalem. Une chariote autonome, et qui en plus déblaie la neige ! »

     Joseph Nau est ébahi par cette machine, conduite en plus par un homme tout nu !

     « Nous pouvons construire les mêmes, lui dit Albert Feuer. Robert nous a enseigné jadis les mécanismes à vapeur, et il nous le permet bien volontiers !

     - Dans ce cas, ordonne le bourgmestre, mettez-vous au travail sur l’heure ! 

     - Allez, Roger, dit Norbert, viens donc boire un petit canon avec nous avant de repartir !

     - Oh oui, et même deux !  sourit Roger. »

     Il sort nu de la chariote, et s’habille rapidement de longues chausses fourrées et d’un long et épais manteau.

    Tout le monde s’installe dans la forge, autour de l’âtre. Norbert sort une gnole que fabrique Jean Claudel, réputée excellente !

     « Il faudra comparer avec celle du Fernand Bauer, de Durandalem. Elle aussi est excellente ! dit Roger, en buvant d’un trait un godet, puis un deuxième, avant de se mettre nu.

     - Bonne idée ! approuve Joseph. On pourrait organiser une rencontre pour goûter nos produits de nos terroirs, au prochain printemps...

     - Je dois rentrer avant la nuit, dit Roger. Mais j'ai encore le temps de dégager le chemin qui mène à la ferme de Jean Claudel, pour le remercier de cette excellente gnole...

     - Allez ! Un troisième pour la route, alors ! dit Norbert, en lui remplissant le godet à ras bord. »

Roger l'écluse aussi vite que les deux autres.

Il s’était mis nu dans la forge, il ressort ainsi, et rentre dans sa chariote après avoir remis du charbon et de l’eau pour le retour.

     Le voilà parti, salué de loin par Jean. En zigzaguant quelque peu, il dégage le chemin qui mène à la ferme, puis reprend la route pour Durandalem, en déneigeant l’autre rive du chemin.

     Quoique toujours zigzaguant, il parvient sans encombre au portail Ouest vers dix sept heures.

Ce sont maintenant Gretel Wilkinson et Georges Frisch qui assurent le tour de garde.

     « Qui va là ?  demande Gretel du haut de sa fenêtre entrouverte. 

     Roger sort de sa chariote, tout nu. Bien chargé par la gnole de Jean Claudel, tout titubant, il balbutie d'une voix pâteuse :

     - C’est…c’est moi !  Moi, Roger, de retour de… mission à Falk… Falken… heu…Falkenberg ! Oui...C’est ça... Falken…berg ! »

     Georges Frisch, une fois habillé, descend ouvrir. Il lui conseille de laisser là la chariote et d’aller se dégriser sous la douche !

     Alors Roger part nu, zigzaguant dans la nuit tombante vers les Thermes, manquant de glisser avec les pieds nus sur le sol gelé, sous le regard amusé de Jérémoy, sorti de la grande forge pour récupérer la chariote...

     J'ai appris la nouvelle. Je me dis que je dois le sermonner. Il aurait pu verser avec la chariote, et personne ne l’aurait su. Il aurait pu finir gelé dans le fossé...

     Dire que demain, il doit conduire les filles à l’abbaye, et les attendre pour les ramener ! J’espère qu’il saura mieux se tenir...

 

    Je me rends aux Thermes voir Jacou, afin de bien organiser le voyage de demain vers l'abbaye. Sont présents aussi Jérémoy et Dillon, ainsi que Roger, qui a déjà retrouvé tous ses esprits grâce au célèbre remède qui dessoûle instantanément.

     « Je suis vraiment désolé, je n'ai pas pu résister, j’ai bu à la suite trois godets de la gnole de Jean Claudel, et ça m’est monté à la tête !

     - Oui, Roger ! dis-je d’une voix sermonneuse. Tu as été imprudent ! Tu aurais pu avoir un accident, et tomber inconscient dans le fossé... Le temps qu’on s’inquiète, on t’aurait retrouvé raide mort, gelé ! 

    - Bon, dit Jacou. C'est du passé. Maintenant, parlons plutôt de demain !  Roger, donc, tu conduiras la grande chariote, à laquelle seront attelés la grande remorque et un chariot. Les filles prendront place à bord. Les cuisinières seront aussi de la partie : Marianne Tritz, Angèle Fergusson, et Pénélope Field, de l’ancienne école. Quant au service, il sera assuré par les jumelles Marlène et Hélène Basin.  Toi, Dillon, tu nommeras quatre gens d’arme pour t’accompagner ! Sous ton commandement, ils assureront la sécurité, que ce soit durant le voyage ou à l'abbaye. »

  Je me tourne vers Roger :

     « T’en sens-tu capable ? Penses-tu pouvoir nous les ramener saines et sauves ?

    - Oh oui, Robert ! Je te remercie de me garder ta confiance...Oui, je serai à la hauteur de ma mission ! 

Et me tournant vers mon gendre :

     - Jérémoy, tu prépareras les chariotes devant les Thermes pour le lever du jour.  Assure-toi qu’il y ait suffisamment de charbon pour faire le trajet dans les deux sens !  Cette nuit, il risque de neiger.  Alors, monte bien la lame sur la chariote, ça peut être utile. »

   L’Empereur, lui, annonce à Jacou son départ imminent pour Oche :

     « Nous partirons demain au lever du soleil, après les filles ! Ce soir, nous festoyons ensemble une dernière fois... Mais nous nous reverrons. Comme je vous l'ai promis, au printemps, vous et vos villageois serez invités aux festivités d’Oche, et conviés à l’inauguration de la Petite Chapelle. »

     Il est dix neuf heures. Les tables sont dressées, les cuisiniers et cuisinières sont à l’œuvre.  Dans les buanderies et aux vestiaires des douches, les préparatifs de vêtements pour les soldats et l’Empereur vont bon train.

     Les cuisines de l’ancienne école, des Garderies et de la Résidence sont prévenues. Il faudra suffisamment de denrées pour nourrir la troupe. Le voyage va durer deux jours.

     Dans les écuries des Thermes, Nestor Pferd et Norbert Burg sont venus prêter main forte aux palefreniers Hantz Burg, Vivien Stock et José Pferd. Tout le monde s’affaire à harnacher les quarante chevaux. Ils seront revêtus d’une chaude couverture, d’un plastron chaud protégeant leur poitrail, d’un couvre-chef abritant les oreilles, cousu par les doigts de fées des buandières de l’ancienne école Josette et Josiane, et seront munis de chausses fourrées à leurs sabots. Ainsi accoutrés, ils feront le voyage dans de bonnes conditions, sans craindre la froidure.

     Trois chariots sont préparés. Deux pour les victuailles, et un pour l’Empereur, qui voyagera assis à l’abri du froid et de la neige. Ce dernier chariot sera équipé d’un braisier, faisant régner une température agréable dans le chariot, au point de tomber les vêtements !

     Dans les cuisines, on prépare également le repas des filles pour demain. Un chariot sera chargé et attelé à la deuxième chariote, avec les vivres nécessaires pour nourrir et abreuver tout le monde.

     Il est l’heure de passer à table.  Après leurs séances de massages spéciaux, les filles sont toutes rayonnantes. Cela ne manque pas d'émoustiller quelques gardes qui aimeraient bien profiter de leurs faveurs avant de partir.  Les filles, pas farouches, veulent bien ce soir encore leur procurer du plaisir... mais seulement après le repas, leur précise Marie, la porte-parole de la troupe.

     Charlemagne, lui aussi, aimerait de la compagnie pour cette dernière nuit. Il sollicite donc Agnès Hune, la mignonne jeunette qui l'a accompagné à l’abbaye. Elle ne dit pas non...  « Ce sera un honneur de passer la nuit avec votre Majesté ! »

     Chacun et chacune mange, boit, se régale... Puis vient l’heure de se coucher. Les filles refont la tournée des dortoirs, prenant deux soldats d’un coup. Et ce sont de nouveaux cris joyeux de jouissance et d’orgasme qui résonnent dans les chambres.

     L’Empereur emmène Agnès dans sa suite. Il aimerait qu'elle lui prépare un bon bain. Elle remplit donc la baignoire. L’eau est agréablement chaude... Charlemagne s’y installe et lui demande de le nettoyer. Agnès saisit le gant de crin souple, et entreprend de savonner Charles. Mais pas avec n'importe quel savon. C'est un savon précieux que Child avait jadis rapporté des pays au-delà de la Grande bleue... Un savon au lait d’ânesse, qui, d’après la légende, était celui-là même de la reine Cléopâtre, la prestigieuse reine d’Égypte !

Le départ de l’Empereur

 

     La cloche de l’école sonne six heures. Il fait encore bien nuit, dehors. D'autant qu'un épais brouillard empêche de voir à dix pas.

     Nestor Pferd, Norbert Burg, Hantz Burg, Vivien Stock et José Pferd ont dormi sur place, dans les écuries chauffées des Thermes. Ils se lèvent pour finir de préparer toutes les montures qui doivent partir d’ici le lever du jour, dans un peu plus d’une heure.

     Jérémoy Mayer a lui aussi dormi sur son lieu de travail, à la grande forge. Il se lève pour préparer les chariotes à vapeur, entretenir les braises, charger le charbon et l’eau pour le voyage prévu à l’abbaye des Glandières.  Bientôt, la pression est suffisante pour les deux chariotes, la chaleur règne à l’intérieur, et Jérémoy les conduit devant les Thermes, prêtes à recevoir les filles.

     Hantz Burg a attelé un cheval au chariot et le mène devant l’office de la Résidence, où sont stockées les victuailles pour le repas. Il va les charger à bord, avec l’aide du concierge Adrien Molle et d'Albert Tritz, cuisinier de la Résidence.

     Il va atteler enfin le chariot derrière la deuxième chariote, et va chercher un autre chariot pour charger les vivres pour le voyage de la troupe de l’Empereur.

     Même opération depuis les cuisines des Thermes. Puis, ramenant le chariot afin d’y atteler deux chevaux, il remmène un deuxième chariot pour le reste des victuailles, qu’il fera aussi atteler par deux chevaux.

     Enfin le chariot de l’Empereur est prêt. Tout le confort est prévu à l’intérieur, le braisier est en fonction, il fait bien chaud dans le chariot qui ne sortira des écuries qu’avec Charlemagne et sa garde rapprochée à son bord.

     Dans les Thermes, les cuisines sont actives. Les boissons chaudes et les petits déjeuners sont posés sur les tables, Guillaume Bardot, le gérant de l’hôtel, fait le tour pour réveiller tout le monde. Certains gardes ont passé la nuit dans le lit des filles, et se dépêchent de se doucher avant de descendre prendre le petit déjeuner, servi au restaurant.

     Les filles apparaissent une à une.  Bientôt un brouhaha de filles et de soldats envahit le restaurant. Jacou, Chantal et Valérie distribuent à chaque soldat des besaces contenant des potions fortifiantes, et pour lutter contre le froid, et quelques pommades apaisantes en cas de gerçures.

     Les filles se préparent au rez-de-chaussée, endossant des manteaux et des chausses, qu’elles pourront retirer durant le voyage.

     Dillon arrive avec Jeanne Martinet, Alice, Aline et Pascal Spohr, les quatre gens d’arme qu'il a choisis. Tous sont emmitouflés dans d’épais manteaux aux manches courtes, afin de pouvoir se servir aisément de leurs armes, en particulier de leurs arcs.

      Le personnel arrive également : les cuisinières Marianne Tritz, Angèle Fergusson et Pénélope Field, et les serveuses Marlène et Hélène Basin. 

     Charlemagne tient à embrasser toutes les filles une par une avant leur départ, et même les filles gens d’armes ont droit à un baiser impérial. Les hommes sont gratifiés d’une poignée de mains, et Dillon tout particulièrement.

     Tout ce monde embarque dans les chariotes. Roger est arrivé, transi de froid. Il s’installe vite au chaud, aux commandes de sa machine.

     Les chariotes sont spacieuses, Et même à quinze par chariote, les occupants peuvent se déshabiller. La chaleur est rapidement montée.

     Et c’est le départ du convoi. Roger envoie la vapeur, les pistons s’agitent, et les roues commencent à tourner.

     Les gardes de nuit en faction à la porte est, Alexandre Dumas, Valérie Maigret et Elysa Lévy ont été prévenus. Dès que le jour s’est levé, ils ont ouvert en grand le portail. Il est 7 heures quand le convoi le franchit, sans ralentir. Il roule bien, et à cette allure, ils seront d’ici moins d’une heure à l’abbaye !

      Devant les Thermes, c’est l’effervescence.

     Les soldats vont aux écuries récupérer leurs montures. L'un des chariots de victuailles est attelé, et deux soldats le conduisent jusqu’à l’auberge. Child a fait préparer du vin et d’autres boissons, que Joël et Gaël chargent par lévitation dans le chariot.

     Le deuxième chariot de victuailles est prêt, et se dirige déjà vers le portail Est.

      Enfin, le chariot de l’Empereur est avancé. Deux de ses gardes sont devant, assis à conduire le chariot, et deux autres le suivent à cheval. 

     Charles prend place à l’intérieur, et se met à l’aise, nu, non sans avoir salué Jacou et toutes les personnes présentes, qui ont si bien œuvré pour son bien-être. Elles se sont montrées dignes de la légendaire hospitalité durandalémoise !

    Le portail est grand ouvert. Charlemagne s'en retourne dans son fief d’Oche. La troupe se met en route. Vingt cavaliers ouvrent la marche, suivis du chariot impérial, lui-même suivi de dix cavaliers et des deux chariots de victuailles. Dix autres cavaliers ferment la marche.

    Valérie Maigret et Elysa Lévy referment alors le portail et remontent dans le poste de garde pour se réchauffer. La relève de la garde de jour ne va plus tarder.

 

La visite des filles à l’abbaye

 

      Les gardes de réserve ce lundi, Paul et Georges Frisch, Paul Spohr, et Pierre Martinet ont fonction de police aujourd’hui, avec Christian Hahn, policier, et sous les ordres de Jean Martin, chef de police. Ils remplacent les gens d’arme partis à l’abbaye.

      Ils mangeront à l’auberge, deux à midi et deux à treize heures.

 

     Dans les chariotes en route vers l’abbaye des Glandières, l’ambiance est joyeuse. Les pionnières de la chariote se sont mises à l’aise. Dans cette deuxième chariote, où ont pris place les gens d’arme, cela émoustille quelque peu l'un des leurs, Pascal Spohr, et cela se voit ! Ses collègues rigolent de cette situation... Mais eux aussi commencent à arborer des signes ostentatoires!

 

 

     Dans la première chariote, personne n’a vu ce qui s’est tramé derrière.

     Et le seul homme est Roger, qu’il ne faut surtout pas distraire de sa mission : mener tout le monde à bon port !

     Le convoi arrive en vue de l’abbaye. Cette fois-ci, Pierre ordonne l’ouverture des portes, et le convoi pénètre directement dans la cour.

     Les filles se rhabillent. Une épaisse buée sur les vitres empêche de voir à l’intérieur.

     La porte de la deuxième chariote s’ouvre. Dillon en sort, suivi de ses gens d’arme, puis les filles sortent des chariotes. Pierre les introduit immédiatement dans la grande salle, où des braseros entourent la grande cheminée.

     La chaleur est intense.

     Puis il emmène les cuisinières et les serveuses à l’office, les moines déchargent le chariot.

     Dans la grande salle, on fait les présentations.

     « Bienvenue, mesdemoiselles ! dit Simon de Beauvoir. Merci d’avoir accepté notre invitation !  Mettez-vous à votre aise. Il fait bien chaud ici, nous y avons veillé... »

     Alors les filles tombent leurs manteaux, et se retrouvent nues, devant le regard surpris des abbés tout rougissants.

     « Je suis Simon de Beauvoir, l’archiprêtre dirigeant cette communauté. Et voici les abbés Jean Christian, Albert Hitch,  Alfred Hitch, Damien Kuhn,  et David Petit. Comme vous le constatez, nous ne sommes plus de la première jeunesse... Mais la vue de vos beaux minois, cela nous fait bien rajeunir dans nos têtes, si ce n’est dans nos verges ! »

     « Ne vous souciez pas de cela, intervient Dillon, qui s’est mis nu lui aussi. Jacou m’a donné une potion bien revigorante pour chacun d’entre vous. Tenez, buvez-en une bonne rasade, l’effet est rapide ! »

     Pierre hésite, et boit lui aussi une rasade, en se déshabillant...

 

     Une fois douchés, séchés et retapés, les abbés, les moines, les gardes et les filles, toutes et tous nus, passent au réfectoire, où il fait tout aussi chaud.

 

     Les gens d’arme Jeanne Martinet, Alice Spohr, Aline Spohr et Pascal Spohr, ont fait des rondes dans l’abbaye, et se retrouvent au réfectoire et se déshabillent prestement il fait trop chaud pour rester habillé !

     Marianne Tritz, Angèle Fergusson, et Pénélope Field, les cuisinières, et Marlène et Hélène Basin les serveuses, aidées par Roger ont préparé les tables, nues, et les quarante protagonistes de ce matin se retrouvent à table.

     Pendant ce temps, les douze moines restant de la communauté nettoient la grande salle, changent les peaux, et rechargent les braseros, ils savent qu’après le repas, ce sera leur tour de profiter de l’endroit et de ses occupantes ! 

     Après le repas, copieux et bien arrosé, les moines se retirent dans leurs cellules pour méditer, les abbés vont prier, et les gardes vont relever leurs collègues.

     Les filles, remises en forme par une autre potion de Chantal, sont prêtes à recommencer !

     Elles se rendent dans la grande salle, Roger aussi veut en être !

     Les douze moines sont là, des bosses plus ou moins visibles se devinent sous leurs soutanes.

     Dillon leur distribue une rasade de potion, et bientôt, les soutanes se soulèvent et les moines se retrouvent nus ! Roger aussi prend une rasade.

     Les gardes relevés, transis par le froid ont besoin de se réchauffer, ils se déshabillent devant l’âtre brûlant, et une fois la rasade bue, se sentent mieux !

     Dans le réfectoire, les cuisinières et les serveuses débarrassent les tables, et préparent le deuxième service, pour ceux de l’après-midi, qui vont être affamés !

     Les gens d’arme sont retournés à leurs rondes. Ils entendent les ronflements des « méditations » dans les cellules des moines et des abbés.

     Grâce à l'une des potions de Jacou, ils ne ressentent pas le froid, et vont donc sur les remparts remplacer quelque temps les gardes de l’abbaye, afin qu’ils puissent se réchauffer et se restaurer un peu, avant de revenir.

     Ceux-ci les remercient vivement. Décidément, Durandalem est un bien sympathique village !

     Il est déjà seize heures quand les gardes et les moines, vidés par les filles, prennent une douche et vont s’attabler.

     Les gardes au repos retournent à leurs postes, libérant les gens d’arme. Les filles prennent une douche et un remède reconstituant pour se retaper.

     Tant bien que mal, Roger, après avoir pris sa douche et bu la potion qui retape, s’affaire à ses chariotes pour préparer le retour.  Dans une heure il fera déjà presque nuit !

     Dillon lui aussi est bien fatigué. Il faut dire que, tout comme les filles, il a participé aux deux sessions !

     L’archiprêtre des Glandières et tous les abbés remercient grandement les filles pour cette journée ô combien mémorable !

     Dans le réfectoire, les moines de retour de leurs méditations prennent le relais, libérant les cuisinières et les serveuses.

     Les denrées non consommées, ainsi que le vin, restent à l’abbaye. Ce qui ravit les moines, qui ont vraiment apprécié ce nectar !

    Roger est de retour. « Nous pouvons monter dans les chariotes, n’oubliez pas vos manteaux et vos chausses ! »

     Et les filles, les cuisinières, les serveuses, et les gens d’arme s’engouffrent dans les véhicules, Roger s’installe aux commandes, et Dillon monte le dernier, dans la deuxième chariote.

     Le chariot vide est accroché derrière, et le convoi s’élance. Les abbés, les gardes et quelques moines saluent leur départ, puis Pierre fait fermer les portes.

 

    Le trajet se déroule sans encombre, et bientôt, vers dix sept heures, le convoi se présente devant le portail Est.

     Gretel Wilkinson et Pierre Spohr, les voyant arriver de loin, du haut de leur salle de garde, se rhabillent et descendent tous les deux ouvrir les deux battants. Ils saluent le convoi à son passage, et referment le portail pour se remettre vite nus et au chaud.

     Le convoi arrive devant les Thermes. Jacou l'accueille devant la porte, avec les vigiles Michel Hoste et Amandine Bardot.

     « Bienvenue, les filles ! »

     « Mission accomplie, Maître ! dit Roger sortant de la chariote.

     - Bravo Roger, bravo à vous toutes et à vous tous ! Allez prendre du repos, vous en avez besoin... Rien qu'à voir ta mine, Dillon, sourit-il, je sais que vous vous êtes donnés à fond ! »  

     Les membres du personnel des Thermes regagnent leurs quartiers respectifs.

     Dans la journée se déroule une grande opération de nettoyage. Toutes les chambres de l’hôtel et la suite impériale sont passées au peigne fin, toutes les draperies et couvertures sont changées, et le linge de toilette est renouvelé.

     Les buandières Madeleine, Thérèse, Lydie et Alice Stone, Joséphine Basin, Léa Fart et Angèle Hune ont travaillé toute la journée pour nettoyer les linges. Les tambours des lave-linge tournent à fond depuis le matin. Les draps sont suspendus sur les fils installés dans les couloirs.

    Seule Agnès Hune, qui a passé la nuit avec l’Empereur, a eu droit à la matinée de repos.  Maintenant, elle se joint à ses collègues pour terminer le travail.

      Eugène, Léon et Bérengère Starck, Juliette et Émilie Stone, Francine, Françoise et Louis Hoste, Hélène et Marlène Basin, Claude, Brigitte et Martine Bardot, Nina et Paulette Stock, Étienne et Zoé Lombard, Mia Fart... Eh oui, pas moins de dix-huit personnes qui s’activent pour nettoyer de fond en comble tout le bâtiment des Thermes. Cela fait une belle équipe !

     Lavage à grande eau du sauna, du hammam, du bain de kaolin, de la piscine et ses abords, du coin des boissons.  Nettoyage des fenêtres, des sols et des murs des douches, des tables et bancs du restaurant, des chambres, des dortoirs et des suites de l’hôtel… En fin de journée, la fatigue est générale, mais les Thermes ont retrouvé l’aspect du neuf !

     Tout le monde est invité à trinquer à la fin de ce grand ménage, et aussi, bien sûr, à la longue vie de l’Empereur. Certains, les plus fatigués, disent qu'il ne faudrait quand même pas qu’il revienne trop souvent ! Ce qui déclenche l’hilarité générale.

     Les filles peuvent regagner leurs chambres, qui sont comme neuves, et qui embaument ! Les herboristes Chantal et Valérie ont pris soin de les parfumer avec un assortiment de plantes odorantes, qui apaisent l’esprit et le corps.  Elles leur ont laissé aussi des onguents et autres pommades calmantes pour leurs parties intimes, encore une fois fort sollicitées aujourd'hui. Ces demoiselles sont ravies !

    Le soir venu, elles se retrouvent enfin seules à table, si l'on excepte les cinq gardes qui les ont emmenées à Durandalem.

     Une fois le repas terminé, Jacou prend la parole :

     « Mesdemoiselles, je dois maintenant vous annoncer une bien triste nouvelle... Votre mentor, Madame Claude, s’est éteinte ce samedi, dans son lit, en présence de l’abbé Jacques Kirsch, qui lui a prodigué les derniers sacrements de l’Église.  Ses obsèques seront célébrées mercredi prochain, en l’église de Falkenberg.  

     Sur son lit de mort, elle a émis le souhait que toutes ses filles soient présentes lors des funérailles. Nous avons donc déjà organisé votre voyage. Vous le ferez à bord des chariotes qui vous ont menées à l’abbaye. Ainsi, vous ne souffrirez pas du froid. Vous partirez demain mardi, dans l’après-midi, pour arriver à Falkenberg avant la nuit. 

     Le bourgmestre de Falkenberg, Joseph Nau est prévenu. Il vous accueillera à votre arrivée. 

     Vos aînées Ulla Fonte, Fifi Adour, Pam Suzon et Prune Fruscht, les filles de joie qui jadis se sont établies à Durandalem, et qui étaient aussi des filles de Madame Claude, feront le voyage avec vous et assisteront aux obsèques. 

     Je serai moi aussi du voyage, ainsi que les gardes qui vous ont accompagnés pour venir. Et c'est Robert Schmit, notre Maître Forgeron de l'Empire, inventeur de la chariote, qui nous conduira aux commandes de sa machine. 

     Soyez certaines que nous compatissons à votre deuil.  Nous connaissions tous Madame Claude, qui nous avait fait l’honneur d’assister à l’inauguration de ce bâtiment, il y a plus de trente ans de cela ! 

     Nous regrettons aussi votre départ. Vous êtes charmantes, et vous avez fait souffler sur ce village et sur l’abbaye des Glandières un vent de jeunesse bienfaitrice ! Soyez-en remerciées. Toutes les habitantes et tous les habitants garderont un souvenir jovial de votre passage, et vous serez toujours les bienvenues à Durandalem.

    Évidemment, vous serez bien rémunérées, à hauteur de vos prestations.  Pour les cinq jours de votre présence, vous aurez donc chacune cent deniers. Nous vous offrons en sus un pactole de dix livres-or qui vous permettra de restaurer la maison de Madame Claude, et de vous organiser en société de bien-être.

     Vous, les cinq gardes, vous serez également rémunérés pour votre présence, si rassurante pour les filles ! Vous aurez un sou par jour. 

     Jusqu’au moment du départ, demain après-midi, vous êtes libres d'agir à votre guise, nul ne vous sollicitera pour un rapport sexuel ! 

     Si quelqu'un ou quelqu'une d’entre vous a besoin d’une assistance médicale, Marie Brett et moi-même sommes à votre écoute. N’hésitez pas à nous solliciter ! 

     Voilà. Tout est dit. Bonne soirée à toutes et à tous ! »

     La clameur « Merci Maître Jacou ! » s’élève de l’assistance.

     Puis les filles regagnent leurs chambres, tandis que les gardes s’attardent un peu au coin des boissons avec Joseph Wirth, Joëlle Lutz et Josie Bern.

     La ruche ne bourdonne plus. L’effervescence de ces derniers jours dans l’établissement fait place au silence. Les concierges font leur ronde de nuit quotidienne, éteignant les luminaires encore éclairés. Et le village tout entier s'endort.

Le voyage à Falkenberg

 

     Les gardes de réserve aujourd’hui sont Georges Frisch, Pierre et Johan Martinet, Alexa Dumas, et Christian Hahn. Ils seront sollicités pour des rangements, à l’auberge et aux Thermes, et vont donner un coup de main pour l’installation des systèmes à vapeur d’ouverture des portails.

   En effet, après suggestion des gardes, mon gendre Jérémoy Mayer, le forgeron attitré du village, a mis au point un système ingénieux. Des vérins, commandés par la vapeur, ouvrent et ferment les portails à distance depuis les salles de garde situées au-dessus.

     L’installation va bon train. Tous sont chaudement vêtus : pour l’instant, la salle de garde est en plein courant d’air, et il y fait très froid ! Jérémoy Mayer travaille au portail Est, avec Georges Frisch et Pierre Martinet. Nathan et Léo Mayer travaillent au portail Ouest, avec Johan Martinet.

     Alexa Dumas fait la navette entre l’auberge et les portails pour ravitailler les travailleurs en boissons chaudes.

     Les vérins sont vissés sur les battants des portails. Il en faut quatre par portail : deux qui ouvrent, et deux qui ferment.

     Puis une manette de contrôle est installée dans la salle de garde, à côté des fenêtres. Elle est manœuvrée à gauche pour ouvrir, à droite pour fermer.

     Deux générateurs de vapeur sont installés ensuite, alimentés en eau depuis la Garderie pour le portail Est, et depuis la grande forge pour le portail Ouest.

     Les tuyaux sont posés, puis réchauffés par deux autres générateurs, situés aux sorties d’eau des bâtiments afin d’éviter le gel.

     Une fois les raccords établis des deux côtés, la mise sous pression est effectuée, et les premiers essais ont lieu un peu avant midi.

     Jérémoy prévient Marion et Julie Wasch, les aubergistes, afin qu’elles préparent une table pour sept. Ils seront là d’ici peu.

     Ils arrivent un peu avant midi. Gretel Wilkinson et Paul Spohr, qui s’apprêtent à relever Albert Fart et Christina Hahn à la porte Ouest, ont hâte de savoir si cela fonctionne. Ce matin, il faisait bien froid dans la salle de garde à l’Est !

    « Cela ne fonctionne pas encore, leur répond Jérémoy, mais les salles de garde sont à nouveau chauffées, et même plus qu'avant, du fait de la présence des générateurs de vapeur. Après le repas, nous terminerons cela, et tout fonctionnera pour le départ des filles ! »

     Les gardes s’envolent vers leurs postes respectifs, Gretel Wilkinson et Paul Spohr vers le portail Ouest, et Bernard Spohr, Georgette Fart et André Martinet vers la muraille Sud.

     Peu de temps après, de la porte Ouest arrivent Albert Fart et Christina Hahn, et de la muraille Sud Joseph Spohr, Roland Martinet et Hankel Thiel.

     « Maintenant, dit Christina à Léo Mayer, il fait à nouveau chaud dans la salle de garde !

    - Oui, répond Léo, et dès cet après-midi, vous n’aurez plus à vous habiller pour aller ouvrir les portails ! ».

     Deux tables sont mises, pour les forgerons et leurs aides, et pour les gardes en pause.

    C'est ma fille Ariston qui fait le service.  

     « Quand vous aurez fini, dit-elle à ses fils Léo et Nathan, vous irez aider votre grand-père à préparer les chariotes pour Falkenberg. C’est lui qui conduit...

     - Pas de souci, répond Nathan, nous arrivons au bout.  En moins d’une heure, ce sera opérationnel ! La chariote est devant la grande forge. »

     Après le repas, les deux équipes retournent à leurs chantiers, et à quinze heures, comme prévu, le système fonctionne !

     Gretel Wilkinson et Paul Spohr sont ravis ! Ils peuvent rester nus. Et c'est vrai qu’il fait encore plus chaud. Au point qu'il faut même entrouvrir la fenêtre de temps en temps !

     Les forgerons quittent le chantier.

« Vous inaugurerez le système pour la sortie de Robert et de notre bourgmestre ! dit Léo à Gretel. 

     - Ce sera un honneur pour nous ! »  répond-elle.

     Aux Thermes, les préparatifs sont en cours. Derrière les chariotes, on accroche les charrettes et le traîneau. Les filles prennent place, y compris les filles de joie, ainsi que les cinq gardes. Jacou s’installe à côté de moi. Chacune et chacun se déshabille. La chaleur ambiante est trop élevée pour rester vêtu.

     Emmanuel Frisch, le maire adjoint, assiste au départ :

     « N’aie crainte, Jacou, le village est entre de bonnes mains !

     - Nous veillons au grain ! confirme Gabriel Holz.

     - Je n’en doute pas, dit Jacou. Nous rentrons demain, en fin de journée. Si possible avant la nuit !

  - Bonne route à vous ! »

     Et le départ est donné.

     Il n’est pas seize heures. La machine s’élance. Le portail Ouest s’ouvre comme par magie. Jacou et moi-même apprécions l’innovation !

     Gretel et Paul nous saluent depuis la salle de garde, puis actionnent le levier de fermeture, et le portail se referme tout seul !

     La relève arrive. Jacques Martin et Stéphane Spohr se font expliquer le maniement simple d’ouverture et de fermeture.

    Nous arrivons à Falkenberg, après un voyage sans problème, Samedi, Roger avait bien dégagé la route avec la chariote.  Les nôtres s’arrêtent devant l’hôtel Pax. Tout le monde revêt ses chausses fourrées et son manteau, sort des chariotes, et pénètre dans l’hôtel.

 

 

Après les décès de Joseph et Adrienne Pax, les fondateurs de l’hôtel, l'établissement a été racheté par Bernard Palis, le marchand, qui l’a géré jusqu’en 775. Puis il l’a donné à son fils, Raymond, trente cinq ans.  qui le gère encore avec son épouse Pauline, trente sept ans, fille de l’aubergiste Guy d’Écart et jumelle de Paulette.  Ils ont trois enfants :  Damien, seize ans, Élise, quatorze ans, et Aurélie, treize ans.

     L’hôtel comprend quarante chambres, soit vingt par étage. Avec bien sûr tout le confort apporté par les forgerons de Falkenberg : dans chaque chambre, une douche, un lavabo  et un coin d’aisance.

      Raymond Palis accueille les visiteurs sur le perron.

     « Bienvenue messieurs, et bienvenue les filles !  Entrez, entrez vite vous mettre au chaud, il y a un bon feu dans la grande salle !

    - Je suis Jacou Artz, le bourgmestre de Durandalem... Et voici Robert Schmit, l’inventeur de ces chariotes à vapeur. 

     - Bienvenue, Maître Artz et Maître Schmit ! Vos réputations vous précèdent...  Moi, je suis Raymond Palis, co-gérant de cet hôtel avec mon épouse Pauline. J’ai fait mander notre bourgmestre, Joseph Nau. Il ne saurait tarder... Quant à vous, Mesdemoiselles, mes sincères condoléances ! Mon épouse Pauline va vous conduire au deuxième étage, toutes les chambres vous sont réservées ! Et les filles d’étage, Josy et Pauly Ferry, sont à votre disposition pour tout ce dont vous auriez besoin. N’hésitez pas à les solliciter...

  -  Merci bien, Raymond, dit Marie, nous y allons de ce pas ! 

Et les filles montent à l’étage, avec leurs baluchons de cadeaux et de paie. Ce qui fait un bon poids !

   - Et vous, les gardes, conclut Raymond, vous pouvez entrer également. Des chambres sont réservées pour vous et pour nos hôtes au premier étage. Vous rejoindrez demain vos quartiers à la caserne. »

     Comme annoncé, voici Joseph Nau le bourgmestre. Il est accompagné par les frères Albert et Norbert Feuer, les forgerons de Falkenberg. Et tout le monde se rend dans la grande salle, bien au chaud.

     « Bien le bonsoir à vous, Maître Jacou, dit Joseph. C’est un honneur que de vous recevoir en notre cité !

     - Salut Joseph ! répond Jacou. Merci beaucoup pour votre accueil !

     - Et salut à toi, Robert, notre Maître Forgeron à tous !  intervient Albert Feuer.

     - Salut à vous, les frères ! dis-je. Bien content de vous voir ! »

     Nul n’a oublié que ce sont les frères Feuer qui ont installé des douches dans plusieurs établissement du bourg, notamment à la maison de Madame Claude et à l’hôtel Pax. Et cela, grâce à la formation que je leur ai donnée lors d’un stage à Durandalem, voici trente ans...

     « Nous avons déjà vu ta fameuse chariote quand Roger est venu nous voir l’autre jour ! Au fait, il est bien rentré ? demande Norbert.

     - Oui-da ! Mais avec une bonne charge alcoolique !  dis-je avec un petit ton de reproche.

     - Certes, mais nous étions tellement enthousiastes en voyant ta machine à l'œuvre ! Roger lui a fait dégager toute la neige de la place et des rues de Falkenberg... Et puis c’est vrai, la gnole de Jean Claudel nous a tous un peu surpris !

     - Allons, ne parlons plus de cela... Roger lui-même nous a déjà présenté des excuses ! dis-je, avec le sourire cette fois.

    - Cette double chariote est fantastique ! dit Albert.

     - C’est une construction de Jérémoy Mayer. Vous le connaissez. Il est devenu mon gendre, et le forgeron attitré de Durandalem.

     -  Bien heureux de l’apprendre. C'est vrai que Jérémoy était un bon élève ! »

     Jacou demande à Raymond Palis s’il peut nous héberger cette nuit. Raymond confirme aussitôt.

     « Vous êtes mes invités. Ce soir vous dînez avec nous !  Pour l’instant, installons-nous ici bien au chaud. Voici des vêtements légers pour couvrir votre corps, enlevez donc ces lourds manteaux ! »

     Nous nous déshabillons tous et nous enfilons les tuniques légères.

     « Vous avez eu la visite de l’Empereur ! Comment est-il ? demande Joseph Nau.

     - Bel homme ! dit Jacou. Une grande barbe blanche, et un corps d’athlète. Il y a plus de trente ans de cela, c'est Robert qui lui avait fabriqué l’épée magique Durandal, et il était venu la chercher à Durandalem ! Quels beaux souvenirs...

      Les bavardages durent un temps. Nina, la serveuse du bar de l’hôtel, passe parmi nous pour nous proposer diverses boissons. 

 

 

     À l’auberge de Durandalem, comme de coutume, les anciens ont bravé le froid pour venir écluser quelques pintes chez Child. Eh oui, tout en sachant bien qu’ils sont maintenant chez Marion et Julie, ils disent encore « chez Child » ... La force de l'habitude !

     Il y a là le Fernand Bauer, P’tit Louis et Bertha Muller. Apollinaire le barde est venu, ainsi qu'Yvette Welch, la veuve de Michel Wald, qui est accompagnée de Mikael Thiel et d'Amandine Bardot. Émile et Adèle Pferd sont là également.

      Pierrot et Gisèle, et Claude et Marie Stein, Clovis et Clothilde Hune, George et Line Hair, Claude et Rosine Kaas, Denis et Béatrice Pépin, Raoul et Raymonde Frisch, tous arrivent eux aussi boire un verre. Décidément, tout Durandalem s’est donné le mot pour venir parler de la venue de Charlemagne, des filles de Falkenberg... et aussi de l'aménagement des portails !

     Les gardes de réserve qui ont aidé les forgerons racontent comment fonctionne le système. Jérémoy arrive avec ses fils Nathan et Léo, et ils s’installent à table.

     « Bravo, Jérémoy et fils, pour vos portails, dit Raoul Frisch, c’est un grand progrès ! »

     Les gardes en pause, Bernard Spohr, Georgette Fart et André Martinet ainsi que Gretel Wilkinson et Paul Spohr, se préparent pour leur dernière garde de la journée. Ils vont remplacer Joseph Spohr, Roland Martinet et Hankel Thiel au rempart Nord, et Albert Fart et Christina Hahn au portail Est.

     Peu de temps après, les gardes relevés arrivent à l’auberge.

     Gabriel Holz est là aussi.

     « Whouah ! il y a du monde ce soir ! dit Hankel Thiel.  Et ils s’installent au comptoir, Esther sert un pichet de vin au garçon, et une tisane à Christiane, qui adore ça.

   Tout en dégustant sa tisane, elle interpelle :

     - Ce portail autonome est vraiment un bienfait pour les gardes ! Dans les salles de garde, il fait vraiment chaud.  La nudité est de mise, là-haut ! Il y fait même si chaud qu’une douche rafraîchissante ne serait pas de trop. Tu comptes nous installer ça, Jérémoy ?

   - Je prends bonne note, et je vais étudier la chose !  répond mon gendre en souriant. Mais n’oubliez pas que là-haut, vous êtes de garde, et non pas de repos...Trop de confort ne risque-t-il point de vous endormir ?

 - Que nenni... Bien rafraîchis sans avoir froid... Voilà qui sera idéal pour aiguiser notre vigilance !

- Tu as raison, Christiane, redis-leur encore ! ajoute Hankel, sous les rires de tous.

- Bon, bon, c’est d’accord...Vous les aurez, vos douches ! promet Jérémoy. Si le bourgmestre est d’accord, bien sûr...

     Emanuel Frisch, arrivé entre temps, prend alors la parole :

     - En tant que bourgmestre adjoint, je prends la décision, en l’absence du bourgmestre, d’autoriser l’installation d’une douche dans les salles de gardes Est et Ouest.  Et je déclare que Jérémoy Mayer, ici présent, sera chargé de l’exécution des travaux ! »

Tout le monde applaudit.

 « Quel beau discours, dit Jérémoy, bravo ! Quand Jacou arrêtera, tu feras à coup sûr un excellent bourgmestre !

     - Oh, merci Emanuel ! » dit Christiane.

Et elle se précipite pour l’embrasser sur la bouche, ce qui le fait rougir.

 

 

À l’hôtel Pax, il est l’heure de passer à table. Les invités sont en bout de table. Les gérants Raymond et Pauline, de chaque côté, président le repas. Les filles sont assises autour de la table, en tuniques légères comme il se doit. Il y a aussi le bourgmestre et son épouse, ainsi que les forgerons et leurs épouses.

     Le bourgmestre Joseph Nau a épousé Marie Ferry, la sœur de Jules Ferry l’ébéniste.

     Leur fils Michel, a repris la menuiserie familiale avec son épouse Georgette, la fille du meunier Lemaire. Ils ont deux filles, Amélie, vingt ans, et Arielle, dix neuf ans.

     Albert Feuer a épousé Anne d’Auteuil, fille de Jacques d’Auteuil, comte de Thicourt. Ils ont un fils, Bernard.

     Alfred Feuer a épousé Bernadette Stups, fille de Bruno Stups, le maraîcher de Falkenberg. Ils ont une fille, Blandine.

     Bernard Feuer a épousé sa cousine Blandine Feuer. Bernard est coutelier et rémouleur, Blandine tient une boutique de couteaux en tous genres.

     Il n’y a pas de clients à l’hôtel, la saison n’est pas propice aux voyages…

     Le repas est excellent. Le cuisinier, Paul Beaucus, est venu en personne présenter les mets qu’il a élaborés avec l’aide de son épouse Paulette, sœur jumelle de Pauline d’Écart, et de Pierre, leur fils de dix neuf ans, commis de cuisine.

    À l’office, la table est dressée pour le personnel de l'hôtel, qui compte quatorze employés.

     Josy Ferry et sa sœur Poly, les filles de Jules Ferry, l’ébéniste, sont les femmes de service et de ménage.

     Albert Tram, le compagnon de Josy, est le technicien, c’est lui qui s’occupe des chaudières et de l’entretien de l’hôtel. Ils ont un fils, Jean, treize ans.

     Bernard Claudel, le compagnon de Poly Ferry, fils de Jean Claudel le fermier, est jardinier et homme à tout faire. Il a une serre chauffée derrière l’hôtel, où il cultive toutes sortes de légumes pour la table de l’établissement. Ils ont une fille, Josette, dix ans.

     Nina Metzger, qui sert au bar de l’hôtel, est la fille de Georges Metzger, le boucher de Falkenberg. Elle est la compagne de Frank Einstein, le palefrenier qui s’occupe des écuries de l’hôtel avec leur fils Albert. Ils ont aussi deux filles jumelles, Anaïs et Alice, qui aident aux tâches de l’hôtel, de la serre, du service en salle.

     Marie-Ange Gabriel est la buandière de l’établissement et la compagne d’Albert l’aide palefrenier. Elle a profité du progrès apporté par les forgerons Albert et Norbert Feuer, qui lui ont installé une machine à laver, selon mes directives.

     L’hôtel bénéficie de tout le confort pour accueillir les voyageurs, il dispose même d'un sauna !

     Je m’y rends avec Jacou après le repas. Nous sommes vite rejoints par Anaïs et Alice, tout empressées, qui comptent bien nous faire profiter du sauna, mais avec elles ! Fort avenante compagnie, ma foi...

     Après nous être séchés, nous enfilons nos tuniques et nous retrouvons les autres convives au coin des boissons, en pleine discussion sur les chariotes, qui décidément les épatent...

« Ce n’était donc pas une légende ! »  disent tout épanouies Anaïs et Alice en prenant congé.  Cela fait sourire Marie, la responsable des filles, qui s’est attardée au bar. Je n’ai compris cette histoire de légende qu'après les explications de Marie !

Avant qu'Anaïs et Alice nous rejoignent au sauna, les filles leur avaient raconté les incroyables prouesses sexuelles des garçons de Durandalem... Alors, les deux curieuses avaient voulu vérifier avec nous si c'était juste une légende ! Eh non, ce n'en était pas une...

     Enfin, nous allons nous coucher. Les chambres sont agréables, chauffées, et je passe une bonne nuit réparatrice.

 

  • À Durandalem

 

     Dans l’auberge, Christian Hahn et Guenièvre Spohr viennent fêter la nomination de Guenièvre qui rejoint le corps des gardes aujourd’hui. Ils sont là avec leurs enfants, Piotr et Georgette.

     On se raconte les prouesses avec les filles.  Christian raconte comment les gens d’arme ont rencontré les filles, et Piotr raconte tout excité comment Mademoiselle Nina lui a appris les choses de la vie.

    Tout le monde s’accorde à dire que la venue de l’Empereur a donné un sacré coup de fouet à la sexualité dans le village !  Mais toutes et tous acceptent que ce soit fini, et que cela ne se fasse plus en public, comme c’était le cas à l’auberge.

     « Aaaaaaah ! Pourtant, c’était quand même bien ! soupire Child, assis derrière le comptoir. »  Et toute l’assistance rigole de bon cœur.

     Apollinaire prend alors sa lyre et entonne une chanson de son cru :

      « Elles sont bien venues 

     Oui, venues toutes nues

     Leur beau corps pas vêtu

     Pas même de vertu !

 

     Paulette quel émoi

     À genoux devant moi

     Me gobe goulûment

     Ah que c'est bon, maman !

  

     Dans sa bouche ça jaillit

     De joie je crie merci

     Oh merci ma Paulette

     Oh merci ma poulette

     Oh oui, oh oui, oh ouiiii ! »

 

      Tout le monde applaudit, et rigole bien de cette improvisation suggestive. On s'en souviendra longtemps, des filles de Falkenberg !

     Après quelques pintes, les idées fusent :

     « Il faudrait la chariote de Robert pour ramener les clients de l’auberge ! suggère P’tit louis.

     - Bonne idée ! renchérit le Fernand. Surtout pour nous, les vieux !

     - Et aussi pour les bourrés ! ajoute Jérémoy. Il faudrait créer pour ça un poste de "rameneur"... Et aussi construire une chariote ou l’on pourrait se coucher si on ne tient plus assis...Gabriel, que penses-tu de la création d’un poste de rameneur ?

      - Oui-da ! Je suis volontaire ! répond le garde champêtre en rigolant. Je devrai donc établir mon quartier général ici, à l’auberge. Ce qui n’est pas pour me déplaire, ma foi ! »

     Et tout le monde s’esclaffe.

     « On pourrait aussi avoir une chariote ouverte, pour l’été ! dit Mikael Thiel. »

      « Et on pourrait organiser des parties dans les bains-douches communaux !  suggère Joël. Je n’ai plus guère de visites depuis que les Thermes existent. Et encore moins en hiver ! »

     Et de pintes en idées, et de discussions en tournées, la soirée s'avance, et l’auberge se vide peu à peu.

     « Voilà qu'il se remet à neiger ! annonce P’tit louis qui s’apprête à rentrer. Soyez prudents, le sol sous la neige est gelé, ça glisse ! »

     Après un moment, il ne reste plus que Child, Marion et Julie. Esther est rentrée, Ariston et Jérémoy aussi. Aline est sur le point de partir. Marion sert un dernier souper, puis va se coucher.

     Seul Child reste encore un peu. Il rêve aux filles de Falkenberg...

     Et il se demande même s’il ne va pas faire un tour par là-bas, un de ces matins !  Mais pour l'instant, il va aller au dodo...

     Les Thermes n'ont pas été aussi calmes depuis longtemps. Tout le personnel a dîné, et tout le monde a regagné ses appartements, aux Thermes et à la Résidence.

     Il est encore tôt quand les concierges font leur tournée. Les techniciens des chaudières ont déjà fait le nécessaire.

     Le village s’endort sous la neige. Une neige qui continue à tomber, et qui s’amoncelle de plus en plus, sans un bruit...

Les Obsèques de Madame Claude

 

     Il y a foule ce matin devant l’église de Falkenberg !

     Plus de trois pieds de neige sont déjà tombés, et il continue à neiger...

     J’ai décroché la deuxième chariote. Et avec la première, qui est munie de sa lame, j'ai lancé le générateur de vapeur, et j'ai dégagé la place et les chemins qui mènent à l’église. Les frères Feuer m’accompagnent dans la chariote. Ils se rendent compte qu’il y fait vraiment chaud !

     Nous faisons le tour du bourg, dégageant les rues et les voies d’accès.  Ils en profitent pour me questionner sur la réalisation de mon véhicule.

     Puis je range la chariote à l’abri dans les écuries de l’hôtel, où se trouve déjà la deuxième. Les frères Feuer et moi, nous nous habillons chaudement pour rejoindre Jacou dans l’église.

     Jacques Kirsch, l’abbé de Falkenberg, malgré ses quatre-vingt ans, est toujours officiant de l’église. Pascal Glock, âgé de soixante ans, sonne toujours les cloches et s’occupe des cierges et du chauffage. Ce matin, il a allumé les quatre grands âtres dans les coins de l’église. Il n’y fait pas encore chaud, mais cela devient supportable. À condition de rester habillé, bien sûr !

     De toute façon, les gens de Falkenberg ne sont pas encore prêts à vivre nus comme ceux de Durandalem. La maison des filles est le seul endroit où ils s’adonnent à la nudité ! 

     Pascal ouvre les portes, et l’église se remplit rapidement. Chacun a apporté une bûche afin d’entretenir les âtres, qui flambent de leurs plus belles flammes et réchauffent peu à peu l’air ambiant.

     L’abbé dit la messe en mémoire de Madame Claude, qui était une figure notoire de la cité. Tous les habitants ont déjà fait un petit tour dans sa Maison des filles, ou du moins ont invité quelques filles lors de fêtes privées. La renommée de Madame Claude a voyagé jusqu'au-delà de Mettis, la grande ville à l’Ouest.

     Après la messe, pendant le sermon du curé, Pascal passe parmi les ouailles et fait la quête, afin de pouvoir acheter un surplus de bois de chauffage pour l’église. Le stock est déjà épuisé, alors que l’hiver est encore bien là !

     Ensuite, un apéritif du souvenir est organisé à l’hôtel Pax, dans la grande salle de restaurant.  Bon nombre de Falkenbergeois s’y rendent, histoire de se réchauffer et de boire à la mémoire de Madame Claude.

     Son corps est enseveli dans la glace. Il sera enterré au printemps, dès que la glace fondra.

    À l’hôtel, on discute de l’avenir de la Maison des filles.

     Avec l’approbation du bourgmestre, les filles désignent Marie comme remplaçante de Madame Claude. Voilà donc Marie à la tête d’une brigade de dix-huit filles.

     Elle prend la parole :

     « Nous allons faire quelques travaux pour améliorer notre Maison des filles. Nous allons rajouter un étage pour que chacune soit confortablement logée.  Chacune œuvrera donc dans son appartement, et non plus dans les cabines comme avant. Pour financer les travaux, nous disposons d'un confortable pactole, généreusement octroyé par le bourgmestre de Durandalem, pour services rendus à l’Empereur. 

    Les filles sont heureuses de voir leur situation s’améliorer de la sorte.

    - Vive Madame Marie !  clame l’assistance.

     - Je lève mon verre à l’avenir de Falkenberg, et à la future nouvelle Maison des filles. dit alors le bourgmestre. Nous la rebaptiserons « le Petit Paradis ! »

     Et chacun lève son verre. Des cris fusent des quatre coins de la salle.

    « Vive le Petit Paradis ! », « Vive Madame Marie ! », « Vive Durandalem ! », « Vive Jacou ! », « Vive le bourgmestre ! »

     Le vin et les alcools coulent à flots. Chacun se rassasie de ces breuvages. Mais il va falloir quitter l’hôtel pour rentrer au bercail, sous la neige qui tombe toujours, et qui s'est encore épaissie d'un pied... Les forgerons retournent à leur forge pour terminer leur machine à déblayer la neige, il y a urgence ! Ils travaillent d'arrache-pied.

     Plus tard, une table est dressée pour les résidents de l’hôtel. Le personnel mange à la grande table avec nous.

     Anaïs et Alice nous sourient. Je crois qu'elles aimeraient bien refaire avec nous un petit tour au sauna...  Mais nous devons songer à rentrer à Durandalem !

     Albert Tram, le technicien de l’hôtel m’aide à atteler la deuxième chariote sous la neige, et à la mettre en chauffe.

     Puis, une fois que la vapeur est suffisante, les quatre filles de joie de Durandalem, Jacou et moi, nous prenons congé des Falkenbergeois, et nous montons dans la première chariote.

     La neige dépasse les quatre pieds d'épaisseur. La chariote arrive encore malgré tout à la pousser sur le côté. Mais elle y va doucement !

     Il est bien quinze heures quand la neige cesse enfin de tomber. Nous quittons Falkenberg. La neige que nous dégageons est si haute que nous n’y voyons guère devant nous ! La deuxième chariote vide, que nous remorquons, est trop légère. Elle louvoie derrière nous, ce qui nous ralentit et nous fait dévier constamment. Et plusieurs fois, nous mordons sur le bas-côté du chemin.

     « À cette allure, ronchonne Jacou, il va nous falloir plus de deux heures pour arriver à bon port ! »

     Il lui vient une idée. Il parvient à joindre Jérémoy par télépathie, et lui demande s’il peut venir vers nous en dégageant la neige, pour nous ouvrir la route. Jérémoy lui fait aussitôt savoir qu'il part à notre rencontre.

 

     - À Durandalem aussi, la journée a débuté sous la neige tombante...

   Au réveil, ce matin, les habitants ont été surpris par la hauteur de neige. Près de trois pieds ! Jérémoy, avec la petite chariote, a dégagé de très bonne heure les rues et les chemins qui montent au chalet, à la fonderie et à la mine côté Sud, et aux remparts côté Nord.

   Les gardes de réserve, André, Roland, et Pierre Martinet, ainsi que Hankel Thiel et Georges Frisch, se sont portés volontaires aujourd’hui pour déblayer la neige là où la chariote ne peut pas passer. Leur tâche est ardue !

     D’épais effluves de vapeur montent tout le long des tuyaux qui alimentent les maisons en eau.

     Sur les remparts, les gardes doivent pousser la neige pour passer. Heureusement, grâce au chauffage de la réserve d’eau qui fait fondre la neige, le rempart Nord se dégage tout seul.

     Les abords des portails sont aussi dégagés, jusqu’à une centaine de pas des murailles.

     Mais la neige continue à tomber et remonte inexorablement partout !

     Les gardes de réserve, avec l’aide du garde champêtre, nettoient l’accès à l’auberge. C’est leur point de ralliement !

     Puis chacun part à pied avec une pelle et un balai, pour nettoyer les accès aux maisons et aux commerces.

     À dix heures, Bernard Spohr et Alexa Dumas, venant du portail Est, bravent la neige. Vol sans visibilité pour atterrir à l’auberge !

     Gretel Wilkinson, Georgette Fart et Pierre Spohr, venant du rempart Nord, arrivent bien refroidis et couverts de flocons.

     Vite, ils se déshabillent, et se réchauffent nus à l’âtre de l’auberge.

     Ariston active le feu avec des bûches et des braises de charbon. 

     « Le rempart Nord n’est pas couvert de neige, se réjouit Gretel. C'est l’eau de la réserve, chauffée par la vapeur, qui l’a fait fondre. C'est pareil en haut de la colline et le long de la muraille, là où s’écoule la neige fondue des remparts.

- Nous allons monter au rempart Sud avec André et Roland Martinet, pour aider Albert Fart, Christina Hahn et Stéphane Spohr à déblayer la neige ! dit Hankel Thiel.

- Oui, dit Roland. Georges Frisch et Pierre Martinet sont allés dégager le rempart Ouest, puis ils iront faire le rempart Est !

 - Ah, si seulement il arrêtait de neiger ! soupire Ariston en leur servant des boissons chaudes.

Les gardes de réserve prennent leur envol vers les remparts Sud avec leurs armes du jour : des pelles et des balais ! C'est à ce moment que Gaël et Joël entrent dans l’auberge.

     « Nous avons dégagé l’accès aux bains douches, et à l’échoppe, et aussi devant les appartements  annoncent-ils en se mettant nus devant le feu. »

     Il est onze heures quand Georges Frisch et Pierre Martinet reviennent du rempart Ouest.

     « Nous avons dégagé les remparts, les patrouilles peuvent reprendre. dit Georges Frisch en quittant ses habits tout détrempés. »

     « Il neige de moins en moins... On dirait que ça va s’arrêter ! fait remarquer Pierre Martinet, nu devant l’âtre. »

     Aline prend leurs vêtements mouillés, et leur donne des habits secs :  maillot de corps chaud, caleçons fourrés, bottines fourrées, manteau fourré, et des gants de cuir, eux aussi fourrés.

     « Nous allons manger avec vous, dit Georges en s’adressant aux gardes en pause. Nous irons aux remparts est ensuite. »

     Ariston dresse la table pour les cinq gardes et les deux déblayeurs. Gaël et Joël préfèrent écluser quelques canons. Ils mangeront plus tard avec l’autre équipe en pause.

     Sur les remparts Sud, les déblayeurs Hankel Thiel, André et Roland Martinet sont à l’œuvre, pelletant la neige par-dessus la muraille pour aider Albert Fart, Christina Hahn et Stéphane Spohr, qui déblayent les tours de guet au coin et la tour d’aération de la mine.

     Il est bientôt midi. Tout le rempart Sud est pratiquement dégagé. La relève n’aura plus à le faire, à moins qu'il neige à nouveau. Mais il semble que cela s’est arrêté…

     Les six gardes attendent donc la relève, c’est-à-dire Gretel Wilkinson, Georgette Fart et Pierre Spohr.

     Mais à peine arrivés, les gardes essuient à nouveau des bourrasques de neige. Les cinq gardes dont les trois relevés s’envolent vers l’auberge, avec beaucoup de mal à voir devant eux. D'autant que le vent s’est mis de la partie !

     Arrivés à l’auberge, ils se défont de leurs habits mouillés, et se sèchent nus devant l’âtre, qui ronfle de plus belle avec les bûches que Gaël y a jetées. Aline prend leurs habits, et en prépare des secs.

     Dans la mine, la neige a pénétré par la tour d’aération. Elle fond à la chaleur du sol, mouillant les chausses des mineurs qui travaillent en aval du puits d’aérage. Quand le vent s’est levé. un courant d’air glacial a traversé la mine. Ils décident d’arrêter le travail. Et tous les cinq se rendent à la Résidence, où ils sont attendus pour le repas.

     La neige déblayée ce matin recouvre à nouveau le chemin. Philippe Maigret, Fabrice Spohr, Louis, Georges et Roger Basin, tous sont frigorifiés ! Ils arrivent tout mouillés et grelottants. Ils s’approchent de l’âtre de l’office et se déshabillent. Madeleine Stone, la buandière, récupère leurs frusques mouillées et leur donne des grandes serviettes pour se sécher. 

     Une fois réchauffés, ils viennent à table nus et mangent de bon appétit. Quelques pichets de vin leur font bien vite oublier qu’ils ont eu froid. Cet après-midi, d’un commun accord, ils iront profiter des Thermes !

       Georges Frisch et Pierre Martinet sont partis déblayer les remparts Est, sous la neige, et sous le vent qui réduit la visibilité à néant. Benoît Spohr et Johan Martinet sont contents d’avoir du renfort. Mais eux, ils peuvent se sécher et se chauffer dans la salle de garde au dessus du portail !

      Ils se relaient tour à tour, alternant la garde nus au chaud et le déblaiement de la neige. Ils rentrent souvent. Mais à quatorze heures, malgré la bourrasque encore active, c'est fini, les remparts Est sont déblayés !

     La relève arrive. Joseph Spohr et Guenièvre Spohr, dont c’est le premier jour de garde, sont contents de ne pas avoir à déblayer tout de suite ! Ils restent au chaud, et se mettent nus.

     Albert Fart, Christina Hahn et Stéphane Spohr viennent relever Jacques Martin, Paul Spohr et Paul Frisch, qui volent vers l’auberge avec beaucoup de difficultés sous la bourrasque de neige.

     Benoît Spohr et Johan Martinet sont déjà arrivés. Aline les a déjà déshabillés, leur prenant leurs vêtements pour les sécher. Gaël et Joël font des allers-retours aux bains-douches, transformés pour l’occasion en séchoir géant. L’âtre grondant de flammes envoie de l’air brûlant dans les douches portes ouvertes. Il règne dans tout l’établissement une chaleur de sauna !

    À quinze heures, le vent s’arrête, et la neige cesse enfin de tomber.

     Jérémoy décide de refaire le tour du village pour déblayer les chemins. Quand il parvient au portail Ouest, nu aux commandes de la machine, Bernard Spohr et Alexa Dumas ne le voient pas arriver, tout occupés qu'ils sont à forniquer ensemble.  Pour qu’ils ouvrent le portail, Jérémoy doit les appeler mentalement.

     Du coup, ils interrompent leurs ébats. Alexa se montre à la fenêtre, fait signe à Jérémoy, descend la manette et ouvre le portail.

     À peine a-t-il franchi le portail que Jérémoy reçoit le message mental de Jacou : « Viens à notre rencontre, nous sommes sur la route de Falkenberg ! » Il répond qu'il arrive. Mais il doit d'abord revenir au plus vite à la grande forge faire le plein de charbon. Quand c'est chose faite, il retourne au portail.  Alexa l'avait déjà refermé, il doit lui demander de le rouvrir. Elle s’exécute, le laisse sortir, et referme.

     « On devrait quand même être plus sérieux, et revenir à une garde vigilante !  dit Alexa à Bernard. Tu te rends compte...  S’il était sorti et monté nous voir ?

   - Sorti tout nu avec toute cette neige, tu crois ? Ça ne risquait pas ! »  Et ils s’esclaffent tous les deux.

 

 

 

Jérémoy avance rapidement depuis un moment en déblayant la neige. Il y a quatre lieues jusqu’à Falkenberg, il devrait bientôt nous rencontrer !

     Au loin, il aperçoit un nuage de neige sur le côté. « Ce sont eux ! »  se dit-il. 

     Je ralentis l’allure, puis je m’arrête. Jérémoy manœuvre pour opérer un demi-tour, et se place devant nous, déblayant l’autre côté du chemin. N’ayant plus de neige à pousser, nous allons bien plus vite ! Jérémoy devant nous avance à vive allure.

     Bientôt, nous voilà en vue des remparts Nord de Durandalem, d’où monte un brouillard de vapeur. Et nous arrivons au portail Ouest qui s’ouvre. Et cette fois-ci, la vigilante Alexa guettait ! Il est à peine plus de seize heures.

     Jérémoy continue alors le déblayage des rues et chemins du village.

     Moi, j’arrête les chariotes devant la Résidence. Les filles de joie descendent sans se rhabiller, et pénètrent nues dans le bâtiment, sous les yeux ébahis des personnes présentes, qui ne nous ont pas vus arriver.

« Mais d’où venez-vous ainsi ? demande Adrien Molle le concierge.

- De Falkenberg ! répond Prune en souriant.

- De Falkenberg... Toutes nues ! ? Voilà qui est surprenant...Mais vous devez être mortes de froid ?

- En fait, rigolent les filles, nous sortons à l’instant de la chariote à vapeur de Robert. Il y fait très chaud, vous savez ! 

- Ouf ! Je comprends mieux... J’ai eu peur pour vous ! »

Et tout le monde s'amuse de ce quiproquo.

     Je mène les chariotes à la forge. Mes petits-fils Nathan et Léo se chargent de les remiser et de nettoyer les foyers. Jacou et moi enfilons un manteau et nous rendons à l’auberge pour connaître les dernières nouvelles... et aussi pour nous réchauffer le gosier !

     Nous nous déshabillons devant l’âtre, nous nous installons nus au comptoir, et nous commandons deux boissons chaudes.

    Sont présents les gardes en pause de seize heures, Gretel Wilkinson, Alexa Dumas, Georgette Fart, Pierre et Bernard Spohr, ainsi que les gardes en réserve : André, Roland et Pierre Martinet, Hankel Thiel et Georges Frisch.

     Les gardes de réserve nous informent qu’ils se sont portés volontaires pour les déblayages de neige sur tous les remparts, et aux abord des habitations.  Là, ils prennent un peu de repos en attendant des habits secs.

     « Gaël et Joël vont les ramener des bains-douches où nous les séchons, dit Aline. Avec toute cette neige, il y a vraiment eu beaucoup d’habits mouillés !

  -  C’est une bonne idée ! approuve Jacou.  Bravo à vous pour cette initiative et ce travail de déblayage !  Sinon, rien de neuf ? 

     - Si ! clame Gretel. Avec ces générateurs de vapeur en plus pour manœuvrer les battants des portails, il fait bien plus chaud dans les salles de garde, presque trop  !  Et notre bourgmestre adjoint, hier soir, a pris une ordonnance afin de faire installer une douche dans chaque salle de garde !  

- Oui, renchérit Alexa, en été, avec les nombreux trafics aux portails, la chaleur sera intenable, là-haut ! Une douche rafraîchissante sera la bienvenue...

     - Soit ! consent Jacou, vous les aurez, vos douches ! »

     Dehors, le ciel s’est dégagé, il est d’un bleu limpide.

     Le soleil couchant est apparu, pratiquement à l’horizontale sur le portail Ouest, éblouissant Benoît Spohr et Johan Martinet, de garde dans la salle au-dessus du portail. 

 

Samedi 25 février

 

    Il y a eu une vague de froid pendant trois jours, mais aujourd’hui le temps est sec et presque chaud ! Un gros soleil inonde le village, la neige fond sur les monticules que la chariote à vapeur a formés au fur et à mesure.

    L’installation des douches dans les salles de garde des portails est achevée. Jérémoy et ses fils, aidés par les cantonniers pour tirer les tuyaux d’eau, ont terminé le chantier hier ! Il a été décidé que des douches seront également installées dans les tours de garde aux quatre coins de la muraille.

    Les gardes de réserve, Christina Hahn, Pierre Martinet, Alexa Dumas, Johan Martinet et Guenièvre Spohr sont chargés de prévoir les stocks de charbon pour les chaudières individuelles de chaque tour, ainsi que pour les générateurs de vapeurs des salles de garde. Dorénavant, ce sera le travail habituel des gardes de réserve, sauf ordre contraire.

     Quant aux générateurs de vapeur supplémentaires dans la colline, qui serviront à chauffer les nouveaux tuyaux d’eau, ils seront entretenus de jour par les techniciens communaux, et la nuit par les gardes de nuit.

Chapitre II     Les Germains

 

 

-  Le printemps

- La fête de l’école

- Khan le terrible

- La fin de l’attaque des germains

- La liste

- Projets constructifs

-  Le concert

- Les prisonnières de Khan

- La délégation de Pont de Sarre

-  Les gardes de l’Empereur

-  Le tribunal

-  Les nouvelles habitantes

- Mardi 21 mars

-  Les soins des filles

-  La veuve Deir

-  L’accueil en classe

- Les remparts de Naborum

-  Les maçons de Manderen

- Les compagnons du Blauersland

-  Les pierres des remparts de Naborum

-  La visite des Tenquinois

- La visite des forgerons de Naborum

- Le Maître du Blauersland

- Vendredi 24 mars

 

 

Le printemps

 

    Depuis quelques jours, le redoux est amorcé ! Il ne gèle plus...

Hier, le sol est redevenu assez meuble pour que Pierrot et Claude Stein puissent enfin creuser les tombes des trois défunts de la chambre froide de la crypte :  Jules Lang, décédé en décembre, Bruno Martinet, décédé en janvier et Gertrude Beten, décédée le mois dernier. Gabriel annonce l’enterrement.

     La messe a lieu en l’église, très chauffée. Toutes et tous sont nus, priant et écoutant les homélies de Charles Higgins, le curé du village.

     Après cette messe du souvenir, le curé, tous les paroissiens et les gardes se rhabillent et se rendent au cimetière derrière l’église. Le curé marche en tête, suivi des trois cercueils portés par dix-huit gardes, puis des familles et amis des défunts, pour accompagner ces âmes dans leurs dernières demeures.

     Ce sont les gens d’arme qui montent la garde ce matin sur les murailles du village.

     Le temps est radieux, le soleil brille, et les oiseaux annoncent la venue du printemps en piaillant à tue-tête.

     Certes, il reste encore quelques monticules de neige de-ci de-là, mais la fonte est déjà bien avancée ! Le ruisseau du village est à son plus haut niveau. L’eau coule à flots et entraîne la roue à aubes de la grande forge. Jérémoy doit la freiner pour avoir un débit correct.

     La roue du moulin est en position haute. Voici trente ans, j’avais mis au point un système automatique avec des flotteurs, qui lève ou baisse la roue suivant le niveau d’eau. Ce système fonctionne toujours. Isabeau Muller y veille, et fait parfois appel à Jérémoy pour consolider telle ou telle autre partie de la roue.

La fête de l’école

 

     Aujourd’hui est un grand jour !

     Notre école des soldats, qui a vu le jour le jour le 19 mars 768, a été un bienfait pour l'Empereur Charlemagne. Elle lui a fourni les meilleurs soldats qu'il ait jamais eus ! Ces soldats lui ont permis de remporter de nombreuses victoires, grâce à leurs aptitudes exceptionnelles et à leurs pouvoirs fantastiques, tous acquis à l'école...

     Cet hiver, Charlemagne est passé à Durandalem, et il n'a pas tari d'éloges sur eux et sur leur chef Dillon, retournés à la vie civile, après l'avoir servi et avoir servi le royaume. Avant de repartir dans son fief, l'Empereur a promis de les inviter et de les honorer chez lui, à Oche, lors de l'inauguration de la Chapelle.

       Il a donc été décidé il y a peu d'organiser une fête ici à Durandalem, en l'honneur de ces vaillants soldats dont la gloire a rejailli sur tout le village.  

      Avec le conseil du village, Jacou a choisi pour la fête la date anniversaire de la création de l’école, le 19 mars. Pour cette occasion, il a chargé le coursier Roger de parcourir la région pour retrouver les soldats et leurs familles afin de les inviter. Cela lui a pris une bonne semaine.

      À Tenquin, il a retrouvé Alix Holz, quarante huit ans, bûcheron, marié avec Georgette, quarante cinq ans, qui ont deux jumeaux de vingt ans, Alex et Alexia. Son père Guillaume a quatre-vingts ans. Il a aussi retrouvé Armand Capes, quarante sept ans, maraîcher, qui vit en couple avec Gabin Fleich, cinquante ans. Leurs pères Roger Capes et Damien Fleich sont âgés de quatre-vingt-un ans et de soixante dix huit ans.

     À Hombourg, il a retrouvé Achille Gouvy, quarante neuf ans, forgeron, époux de Marie, quarante cinq ans, et leurs trois enfants : Théo, dix huit ans, et Georges et Mia, seize ans.

     À Laudrefang, il a vu Xavier Stamm, quarante huit ans, aubergiste, époux de Bérengère, quarante deux ans, qui a deux enfants, Sylvie, dix huit ans, et Sophie, seize ans. Ainsi que leurs grands-parents Jean Louis, quatre-vingts ans, et Marie, soixante dix neuf ans. Et aussi Joseph Brett, cinquante-et-un ans, ébéniste, époux de Josette, quarante cinq ans, qui a deux filles, Claudette et Charlotte, jumelles de dix huit ans. Louis Brett a quatre-vingts ans, et Charlotte Gainsbar, soixante quinze ans.

      À Naborum, il a contacté Charles Kauf, quarante neuf ans, bourgmestre de Naborum, et son épouse Viviane, quarante huit ans. Ils ont trois enfants :  Roméo, dix neuf ans, Juliette, dix huit ans, et Benoît, dix sept ans.  Le grand-père Vivien Kauf a soixante neuf ans. Sont également invités Hugues Schaff, cinquante-et-un ans, chef des gens d’arme de Naborum, et son épouse Adélaïde, quarante cinq ans, ainsi que leurs quatre enfants, les jumeaux Pierre et Paul, dix huit ans, et les jumelles Anne et Marie, seize ans.  Richard Schaff a soixante treize ans, et Carole de Saint-Saëns, son épouse, soixante dix huit ans.

      Il n'a pas oublié bien sûr ceux de Durandalem : Le Borgne Bauer, quarante neuf ans, fermier, époux d'Audrey Lemas, quarante sept ans. Une fille, Joséphine, vingt-et-un ans. François Bauer, cinquante ans bientôt, fermier, époux d'Isabelle Nacht, quarante huit ans. Un enfant, Francis, vingt-et-un ans. Le Fernand Bauer a soixante treize ans.

       Et enfin Dillon d’Ortega, cinquante quatre ans, chef des gardes de Durandalem, époux d'Esther Maigret, quarante huit ans, et père des jumeaux Jean et Aimé d’Ortega, vingt-et-un0 ans.

     Tous ces soldats et leur familles sont donc invités à la fête dans l’école de soldats, et tous ont promis de venir ! Ils sont également conviés au banquet du soir, et seront tous hébergés à l’école et à l’hôtel des Thermes.

     Les gardes de réserve, Stéphane, Pierre et Paul Spohr, André Martinet et Roland Martinet sont à la disposition des invités, ils les connaissent tous.

     Il est neuf heures quand les premiers arrivants se présentent au portail est. Ce sont les invités de Naborum, venus tous ensemble en chariot.

     Albert et Georgette Fart sont dans la salle de garde.

     Georgette ouvre la fenêtre, nue, et les interpelle :

     « Qui êtes-vous ? 

     - Charles Kauf, bourgmestre de Naborum, et Hugues Schaff, chef des gens d’arme, et nos familles. 

     - Entrez, vous êtes attendus à l’école ! 

     Et sous les regards étonnés des occupant du chariot, le portail s’ouvre tout seul.

      - Encore une invention de Robert ! s'extasie Hugues. 

     - Eh non ! corrige Georgette. Là, pour une fois, c’est une idée de son gendre Jérémoy... »

      Et le chariot arrive à l’école.

      Hantz Burg, le géant ex pillard Flamand qui a survécu jadis à l’attaque du village, est là pour réceptionner le chariot et l’emmener dans les écuries des Thermes.

     Charles Kauf le salue et descend du chariot, accompagné de son épouse et de ses trois enfants. Puis il aide son vieux père Damien à descendre lui aussi.  Hugues Schaff descend ensuite, avec son épouse et ses quatre enfants. Les deux garçons aident leurs grands-parents Richard et Carole à s'extraire du véhicule.

     Jacou reçoit tout ce monde au portail de l’école.

      « Bienvenue au Bourgmestre de Naborum, ainsi qu’au chef des gens d’arme ! Mesdames, messieurs, chers enfants, bienvenue !  Damien, Richard et Carole, je vous salue ! 

      - Merci, Jacou ! répond Charles. Dis donc, tu as l’air en forme, pour ton âge...

      - Dame, j’ai des potions pour ça ! »

     Et Charles, Hugues, Vivien, Richard et Carole rigolent de bon cœur. Ils s'en souviennent, des potions de Jacou...

      « Oh là là...J’ai une douleur dans le dos ! lui chuchote Carole.

     - Oui, je me souviens bien de ton ’’mal de dos’’ d'il y a trente-trois ans ! sourit Jacou. J’ai toujours mon cabinet là-haut, je regarderai ça tantôt...    Maintenant, entrez. Anatole vous accueille avec nos filles Marianne, Mariette, Josette, Josiane, Manon, et Pénélope.  L’apéritif est servi à l’étage. »

 

   Voici maintenant qu’une grande charrette arrive de Tenquin, avec à bord Alix Holz, son épouse Georgette, ses jumeaux Alex et Alexia, et Guillaume, son père. Et aussi Armand et Gabin, accompagnés de leurs pères.

    « Qui êtes-vous ?  demande Albert Fart à la fenêtre.

     - Alix Holz, Armand Capes, Gabin Fleich, et leurs familles ! 

     - Entrez !

Et il actionne les vérins du portail, qui s’ouvre sous les yeux ébahis des Tenquinois.

    - Épatant ! dit Alix.  Vous n’avez pas froid, tout nus là-haut ? 

    - Ne vous inquiétez pas, le rassure Georgette, à Durandalem, c’est bien chauffé partout ! Même sur les remparts ! »

     Alix avait bien dit à son épouse et à ses enfants que même les gardes étaient nus, mais ils ne l’avaient pas cru. Ils pensaient qu’il racontait des fadaises... Ils peuvent maintenant constater qu'il ne mentait pas !

     « Allez à l’école, Jacou vous attend ! 

     Effectivement, Jacou les accueille...

     - Bienvenue, Armand et Gabin ! Et bienvenue Alix et la famille Holz !  Et salut à vous, Guillaume, Roger et Damien ! 

     - Voici Georgette, mon épouse, dit Alix, et nos enfants, Alex et Alexia...

     - Entrez, entrez...Anatole vous guidera pour aller à l’étage.

     - Salut Anatole !  disent les soldats du roi.

     - Salut les valeureux soldats ! leur répond-il. »

 

     Au portail Ouest, une troisième charrette se présente.

  Gretel Wilkinson, et Christina Hahn sont de garde.  Gretel ouvre la fenêtre, sa belle poitrine en avant.

« Qui êtes-vous ? demande-t-elle.

      - Bonjour Gretel ! dit Joseph Brett qui l’a reconnue. Nous sommes les soldats de Laudrefang, Xavier Stamm et Joseph Brett, et leurs familles ! 

     - Salut Joseph ! Entrez ! »

Et le portail s’ouvre comme par magie, et la charrette pénètre dans l’enceinte du village. Jacou réitère le rituel d'accueil.

    - Bienvenue, les Stamm et les Brett ! Et salut à vous, Marie, Charlotte, Louis et Jean Louis ! 

     - Voici Josette, mon épouse, dit Joseph, et nos filles jumelles Claudette et Charlotte. .

    - Et je te présente Bérengère, mon épouse, et nos filles Sylvie et Sophie, ajoute Xavier.

    - Bienvenue à vous, mesdames et mesdemoiselles !  Hantz va s’occuper de votre charrette ! Veuillez suivre Anatole, qui va vous conduire à l’étage. »

 

     Il est bientôt dix heures.  Au portail est, une quatrième charrette se présente.  Joseph Spohr et Guenièvre Spohr, gardes de relève, arrivent par la voie des airs.

Les occupants de la charrette sont épatés par ces gardes volants !

     « Qui êtes-vous ? demande Georgette à la fenêtre, toujours nue.

     - Achille Gouvy, soldat du roi...  Et voici ma famille ! 

     - Entrez ! »  dit Georgette.

Et elle actionne l’ouverture du portail, ce qui étonne fortement Achille, pourtant féru de technique.

   « Magnifique !  Et en plus, je vois qu'il se referme aussi tout seul ! »

     Vite rhabillés, Georgette et Albert Fart, une fois relevés par Joseph et Guenièvre, escortent la charrette en voletant de chaque côté. Les enfants sont émerveillés !

      - Oh, regarde...Ils savent faire comme toi, papa ! dit l’aînée.

     - Allez jusqu’à l’école, leur lance Albert, Jacou vous attend !

    -  Nous, nous nous arrêtons à l’auberge !  lui précise Georgette.

     Jacou les voit arriver.

    - Bienvenue à toi, Achille, et à la famille Gouvy ! 

    - Je te salue, Maître Jacou ! Voici Marie, mon épouse, et Théo, Georges et Mia, nos enfants...

     - Laissez là votre charrette, Hantz vient la chercher. 

     Suivez Anatole, il va vous conduire à l’étage ! »

Tous les invités extérieurs sont maintenant arrivés. Dillon a déjà réuni aux Thermes les familles de Durandalem : la sienne, et la famille Bauer. Tous ensemble, ils se rendent à l’école et montent à l’étage.

   

Jacou prend la parole :

     « Bienvenue à toutes et à tous ! 

      Aujourd’hui, nous sommes réunis ici pour fêter l’anniversaire de l’école. Une école qui a fourni au roi Charles la meilleure garde qu’il ait jamais eue !  Charles, maintenant Charlemagne, Empereur de l'Empire romain d'Occident, qui était dans nos murs le mois dernier, et qui a proclamé que vous êtes les meilleurs ! »

      À ce moment se présentent des personnes que beaucoup reconnaissent !

   « Et voici l’équipe qui a fait de ces jeunes garçons des rudes et braves soldats du roi !  Child, le maître archer des élèves soldats... Émile, le maître enseignant l’équitation... Chantal, la scientifique, enseignante de la connaissance des plantes... Marianne et Mariette, les masseuses des soldats... Josette et Josiane, les habilleuses des soldats... Manon et Julie, les cuisinières des soldats... Georges Hair, le coiffeur et tondeur des soldats, et aussi Anatole, que tout le monde a déjà rencontré, le concierge de l’école.  Et bien sûr, le plus jeune, Dillon d’Ortega, si efficace instructeur de la troupe !

     Nous allons boire un verre à la santé des soldats, de leurs épouses, de leurs enfants... et aussi à la santé et à la mémoire de leurs parents ! 

     Santé ! 

    - Santé !  répond en chœur l’assemblée.

    - Ensuite, continue Jacou, nous irons manger aux Thermes.

       Vous savez sans doute que Durandalem est nudiste. Eh bien, celles et ceux qui ne connaissent pas encore vont pouvoir vivre leur première expérience... Aux Thermes, tout le monde est nu ! 

      Nous allons donc toutes et tous entrer et nous déshabiller. Les habits seront pris en charge sur place par nos buandières. 

     Puis nous prendrons toutes et tous une douche bien chaude. Les hôtesses vous distribueront des serviettes pour vous sécher. 

  Ensuite, petite visite des infrastructures des Thermes. Enfin, nous irons au restaurant, où de grandes tables nous attendent....

     Après le repas, quartier libre pour tous. Vous pourrez faire plus amplement connaissance, et profiter à loisir des Thermes. »

     Tout le monde passe donc à la douche. Certains sont un peu gênés, non pas de se montrer nus, mais d'afficher aux yeux de tout le monde leur attirance pour les filles. Car à la vue des filles des soldats, de toutes ces créatures, jeunes et belles, les verges se dressent irrésistiblement !

     En toute discrétion, Jacou distribue une potion qui calme ces ardeurs somme toute naturelles, et les garçons retrouvent bien vite leur sérénité.

     La visite commence en bas, dans un brouhaha de commentaires joviaux :

     « Whouah ! La belle piscine ! 

     - Pfou ! Qu'est-ce qu'il fait chaud, dans cette salle ! 

     - Tu as vu ça ? Une piscine pleine de boue !? 

     - Que c’est grand ! 

     - Super, on peut boire un verre les pieds dans l’eau ! »

     …

     Jacou invite ensuite tout le monde à monter à l’étage. Les plus âgés ont droit aux monte-personnes, qui sont gérés par les vigiles, les frères Holz.

     Arrivés à la salle de restaurant, les invités peuvent juger de l’ampleur des tables déjà dressées pour eux ! Puis ils montent encore et arrivent à l’hôtel, où la plupart dormiront ce soir, et ils visitent la suite impériale, où Charlemagne a séjourné le mois dernier.

     Enfin les invités redescendent au restaurant, où les tables sont ainsi agencées :

     La table d’honneur, avec d’un côté Jacou et Dillon au centre, et cinq soldats à leur gauche, autant à leur droite. De l’autre côté, en face d’eux, leurs épouses respectives. Pour Gabin et Armand, les filles de joie Prune Fruscht et Pam Suzon veulent bien donner le change et s’assiéront en face d’eux. Jacou, lui, a invité Yvette Welch, la veuve de Michel Wald. 

    La table des vétérans, de toutes celles et de tous ceux qui ont vécu avec les soldats, les formateurs, le coiffeur, les masseuses, les cuisinières - qui pour la circonstance, ne cuisinent pas - et leurs compagnes et compagnons... Plus Ulla Fonte, qui a accepté de jouer la cavalière de Child.

        La table des onze parents des soldats : Guillaume Holz, Roger Capes, Damien Fleich, Jean-Louis et Marie Stamm, Louis Brett et Charlotte Gainsbar, Vivien Kauf, Richard Schaff et Carole de Saint-Saëns, et le Fernand Bauer.

       La table des jeunes, les enfants des soldats. Les onze filles et les onze garçons se placeront face à face, de façon à faire plus ample connaissance.

    Sur une estrade au fond du restaurant, les musiciens Béatrice Spohr, Jenny Stein Garfield et Benami Schmit, le barde Simon Schmit et le vétéran Apollinaire de Waltz vont égayer le repas, en accompagnement de musique de fond.

     Apollinaire et ses musiciens entament des séries de morceaux festifs et rythmés. Certains des jeunes se sentent déjà l’envie de danser. Les jeunes se lèvent de leur table, et d’un commun accord vont se trémousser ensemble ou en solo devant l’estrade.

Depuis une semaine, Fabien Hune, le volailler, avait fait le tour des marchés pour commander ce dont il avait besoin, en plus de sa production à lui : des gésiers de canard et des cuisses de canard. Les gens d'armes sont allés hier prendre livraison des commandes, à Naborum, à Falkenberg, et jusqu'à Mettis.

En effet, le menu concocté par les cuisinières et cuisiniers des Thermes prévoit en entrée une salade de gésiers garnie de lard et de croûtons, suivie d'un plat de cuisses de canard aux champignons. Nul doute que ces mets agréeront aux convives !

Isabeau Muller, le boulanger, a pour l'occasion fabriqué un pain spécial, gourmand, avec plusieurs farines. Le repas, plantureux, est concocté par les cuisinières des Thermes aidées par les cuisiniers de la résidence, et servi par le personnel des Thermes, serveuses et agents d’entretien. Ce copieux festin est fort apprécié... Le tout est arrosé d'un vin de Bourgogne qui ne dépare pas ce superbe menu !

Maintenant, un peu de repos s'impose.

     Les jeunes montent dans les dortoirs de l’hôtel, et naturellement se couchent les uns à côté des autres… L’efficacité de la potion calmante de Jacou qui s'estompe, la chaleur des corps, les envies montantes, le printemps... Tout cela entraîne vite des situations pour le moins érotiques.  D'autant que Chantal leur a distribué une autre potion aux effets prétendument digestifs... mais en fait pour le moins suggestifs !...

 

 

     Il n’est pas loin de dix-huit heures. Une fois douchés, séchés et requinqués par une potion que Chantal leur avait donnée avant qu’ils ne montent, ils décident de rejoindre les « vieux ».

 

     Les parents, repus, s’installent dans les fauteuils, se font servir des digestifs, et papotent du bon vieux temps.

     Quant aux soldats et à leurs épouses, ils proposent à Jacou de faire avec lui un tour dans le village, afin de rencontrer les anciens et de voir tous les changements intervenus à Durandalem.

Khan le terrible

 

  • Les pillards de Naborum

 

        Il est quatorze heures passées quand un cavalier arrive à bride abattue au portail Est.

     « Qui êtes-vous ?  demande Gretel Wilkinson, de garde avec Christina Hahn.

     - Vite ! Je dois voir le chef des gens d’arme de Naborum, Hugues Schaff ! Nous sommes attaqués par une bande de pillards ! »

     Gretel s'empresse d'ouvrir le portail, informant le messager que Hugues est aux Thermes. Puis elle prévient Jacou et Dillon, qui aussitôt agissent en conséquence !

    « Hantz, tu vas seller des chevaux ! Les garçons, venez boire la potion dans mon cabinet ! »

     Dillon met en alerte tous les gardes, y compris les gardes de nuit, ainsi que les gens d’arme :

    « Prenez vos arcs, nous allons défendre Naborum !  Marianne, Mariette, Josiane, Josette, Manon et Sophie, vous les filles, vous vous occupez de ces dames, leurs maris vont combattre !  Quant à vous, Christian Hahn et Pascal Spohr, vous partez voir par les airs ce qui se passe, et vous nous faites le compte rendu par la pensée ! »

     Les deux gens d’arme s’envolent aussitôt. Et arrivés bientôt au-dessus de Naborum, ils témoignent :

  « Ils sont nombreux ! Au moins soixante ou soixante-dix ! ... Ils saccagent tout, c’est la panique !... La population fuit !... Les maisons brûlent ! »

      « Messieurs, claironne Jacou, la ville a besoin de vous ! » 

     Et les dix soldats s’envolent nus, armés de leurs arcs et de carquois bien remplis.

     Dillon, pour sa part, a réuni vingt hommes et femmes parmi la garde ainsi que cinq gens d’arme.

     Toutes et tous, habillés ou nus, s’envolent vers Naborum. Guidés par les indications de Christian Hahn, ils arrivent en vue des premiers agresseurs.

 

 

  • La bataille

 

     Les gens d’arme de Naborum se battent vaillamment contre les assaillants.  Mais les pillards sont vraiment trop nombreux, et les gens d’arme sont vite submergés. Déjà deux d'entre eux gisent sur le sol.

     C'est alors qu'une volée de flèches lancée par les soldats s’abat sur les assaillants, fauchant les vingt premiers. Quelques soldats s’occupent de l’arrière et font le nettoyage parmi les pillards.

     Un à un, les bandits sont éliminés. Quelques-uns tentent bien de s’emparer d’otages, mais le tir effroyablement précis des soldats les terrasse. Une flèche dans l’œil pour chacun !

     Les gardes alors se posent et forment une barrière. Ils empêchent les pillards restants de s’enfuir, abattant ceux qui le tentent, tandis que les soldats nus se postent en face. Voilà les assaillants pris au piège !

     Une cinquantaine de bandits gisent à terre, morts pour la plupart. Il ne reste que vingt survivants. Quelques-uns gémissent, blessés.

    

     Pendant que les habitants éteignent les incendies, Hugues Schaff et Charles Kauf, toujours nus, s’avancent vers les pillards survivants.

     « Qui êtes-vous ? D’où venez-vous ? Répondez, menacent-ils en désignant les pillards abattus, ou vous subissez sur- le-champ le sort de vos complices ! »

   Un des bandits baragouine quelque chose. Il semble à Hugues et à Charles qu'ils ont déjà entendu cette langue en Germanie, lorsqu’ils guerroyaient avec le roi Charles. Ce doit être du germain. Et Hantz sait parler le germain...

 

  Cela tombe à pic : Hantz arrive justement à cheval avec, en renfort, quelques villageois en armes, dont Joël et Gaël, qui ont fait ample provision de flèches à l'échoppe.

  Hantz s’approche des pillards et les interpelle en germain, traduisant leurs réponses.

     « Jetez vos armes sur-le-champ, ou vous êtes morts ! »

     Entourés d’archers résolus prêts à décocher, les pillards obéissent, et laissent choir leurs glaives, leurs arcs et leur lances.

     « Qui êtes-vous ? 

     - Nous sommes des soldats, de l’armée de Khan le guerrier ! 

      - Qui est votre chef, ici ? 

      - C’est Khôl, il est là !  Voyez, vous l'avez tué... Mais Khan le guerrier arrive par ici ! Sa vengeance sera terrible, il va tous vous décimer ! »

     Charles charge aussitôt Alix et Achille d’aller vérifier si des troupes arrivent bien par l’Est. Les deux soldats s’envolent en scrutant l’horizon.

     Puis il demande, toujours avec Hantz comme interprète :

     « Que faites-vous par ici ? 

     - Notre grand Khan a appris qu’une grande quantité d’or se trouvait par ici, non loin de ce bourg !  Et il vient s’en emparer !  Donnez-le-lui, sinon vous mourrez tous !  

     - C'est plutôt ton Khan qui va mourir aujourd’hui, et tous ses bandits avec lui ! réplique Charles.  Hugues, emmène-le... Et s’il résiste... couic ! »

    

Achille atterrit à Hombourg pour savoir si les bandits sont passés chez eux. Les villageois ont beau le connaître, ils sont toujours impressionnés de voir arriver par les airs ce soldat nu et en armes !  Ils l'informent que les bandits sont passés par la vallée, mais sans s’arrêter ni monter ici, sur leur colline.

     « Tant mieux... Restez tout de même vigilants. Nous avons neutralisé les premiers, mais d’autres peuvent survenir ! Mettez en sécurité les femmes et les enfants dans l’enceinte du monastère des Récollets, et organisez-vous en défense, avec des arcs, comme je vous l’ai appris ! »

     En effet, à leur retour de l’armée du roi Charles, une des premières tâches des soldats avait été de former à la défense tous les habitants de leurs villages respectifs, que ce soit à Tenquin, à Naborum, à Hombourg, ou à Laudrefang. Et bien sûr à Durandalem, où l’entraînement est permanent. Pour garder la main sûre, les gardes organisent souvent des défis amicaux. Les habitantes et habitants de plus de quinze ans savent tous se servir d’un arc, et bien s'en servir !

     De son côté, Alix a continué son vol, et signale ce qu'il voit :

     « Ça se précise ! Des troupes approchent, plusieurs centaines d’hommes à pied, plus une vingtaine de cavaliers et quelques chariots...  Ils viennent de traverser Pont-de-Sarre. La ville au loin est en flammes ! Et dans peu de temps, ils seront sur nous ! »

     Achille relaie le message.

     Jacou, Dillon et Charles organisent alors la défense.

     À l’entrée est de Naborum, ils forment une sorte de goulot en renversant tous les chariots apportés par les habitants. Les bandits ne pourront pas le contourner. Puis les gardes se postent de chaque côté des chariots, à bonne distance mais à portée de flèche.

      De leur côté, sous les ordres de Dillon, les soldats s’apprêtent à partir à la rencontre de l’armée ennemie.

     « J’en suis !  dit Charles.  Hugues, tu t’occupes des prisonniers ! 

    - Soldats du roi, nous voici devant une nouvelle bataille...Une bataille que nous allons gagner, comme nous l’avons fait maintes fois jadis ! En attaquant par les airs ! 

   - Nous sommes à tes ordres...

  -  Volons à leur rencontre, et abattons d'abord tous les cavaliers, tous les charretiers ! »

     Pendant ce temps, les habitants de Naborum portent secours aux habitants attaqués. On déplore hélas deux morts, deux gens d’arme qui ont défendu la population, au péril de leurs vies ! Le célibataire Claude Pons, quarante ans, et Jean Deir, trente deux ans, qui laisse une veuve de trente ans, Jeannette, et deux jeunes fils de dix et douze ans...

    Deux autres gens d’arme sont blessés, mais leurs vies ne sont pas menacées. Chantal et Marie Brett se rendent sur place pour les soigner. Elles sont assistées par Denis et Colette Collem, trente cinq et trente deux ans, successeurs de Benoît Krier, quatre-vingts ans, médecin retraité de Naborum... et qui, malgré son grand âge, a tenu à être là lui aussi ! Il est épaté de connaître la plante cicatrisante qu’emploie Marie sur les plaies.

 

     Hugues Schaff donne l’ordre à ses dix hommes encore valides d’emprisonner les pillards. Avec l’aide des gens d’arme de Durandalem, ils les déshabillent, et les ligotent nus les uns aux autres. Jean Martin, le chef des gens d’arme de Durandalem et ses hommes s’occupent ensuite des pillards blessés. Ils en dénombrent douze, tous atteints grièvement, et la plupart n'en réchapperont sans doute pas.

     Dillon et ses soldats sont partis, armés chacun de trois carquois en bandoulière. Ils approchent de la troupe ennemie, repérable par la poussière qu’elle soulève.

     Quand ils sont à portée de tir, au-dessus d’eux, ils décochent leurs flèches. Les cavaliers tombent les uns après les autres, les charretiers sont cloués sur leurs sièges. La troupe des pillards panique, et court dans tous les sens, essayant d’éviter les traits qui pleuvent de toutes parts sur eux.

     Dillon et ses soldats volants font un massacre ! Aucune des trente flèches qu'ils ont tirées chacun n'a raté sa cible. Trois cents ennemis gisent, terrassés. 

     Mission accomplie. Ils reviennent à Naborum,

Seul Alix reste en arrière pour rendre compte mentalement à Dillon de ce que fait l'armée ennemie.

    « Ils ont récupéré les chevaux, et viennent par ici au galop ! Ils sont vingt-deux... »

     Dillon recharge alors un carquois, ses soldats font de même, et ils retournent à l’assaut.

     « Ne tuez pas les chevaux, on va les garder ! »

     Bientôt ils rencontrent les ennemis, qui cette fois-ci ripostent ! Eux aussi ont des arcs, mais la vitesse de vol et la justesse de tir des soldats arrivent vite à bout des vingt-deux cavaliers.

      Il y a quand même un blessé. Une flèche a atteint le Borgne à la fesse ! Alix et Achille volent à son secours, et le transportent jusqu’à Naborum. Il est immédiatement soigné par Marie et Chantal. Une fois la fesse anesthésiée par un onguent de Chantal, elles ont tôt fait de retirer la flèche. Heureusement, la blessure n’est pas très profonde, et avec la cicatrisante, il guérira vite.

     « Évidemment, sourit Jacou, quand il y a un blessé, ça ne peut être que toi ! Je me souviens de l’instruction des jeunes soldats. C'était toujours toi qui prenais les mauvais coups ! »

     Le Borgne ne peut s'empêcher d'éclater de rire...

 

     François, Charles, Xavier Armand et Joseph récupèrent les chevaux, et les ramènent à Naborum, derrière les défenses de la ville.    

     Alix revient de son observation.

     « La troupe a perdu une bonne partie de ses effectifs. Six ont déserté et se sont sauvés dans les champs ! »

     Dillon dit alors :

    « François, Charles, Joseph, retrouvez-les, ramenez-les... ou tuez-les ! Alix va vous montrer la direction.  Et toi Alix, tu retournes voir ce qu’ils font ! »

     Et les voilà repartis à la chasse aux fuyards.

 

  • La fin de l'attaque des Germains

 

      Alix revient et crie : « Alerte ! Ils vont attaquer Hombourg ! »

     Aussitôt Achille prend trois carquois pleins, Dillon, Alix, Armand, Xavier et lui foncent vers Hombourg, et se postent en haut de la colline.

  Envoyés par Jacou en renfort, dix gardes les rejoignent. Et quand les pillards se dispersent pour assaillir la colline par tous les côtés, des nuées de flèches sifflent, et leurs corps roulent au bas de la colline les uns après les autres.

Joël et Gaël, avec dix autres gardes, arrivent en bas de la colline, déclenchent un tir nourri qui élimine la plupart des ennemis. Une vingtaine d'entre eux arrivent cependant à gravir la colline, mais ils sont impitoyablement transpercés par les flèches des soldats.

     Quelques-uns rebroussent chemin, mais tombent sur François, Charles et Joseph, qui reviennent après avoir éliminé les fuyards qui ripostaient. Eux non plus ne laissent aucune chance aux bandits en bas de la colline.

     Ceux qui suivaient avec les huit chariots ont voulu opérer un demi-tour... Ils ont subi le même sort.

    

Bientôt, tout danger est écarté, et Naborum peut lever ses défenses.

     Les soldats entassent les cadavres ennemis dans des charrettes. Ils en dénombrent des centaines, entre les premiers cavaliers abattus, et les derniers fuyards en chariot.

   Charles fait venir d’autres charrettes pour enlever tous les cadavres sur la route et autour de Hombourg. Ils repèrent celui de Khan le guerrier, reconnaissable à ses riches vêtements brodés d’or, tombé parmi ses lieutenants lors de l’attaque aérienne des vaillants soldats. 

    Les flèches sont récupérées, les corps dépouillés sont entassés à côté. Pour les enterrer, les cantonniers Alain et Georges Bour, et Paul le fils de Georges. aidés par une dizaine d’habitants, entreprennent de creuser une grande fosse à l’entrée de Naborum, un énorme trou de cent pieds sur cinquante et de quinze pieds de profondeur.

Huit des douze pillards blessés sont morts, et s'ajoutent aux quarante morts du premier assaut.

     Ce qui fait un total de quatre cent quatre-vingt-huit morts sous les flèches des défenseurs de Naborum, plus quatre blessés, et vingt prisonniers.

 On fait un immense tas des vêtements délabrés, et on y met le feu.  

 Les huit chariots sont remplis de butin, notamment de ce qu'ils ont pillé à Pont-de-Sarre.

     Jacou dit à Roger, qui est venu avec le renfort de Durandalem, d’aller à Pont-de-Sarre annoncer la nouvelle.

     « Annonce-leur que tous les pillards sont morts ou capturés, que les chariots sont récupérés, et qu’ils peuvent venir les chercher. 

     Toi Hantz, tu vas retourner à Durandalem rassurer tout le monde, leur dire que tous les soldats et les gardes sont sains et saufs, qu'il n’y a qu’un blessé léger.

     Nous autres, avant de retourner, nous allons aider la population de Naborum à ranger tout ce fouillis. »

    

 

 

     Charles tient ce discours à ceux de Naborum :

     « Naboriens, nous avons gagné cette bataille...  Et ceci grâce aux soldats et aux gardes de Durandalem ! 

     Nous déplorons certes deux morts parmi nos concitoyens, deux de nos gens d’arme, Jean Deir et Claude Pons, qui n’ont pas hésité à donner leurs vies pour nous défendre ! Mais c’eût été beaucoup plus sans l’intervention des soldats. 

     Toutes mes condoléances à toi, Jeannette Deir, son épouse, et à vos deux fils Jeannot et Jorge, ainsi qu’à sa mère, à son père, à son frère blessé durant la bataille. Toutes mes condoléances également aux parents de Claude.

     Ce soir je me rends à Durandalem, avec Hugues, le chef des gens d’arme. Nos familles sont là-bas, nous rentrerons demain matin. 

     Un hommage sera rendu aux gens d’arme tombés en accomplissant leur devoir ».

      Hugues donne ses ordres à ses gens d’arme, et tous les soldats et gardes de Durandalem reviennent par la voie des airs, sous les remerciements chaleureux des Naboriens, reconnaissants de leur avoir sauvé la vie !

 

     À Durandalem, la nouvelle s’est répandue rapidement, et le village s’est vidé de toutes les femmes et tous les hommes en armes qui résident au village. Seule reste en place, sur le qui-vive, la garde en poste aux portails et aux remparts .

     Aux Thermes, les parents et les épouses des soldats étaient inquiets, mais Hantz leur apporte des nouvelles rassurantes.

     Les enfants des soldats, eux, n’ont pas encore eu vent de la tragédie. Dans le dortoir, ils se sont tranquillement livrés à leurs ébats, sans être dérangés.  Ce n’est que vers 18 heures, quand ils descendent après une bonne douche, qu’ils apprennent la nouvelle, stupéfaits ! Joséphine Bauer est heureuse que la blessure de son père le Borgne ne soit pas grave...

     Tous les protagonistes de cette bataille arrivent aux Thermes, et se réconfortent avec quelques boissons remontantes. Ils les ont bien méritées. Inutile de dire qu'après tant d'inquiétude et d'émotions, tout le monde, épouses, compagnes et compagnons, est très heureux de se revoir !

      « Pour certaines et certains d’entre vous, leur dit Jacou, cette bataille était votre baptême du combat... Pour beaucoup, c’était la première fois que vous tiriez réellement sur des ennemis. Je vous félicite de ne pas avoir fait faux bond, et d’avoir si bien rempli votre devoir de défense ! »

     Charles prend la parole à son tour :

     « Merci à vous, vaillants gardes de Durandalem, et merci à vous braves soldats du roi ! Sans vous, sans vos aptitudes exceptionnelles, Naborum ne serait plus qu’un bourg en ruine et en cendres.  Vous, les gardes ayant participé à la bataille, vous les gens d’arme de Durandalem, qui êtes restés à vos postes, vous êtes tous nommés citoyens d’honneur de la cité de Naborum ! 

     Et en tant que bourgmestre de Naborum, j’ai décidé que notre ville se dotera, comme Durandalem, d’une muraille de protection tout autour de son territoire, et que des gardes y patrouilleront jour et nuit ! »

  • La liste

 

     La liste des citoyens d’honneur de la cité de Naborum est établie !

     - Helga Wilkinson et son compagnon Roland Martinet. Leur fils Pierre Martinet était de garde au rempart Sud.

     - Joseph Spohr. Sa compagne Julie Klein est cuisinière de l’école et leur fils Fabrice Spohr est mineur.

      - Guenièvre Spohr, compagne de Christian Hahn, policier participant, et mère de Piotr Hahn, et Paul Spohr, son père. Fille et mari de Michèle Holz, garde de nuit et participante.

     - Bernard Spohr, compagnon de Justine Kami, masseuse aux Thermes, et père d'Élodie Spohr, masseuse à la résidence.

     - Johan Martinet, compagnon d’Alice Spohr, gens d’arme, aussi sur le terrain.

     - Paul Frisch, compagnon de Georgette Fart, parents de Georges Frisch, de garde au rempart Nord, compagnon d’Alexa Dumas, de garde au rempart Sud.

      - Stéphane Spohr, compagnon de Thérèse Stone, buandière aux Thermes, et père de Pascal Spohr, policier sur le terrain.

      - Pierre Spohr, compagnon de Madeleine Stone, buandière aux Thermes. Et parent des jumelles Alice et Aline Spohr, gens d’armes sur le terrain. Aline est la compagne de Jean Martin, le chef des gens d’arme, aussi sur le terrain.

     - André Martinet, compagnon de Gretel Wilkinson, de garde au portail est, et père de Patrick Martinet, agent d’entretien à la Garderie II.

     - Nissa Lévy, cheffe des gardes de nuit

     - Roland Ronce, garde de nuit, compagnon de Georges Chaplin, garde de nuit.

     - Sylvain Winterberg, garde de nuit, compagnon de Charly Chaplin, garde de nuit.

     - Alain Hahn, garde de nuit, compagnon de Natacha Rich, garde de nuit.

    - Abel Hahn, garde de nuit, compagnon de Nathalie Rich, garde de nuit.

     - Pacôme Maigret, garde de nuit, compagnon de Agnès Poly, garde de nuit.

     - Alexandre Dumas, garde de nuit, compagnon de Valérie Maigret, garde de nuit.

    - Elysa Lévy, garde de nuit.

    - Jeanne Martinet, garde gens d’arme, sœur jumelle de Johan Martinet, et compagne de Hankel Thiel, garde à la muraille Nord.

 

Projets constructifs

 

       Il est dix huit heures quand les gardes reprennent leurs postes normaux, libérant celles et ceux qui ont tenu les postes durant la bataille.

     Joseph Spohr et Guenièvre Spohr retournent au portail Ouest,

     Bernard Spohr, Jean Martin et Paul Frisch au rempart Sud,

     Albert Fart et Georgette Fart au portail Est,

     Benoît Spohr, Alexa Dumas et Pierre Martinet au rempart Nord.

     Les gardes de nuit prendront leurs postes à vingt heures comme prévu.

 

     Dans les Thermes, les jeunes gens arrivent au restaurant, tous affamés après leurs vigoureux ébats. Leurs parents ne s’y trompent pas en voyant les yeux brillants de leurs filles... Elles ont assurément pris du bon temps !

     Les femmes des soldats ont profité des bienfaits des Thermes, du sauna, de la piscine, et des massages des filles durant l’après-midi.

     Les parents des soldats sont restés bavarder au coin des boissons. Ils ont refait le monde à leur idée...

     Les familles à nouveau réunies s’installent autour des tables. les soldats sont tout aussi affamés que leurs enfants. Mais pas pour les mêmes efforts, bien sûr !

     Roger, de retour de Pont-de-Sarre, fait son rapport.

     « Les délégués de Pont-de-Sarre arriveront demain matin, pour récupérer les chariots contenant les pillages des bandits.  Ils veulent rencontrer les sauveurs de Naborum, et leurs chefs ! 

     Ils connaissent déjà Durandalem, ils y sont passés il y a plus de trente ans. Ils étaient encore des enfants, à l’époque.... Ils se souviennent bien des douches ! » conclut-il en riant.

     À table, Charles interroge Jacou.

« As-tu encore des contacts avec les maçons de Mettis, qui avaient bâti vos fortifications ?

  - J’ai des contacts du côté de Manderen... Les jeunes apprentis-maçons qui étaient venus en renfort sont maintenant de solides gaillards. 

    Ils ont fondé une corporation à Manderen. Au cours de ces dernières années, ils ont fait halte plusieurs fois à Durandalem, sur la route de leurs différents chantiers, pour prendre du bon temps.  Ils ont acquis une bonne réputation. Mais je ne sais pas s’ils seront disponibles pour construire des remparts autours de Naborum.

     Roger ! tu partiras demain à Manderen, pour te renseigner !

     Charles, quel est le périmètre de ta cité ?

     - Oh, il faut bien compter une demi-lieue par côté, en incluant Oderfang. Ce qui fait deux lieues de murailles...  Je me rends bien compte de l’ampleur du projet !

     - Oui, il faudra des matériaux en conséquence. Vous trois, Alix, Armand et Gabin, vous serez chargés de lancer un grand chantier de pierres à Tenquin !   Quant à toi, Dillon, tu désigneras trois gens d’arme et trois gardes. Ils se rendront à Strateburgo, pour commander d'autres pierres chez les compagnons du Blauersland.  Et tu es en outre chargé de la formation des gardes nécessaires à la surveillance des remparts de Naborum ! 

     - Avec plaisir, répond Dillon en souriant. Charles, tu pourras m’envoyer tous les gardes que tu pourras recruter, femmes et hommes, et même des adolescents... Ils grandiront vite ! »

 

     Il est presque vingt heures quand un cavalier se présente devant le portail Est.

     « Qui êtes-vous ?  demande Georgette Fart, nue à la fenêtre. 

     - Je suis un des gens d’arme de Naborum, je dois parler à Charles Kauf, notre bourgmestre, qui est en vos murs !

    - Entrez, allez aux Thermes, il s’y trouve. »

     Et Georgette actionne le portail qui s’ouvre pour laisser passer le messager de Naborum, puis elle referme derrière lui.

     Aux Thermes, les vigiles Michel Hoste et Amandine Bardot demandent au messager de patienter un instant. Par la pensée, Amandine contacte Jacou, qui transmet à Charles, qui descend aussitôt.

     Il a reconnu le messager.

       « Salut François... Quelles nouvelles ?

     - Nous avons achevé la fosse et enterré les scélérats ! Nous en avons ajouté quatre : deux qui s'étaient rebellés, et que nous avons abattus ; et aussi deux des blessés, morts ce soir. Les habitants veulent lapider les survivants... Nous avons bien du mal à les contenir !

       - Dis aux survivants que dès demain matin, nous statuerons sur leur sort. En attendant, enfermez-les sous haute surveillance. Il ne faut pas que la population les voie ! »

      Et le messager repart pour Naborum.

Le concert

 

     Après le repas, toutes et tous se retrouvent autour du coin des boissons. Les plaisanteries et les anecdotes fusent. Le Borgne n’est pas épargné par les taquins, lui qui ne peut pas s’asseoir pour l’instant ! Ses blessures au cours de l’apprentissage des soldats sont devenues légendaires...

     Apollinaire de Valz, qui a longtemps écouté les soldats, a composé une ode narrant leurs exploits...  En leur honneur, il leur dédie tout un grand concert. Il a convoqué ce soir les musiciennes et les musiciens de Durandalem.

      Le garde champêtre Gabriel a fait le tour du village pour l’annoncer. Toute la population a été invitée aux Thermes pour la circonstance !

      Les habitants attendent, assis, en papotant de choses et d'autres. Béatrice Spohr, Jenny Stein, Garfield et Benami Schmit, Simon Schmit le barde, tous les artistes sont maintenant en place sur scène autour d'Apo. On peut commencer !

     Apo entonne son ode aux soldats, fort martiale :

     « Allons enfants de l'Austrasie... »

     Puis en hommage à l'Empereur :

     « Sacrer, sacrer Charlemagne... »

       Tonnerre d’applaudissements !

     Puis d’autres refrains s'enchaînent, rappelant aux spectateurs mille souvenirs personnels ...

     « Si j'avais une épée », ou l'épopée de Durandal...

     « Quand un garde s'envole » ...

     « L'école est bâtie » ...

     « Le sirop Jacou » ...

     « Les pillards sont dans la plaine » ...

     « Douche transe » ...

     « Tout nu et tout grisé » ...

     « Mon Dieu quel bonheur, mon Dieu quel bonheur d'avoir un Roro bricoleur... »

     Et bien d'autres encore... Tout le monde rit de bon cœur !

     Le concert, on s'en doute, se prolonge jusqu’à une heure avancée de la nuit. Boissons servies sans relâche par Hélène et Marlène, Joëlle Lutz, Josie Bern et Joseph Wirth, qui ont fort à faire !

 

     Chacun ensuite regagne son domicile, enchanté de cette soirée chantante. Les invités, parents, épouses, soldats, sont logés dans les chambres de l’hôtel. Les dortoirs sont attribués aux enfants. Un pour les filles, et un pour les garçons.

     Mais les jeunes ne l’entendent pas de cette oreille ! Très vite, un brassage se fait, et les garçons et les filles se mélangent pour prolonger en beauté leur torride après-midi, et dormir les uns dans les autres !

    Dès dix huit heures, les buandières de l’hôtel avaient changé les draps et les linges des dortoirs, et les agents d’entretien, Louis Hoste et Bérengère Stark, avaient tout nettoyé.  

     « C'était tout taché ! gronde Bérengère tout en rigolant. Cette fois, n’hésitez pas à utiliser les serviettes, elles sont là pour ça, ça évitera de répandre votre semence partout ! »

     Guillaume Bardot, le gérant de l’hôtel, prévient lui aussi les jeunes :

     « Cet après-midi, dans ce dortoir, vous avez été particulièrement bruyants ! J’ose espérer que ce soir, la proximité de vos parents dans les chambres voisines vous incitera à faire moins de bruit...  Cela dit, si vous avez le moindre problème, je suis là, à l’appartement du bout, venez me trouver. Sur ce, je vous souhaite à toutes et à tous une bonne nuit ! »

      Et cette fois-ci, l'on n’entend plus que des gémissements feutrés, des rires sous cape - ou plutôt sous drap - et les râles de jouissance savent se faire discrets.

     Les soldats et leurs épouses, seuls dans un grand lit, apprécient ce moment d’intimité, et peuvent batifoler à leur aise. 

     Les concierges Émile Lutz et Thomas Fergusson font leur ronde. Ils éteignent d'abord les chandeliers du rez-de-chaussée. Puis, une fois que les agents de service ont rangé la salle de concert, ils passent éteindre le premier étage. Quant au deuxième étage, il reste illuminé, en cas de déplacement nocturne imprévu. 

     Les agents de surveillance Jeannot Muller et Jacky Muller s’occupent de l’entretien de nuit des chandeliers. Mais ils en profitent pour s’occuper aussi de l’éclairage des dortoirs, et profitent aussi des bontés des filles, Charlotte et Claudette Brett, toujours heureuses de voir de nouvelles verges fraîches !

 

Les prisonnières de Khan

 

 

     La cloche sonne sept heures. Le vaillant soleil s'est déjà levé.

     Dans les cuisines des Thermes, les préparatifs du petit déjeuner sont bien avancés.

     Petit à petit, les soldats apparaissent, en compagnie de leurs épouses, compagnes, compagnons.

     Les enfants aussi descendent du dortoir, après une courte nuit où le sommeil n’a eu qu’une maigre part ! Et des affinités se sont scellées... Certains enfants descendent main dans la main, les yeux dans les yeux.

     Accompagné par Dillon et Audrey, qui dormaient eux aussi à l’école à côté, Jacou fait son entrée et donne ses directives.

     « Charles, Hugues, leurs familles et moi, nous partons à Naborum, pour la cérémonie d'hommage aux héros morts pendant la bataille contre l'armée de Khan le guerrier.

     Toi Dillon, tu vas chercher les chariots de butin, et tu les rapporteras ici, afin que la délégation de Pont-de-Sarre puisse les récupérer. Inutile de perturber la cérémonie...  Tu emmèneras tes gens d’arme et quelques gardes. Il y a huit chariots. Vous ferez le tri de leur contenu une fois au village. »

     Il n’est pas huit heures quand le chariot des notables de Naborum et leurs familles s'apprête à quitter Durandalem.

     Les gardes de nuit, Georges Chaplin et Sylvain Winterberg sont en poste au portail est, ils ouvrent le portail et le referment une fois les chariots passés.

     De son côté, Dillon a réuni ses gens d’arme Jean Martin, Christian Hahn, Jeanne Martinet, Alice, Aline et Pascal Spohr, ainsi qu'un des gardes en réserve aujourd’hui, Hankel Thiel.

     « Mesdames et messieurs, nous allons voler jusqu’à Naborum, et revenir avec les chariots volés par les bandits.  Habillez-vous bien, il fait encore frisquet en altitude ! »

    L'escadrille des huit gardes décolle. Peu après, ils se posent à Naborum à l’endroit où sont remisés les chariots. Christian Schein, le garde de faction, est impressionné par ces gardes volants. Dillon l'a reconnu :

  « Salut Christian ! Nous venons prendre les chariots pour les ramener à Durandalem. Les Sarrois viendront les chercher. »

     Et le convoi vite sellé s'ébranle sans plus tarder vers Durandalem, chaque garde tenant les rênes d’un chariot. Ce sont les gardes de réserve, Stéphane, Pierre et Paul Spohr, Paul Frisch et Hankel Thiel qui vont s’occuper des chariots à leur arrivée.

     Quand le convoi atteint le portail est, la garde de jour est en place.

     Guenièvre Spohr, nue, se penche à la fenêtre.

     « Qui va là ?

     - Dillon, ma belle ! Ouvre-nous... »

     Et la belle Guenièvre, souriante, ouvre le portail.

       Dillon amène les chariots dans le pré à côté des Garderies, et ordonne de les débâcher.

     En soulevant des peaux, parmi les coffres et les sacs, soudain... quelle n'est pas la stupeur des gardes ! Ils viennent de découvrir tout un groupe de jeunes filles nues, entravées, bâillonnées, complétement épuisées ! Douze jeunes filles, presque des gamines...

     Les détachant prestement, Dillon fait venir de la Garderie des couvertures pour les réchauffer. Il leur demande pourquoi elles étaient ainsi attachées et bâillonnées, et pourquoi elles ne se sont pas manifestées depuis hier.

  D’une voix faible et hachée, l’une des filles lui répond qu’elles étaient les jouets sexuels de Khan et de ses lieutenants pendant les bivouacs. Et Khan les avait menacées de mort si elles osaient bouger !

   Sur ordre de Dillon, les gardes vident le contenu d’un chariot, y font monter les jeunes filles, puis les emmènent à l’ancienne école. Là-bas, Marie et les filles, que Dillon a prévenues, vont s’occuper d’elles.

     Anatole ouvre le portail, le chariot pénètre dans l’enceinte. Les filles sont là pour aider les infortunées jouvencelles à descendre. Elles les emmènent aux douches pour y recevoir des soins. Elles sont lavées à l’eau bien chaude, nettoyées, puis nourries correctement. Elles n’avaient pas pris de vrai repas depuis longtemps !

     Enfin elles se sentent mieux... Elles commencent à raconter leur histoire.

     « Je m’appelle Gertrude Hoff, voici ma sœur jumelle Berthe, nous avons seize ans, et nos sœurs Paulette et Annie, quinze et quatorze ans. Nous venons de Wissant, un village au Nord de Strateburgo. Notre village a été entièrement détruit par les hordes de Khan. Nous sommes les seules survivantes, ils ont massacré tout le monde, même les enfants et les chiens ! »

     - Nous, nous sommes les sœurs Bonté. Je suis Anne, j’ai dix sept ans, voici Joëlle, Josette et Josiane, mes trois petites sœurs jumelles de quinze ans. Notre village, Rimsdorf, a lui aussi été rasé par Khan. »

    - Moi, je suis Claudine Schmit, j’ai seize ans, mes sœurs Claudette, quinze ans et Claudia, quatorze ans. Pareil pour nous ! notre village, Steinbourg, a été complétement détruit. Nous étions les premières prisonnières de Khan. On peut le dire : nous n'avons été épargnées que parce que nous étions rousses à gros nichons et baisables... »

    - Moi, je suis Edeltraud Bour, j’ai seize ans. Mon village Hötzendorf n’existe plus. Ma grande sœur Trudy est morte il y a trois jours sous les coups de Khan... Elle s’était rebellée. Elle avait dix sept ans.»

   En attendant la délégation sarroise, Dillon les a rejointes.

     « Mesdemoiselles, je me présente. Je suis Dillon d’Ortega, le chef des gardes de ce village, qui se nomme Durandalem. Nous avons vaincu et tué Khan hier lors de la bataille de Naborum. Vous n’avez plus rien à craindre. Ici, dans le village, vous êtes en sécurité ! Avez-vous quelque part de la famille, des amis qui pourraient vous accueillir ? »

  - Hélas, répond Gertrude...Toutes nos familles, nos parents, nos frères, nos amis, nos connaissances, tous sont tombés sous les sabres et les flèches des hordes de Khan !

     - Plus personne, donc... Alors, si cela vous convient, considérez que dans cette maison vous êtes maintenant chez vous. Vous y êtes les bienvenues ! Après les horribles souffrances que vous avez subies, vous pourrez enfin goûter au repos !

  - Grand merci, ô Dillon ! Nous avons déjà entendu parler de votre village. Khan voulait s’en emparer pour prendre l’or qui s’y trouverait ! Est-il vrai que vous avez de l’or ?

- Oui-da ! Et en abondance ! Notre village se trouve sur un gigantesque filon, et nos mineurs sortent de l’or tous les jours ! »

     Anne Bonté, voyant les filles de l’école nues, leur demande :

     « Mais vous vivez toutes nues, dans ce village ?

     - Oui, répond Chantal, c’est une de nos règles.  Durandalem est un village nudiste, tout le monde vit nu quand le temps le permet ! La nudité est un des préceptes de vie de notre bourgmestre Jacou Artz. »

     Marie se présente :

     « Je suis Marie Brett, le médecin du village.  Je vais examiner vos corps. »

      Et elle inspecte les jeunes filles, une par une. Elle contrôle si elles sont porteuses de vermines ou autres sales bêtes, vérifie les yeux, les oreilles... Elle constate des lésions superficielles sur tous les corps, ainsi qu’aux entre-jambes, et des ecchymoses un peu partout. Elle se dit que ces pauvres filles ont dû subir les pires souffrances !  Mais elle estime que leurs vies ne sont pas en danger.

     Marianne propose alors aux jeunes rescapées de venir se faire masser, et de se laisser enduire de quelques pommades apaisantes et cicatrisantes, notamment aux parties sensibles de l’entre-jambe.

     Elle les emmène alors en salle de massage. Chantal, Josiane et Josette les rejoignent, ainsi que Mariette. Les cinq masseuses des Thermes sont mandées prestement, ainsi que celle de la résidence. Et Valérie Burg, l’assistante de Chantal, s’y met aussi.

     Ainsi massées, elle éprouvent une grande volupté, un bien-être qu’elles ne pouvaient pas imaginer. Chantal a des potions d'une efficacité extraordinaire pour cicatriser les plaies, blessures et ecchymoses dont leurs corps sont couverts. En captivité, elles ont subi tant de coups de fouet et de bâton... La plante la cicatrisante, ramené jadis par Jacou du mont Fuji, et qui pousse dans la grotte des leevancliffus, sur la colline Nord, fait des merveilles. Un onguent fabriqué à base de cicatrisante est idéal pour cicatriser les ecchymoses !

     Après les massages, elles sont invitées au sauna. Au début, elles trouvent cela horrible, mais elles s’y font vite. Une douche nettoie ensuite toutes les toxines expulsées par la transpiration, et un bon bain de kaolin achève de les relaxer.

     « Venez, dit Chantal, je vous emmène dans vos quartiers ! »

     Et les jeunes filles sont installées dans les quatre appartements vides, au rez-de-chaussée. Un pour les quatre filles Hoff, un pour les quatre Bonté, un pour les trois Schmit, et un pour Edeltraud Bour.

     Edeltraud admire la douche, le coin d’aisance, la chambre, la cuisine... Elle n’avait jamais eu autant de confort dans sa vie !

« Ces appartements sont vraiment luxueux !

- Maintenant, dit Chantal, ce sont les vôtres. Vous y habitez, et vous pouvez les aménager à votre guise !

- Pour les lits, dit Anatole, je vous ai fourni ce qu’il vous faut. Installez-les à votre aise.  Si vous avez besoin de quoi que ce soit d'autre, je suis là. J’habite juste à côté, n’hésitez pas à me demander. Je viendrai vous chercher pour le repas de midi.  Cela se passe dans la grande salle, là où vous étiez. Maintenant, reposez-vous ! »

     Et les filles s’embrassent, et pleurent de bonheur... Enfin la vie leur sourit à nouveau !

    

La délégation de Pont-de-Sarre

 

        Il est onze heures passées.

     Dix cavaliers se présentent devant le portail est.

     « Qui êtes-vous ? leur lance Johan Martinet depuis la fenêtre.

     - Je m’appelle Pierre Martin. Nous sommes la délégation de Pont-de-Sarre.

     - Entrez, messieurs ! »

     Et il actionne la manette commandant l’ouverture des portails, tout en prévenant Dillon par la pensée.

     Dillon arrive aussitôt, par la voie des airs. Les Sarrois n’ont jamais vu cela !

     Les gardes de réserve, Paul Frisch et Hankel Thiel, Stéphane, Pierre et Paul Spohr, sont en train de trier le contenu des chariots. Les armes, épées, arcs, flèches, lances, arbalètes, boucliers et quelques cotes de mailles d’un côté, les outils de forge de l’autre.

     Les Sarrois sont étonnés de voir ces hommes travailler tout nus !

     « Eh oui, dit alors Hankel Thiel, dans ce village, nous vivons nus ! »

     Peu de temps après, vingt cavaliers, fortement armés, arrivent au portail est. 

     Cela intrigue Johan Martinet.

     Il prévient immédiatement Dillon, qui monte à la salle de garde.

      « Qui êtes-vous ? 

     - Ouvrez, au nom de l’Empereur ! »

     Dillon dit à Jean d’ouvrir, dit aux gardes de se tenir sur la défensive, les armes prêtes, et descend accueillir les soldats de l’Empereur.

     « Pied à terre ! ordonne l'homme de tête. »

     Dillon s’approche de lui. Il reconnaît l'un des soldats de la garde rapprochée de l’Empereur, qui était à Durandalem en février. Il ordonne alors mentalement aux gardes dans la tour de baisser leur garde.

      « Bienvenue, Jean d’Atton, bienvenue aux gardes de l’Empereur ! Que nous vaut l’honneur ? »

     Le soldat a reconnu le préféré de l’Empereur.

    « Salut Maître d’Ortega ! Nous sommes en train de lever une armée pour combattre un fléau qui a été signalé dans la région, et qui ne devrait pas être loin d’ici ! Et nous savons que des soldats tels que vous seront des alliés de poids...

     - Si vous parlez de Khan le terrible, répond Dillon, nous nous en sommes occupés hier ! Nous l’avons tué, ainsi que ses quatre cent quatre-vingt-dix hommes, lors d’une bataille glorieuse ! De notre côté, nous ne déplorons que deux morts et quelques blessés.

   - Mais par quel prodige ?

    - Eh bien, ça s'est passé comme il y a trente ans, quand nous étions les gardes du roi Charles... Un assaut par les airs ! Nous les avons décimés avec nos flèches !

     - Fantastique ! Nous pouvons donc retourner à Oche informer l’Empereur de cette issue inespérée.

   - Certes, mais venez donc d’abord prendre un peu de repos. Allez aux Thermes, on vous y attend. »

     Dillon se tourne ensuite vers les Sarrois, épatés par ce qu’ils viennent d’entendre.

     « Voici tout le contenu des chariots. Une partie est à vous. Mais vous pouvez tout prendre. Le reste vient de villages qui n’existent plus, dont tous les habitants ont été massacrés ! 

     Nous avons aussi trouvé dans les chariots douze jeunes filles qui servaient de jouets sexuels à Khan. Ce sont elles qui nous ont raconté les massacres dont leurs familles et leurs villages ont été victimes. Nous les avons hébergées et adoptées. »

     Les Sarrois n’en reviennent pas !

     « Mais combien étiez-vous donc ? demande l’un d’eux.

     - Pas plus de trente... Par hasard, réunis ici, les dix gardes du roi Charles, présents pour l’anniversaire de l’école, et vingt de nos gardes.

     « À trente contre cinq cents ! s'exclame Pierre Martin. C'est incroyable ! 

 Mais présentons-nous... Je suis Pierre Martin, quarante trois ans. Voici mes enfants, les jumeaux Kurt et Kern, vingt-et-un ans.

     Voici mon frère jumeau Paul et son fils Adolf, vingt ans.

     Voici Hans Kriss, quarante ans, Alain Jamot, quarante deux ans, et son jumeau Alex.

     Et enfin Albert, vingt ans, fils d'Alain, et Alix, dix neuf ans, fils d'Alex.

     Nous sommes tous soldats. mais hélas nous n’étions pas à Pont-de-Sarre lors de l’attaque de la ville, nous nous trouvions à Deux-Ponts.

       Mon frère Paul et moi, nous sommes déjà venus jadis à Durandalem, avec Alex et Alain Jamot, ici présents. 

     - Oui, confirme Alex. Nous avions tout juste neuf ans, mais je m’en souviens très bien ! C’était en 768, nous allions à Mettis. Nous avions pris une douche et dormi à l’auberge. Serait-il possible de prendre une douche et de manger à l’auberge aujourd’hui, avant de repartir pour Pont-de-Sarre ?

    - Ce sera avec plaisir, répond Dillon. Allez-y, Joël vous y attend !

     - Je ne comprends pas, dit Paul... Comment peut-il déjà savoir ?

     - Eh bien, outre le pouvoir de voler, nous avons aussi celui de communiquer par la pensée ! Je l'ai prévenu mentalement...

    - Vraiment ?! Mais c’est absolument fantastique !

- En fait, vous savez, rien de surnaturel... Notre bourgmestre Jacou pourrait vous expliquer cela mieux que moi ! »

     Sur demande de Dillon, les palefreniers de chez Émile, José Pferd et Hantz Burg, viennent prendre en charge les chevaux.

     Et les Sarrois vont à pied aux douches. Il est bientôt midi. Joël est devant le bâtiment.

     « Mais je te reconnais, dit Alex, c’était déjà toi, il y a plus de trente ans !

     - Certes, c’était moi ! Mais moi, je ne vous reconnais pas. Vous deviez être très jeunes...

     - C'est sûr, nous avions neuf ans... Nous étions avec Adélaïde de Mons et Joséphine Cliff, nos éducatrices à l’époque.

     Ces noms ravivent d’excellents souvenirs…

     - Ah oui ! Elles, je m'en souviens très bien ! »

     Il se revoit avec Gaël, dans leur appartement des douches, en train de faire hurler de plaisir les deux filles…

     « Et que sont-elles devenues ?

     -  Elles habitent à Pont-de-Sarre...

     - Bon ! Allez, vous doucher, je vous donne des serviettes propres, et des tuniques pour venir manger. Vos braies vont être lavées, vous les récupérerez propres et sèches après le repas !

       Mais j'y pense, pas besoin de tuniques, vous pouvez rester nus... Il fait bien bon maintenant ! »

      Et les Sarrois prennent donc une douche, chose peu habituelle chez eux ! Joël rassemble leurs habits et les porte à Aline, qui les met aussitôt dans la machine pour les laver.

     Une fois séchés, ils ressortent donc nus, un peu gênés. C’est la première fois qu’ils se promènent nus dehors... Ils arrivent à l’auberge. Ariston leur a dressé une table. Ils reconnaissent le vieux Child, derrière son comptoir, qui les salue.

     Midi passé, la relève a eu lieu.

     Les gardes en pause sont eux aussi attablés, bientôt rejoints par les gardes de réserve.

Les gardes de l’Empereur

 

     Aux Thermes, les familles des soldats sont en partance. Ceux de Tenquin sont chargés de mission pour les pierres destinées à Naborum. Ceux de Hombourg vont retrouver leurs concitoyens, tout heureux du dénouement de la bataille. Ceux de Laudrefang sortent par la porte Ouest.

     Les enfants des soldats se saluent et s’embrassent une dernière fois. Des affinités sont nées... Il serait dommage que ça s’arrête là ! Alors, tous ensemble, ils ont décidé de se retrouver tous ici même en juin, pour le solstice d'été. Y compris ceux de Naborum, déjà partis tôt ce matin.

   

    Les gardes de l’Empereur arrivent devant les Thermes. Les palefreniers sont montés prestement aux écuries pour préparer les chariots des soldats. Ils s’occupent des chevaux des gardes.

    Jean d’Ortega et Aimé d’Ortega, les vigiles de ce matin, après avoir fait leurs adieux aux enfants des soldats, ont été prévenus de l'arrivée des gardes de l’Empereur. Ils accueillent les vingt cavaliers et les conduisent aux douches. Mia Fart, Brigitte et Martine Bardot, Étienne et Zoé Lombard les y attendent.

     « Avez-vous toujours dans vos murs ces filles qui nous ont donné tant de plaisir ?  demande Jean d’Atton, le chef des gardes.

    - Non, répond Étienne Lombard, mais nous avons nos filles de joie. Je les fais mander sur l’heure, elles s’occuperont de vous ! En les attendant, venez, vous restaurer.  La table est dressée ! »

     Pendant le repas, les filles de joie, Ulla, Fifi, Pam et Prune, les rejoignent donc et s’installent parmi eux.

     Puis tout ce beau monde monte dans le dortoir, que les services de l’hôtel viennent de finir de nettoyer.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le tribunal

 

     À Naborum, la population excédée s'est attroupée. Elle veut liquider les prisonniers, les sbires survivants de Khan le terrible. Les gens d’arme ont bien du mal à contenir tout ce monde.

     Mais voici qu'arrivent leur bourgmestre Charles, Hugues le chef des gens d’arme, et notre bourgmestre Jacou.

   Charles écarte les familles qui les accompagnent, et tente de calmer la foule.

     « Chers habitants de Naborum, nous sommes avant tout ici pour honorer la mémoire de nos héros, qui ont donné leur vie pour défendre notre cité contre les pillards...

     - À mort, les pillards ! À mort, les pillards !  hurle l'assistance.

     - Je comprends votre colère... Mais nous devons d'abord constituer un tribunal qui statuera sur le sort des survivants ! Et c'est Jacou Artz ici présent, en tant que doyen, et en tant que sauveur de notre ville, qui le présidera.  Ouvrons le procès. Que l'on fasse venir les prisonniers ! »

   Sous bonne garde, enchaînés, les vingt prisonniers, nus, sont conduits sur la place. Le président Jacou les interpelle : « Vous êtes accusés de meurtres, de pillages, de destructions de biens.  Qu’avez-vous à dire pour votre défense ? »

     L'un des prisonniers, d'un ton arrogant, lui répond dans notre langue :

     « Vous allez tous mourir sous les coups de Khan le terrible ! »

      Et toute la population éclate de rire.

     « Vous ne savez donc pas que Khan, ses lieutenants, et toute son armée, ont péri dans la bataille ? Tenez, admirez-les, les riches habits de votre Khan ! Tout transpercés de flèches ! Et votre Kahn, il gît maintenant dans une fosse, enterré avec quelque cinq cents bandits de votre espèce !  Nous vous posons la question : voulez-vous mourir aujourd’hui, ou vous repentez-vous ? »

     La population vocifère de plus belle :

     « Non ! Non !   Pas de pardon !...  À mort les pillards ! À mort ! »

     L'arrogant obtus s'entête : « Notre grand Khan viendra nous libérer ! Il vous massacrera tous ! »

     « Enlevez-le ! dit Charles. Il sera passé par les armes, séance tenante ! »

     Et les gens d’arme de Naborum, les arcs bandés, attendent l’ordre.

     Charles dit à Hugues :

     « Donne l’ordre ! »

     Et Hugues s’exécute, et commande :

     « Vaillants gens d’arme, tirez ! »

      Une volée de flèches transperce le corps du scélérat, qui s’écroule.

 Jacou s'adresse alors aux dix-neuf restants :

     « Je vous le demande une dernière fois ... Voulez-vous mourir aujourd’hui, ou vous repentez-vous ? »

     La plupart des prisonniers acceptent de se repentir, et baissent la tête en signe de soumission. Mais deux des leurs continuent à les exciter, leur parlant en germain.

     « Ne vous laissez pas intimider ! Ne les croyez pas ... Notre grand Khan va venir nous libérer ! »

     Aussitôt, sur une levée de main de Hugues, sans sommation, les deux instigateurs sont abattus.

     « Dernière chance, les autres ! dit Hugues. Vous avez une minute pour choisir de vivre... ou de mourir ici, maintenant ! »

     Un des prisonniers, qui connaît notre langue, lui répond. 

     « Nous voulons vivre ! Nous ne sommes que des valets soumis à Khan, nous vivons sous son joug depuis l’enfance... Nous avons été arrachés à l’affection des nôtres, et enrôlés de force dans ses troupes.  Et nous ne savons rien faire d’autre que piller et égorger les populations ! »

     Charles s’adresse alors à l'assistance :

     « Vous avez entendu, chers Naboriens. Le sort de ces hommes est entre vos mains ! Devons-nous les exécuter, ou pouvons-nous espérer qu'ils se repentent et servent la cité ? »

     C'est alors qu'intervient Jeannette Deir, la veuve de Jean Deir, l'un des gens d’arme morts au combat. Elle est accompagnée de ses deux jeunes fils.

     « Mon mari, le père de mes enfants, est mort pour avoir défendu la cité... Ceux qui l’ont tué sont morts aussi ! Il y a eu assez de morts comme cela, maintenant, vous ne croyez pas ? Sans aide, je ne pourrai plus subvenir aux besoins de ma famille ! Je demande que ces gens puissent entrer à notre service, qu'ils nous jurent fidélité pour le reste de leur existence. Sinon, ma foi, qu’ils meurent ! Mais ce serait dommage... »

     Les habitants de Naborum, touchés par cette plaidoirie, se laissent convaincre.

     « Oui, qu’ils se mettent au service de la ville !

     - Alors, redemande Jacou, que choisissez-vous, sbires de feu Khan le terrible : la mort, ou le service de la population ?  

    - Aucun de nous ne veut mourir ! Nous choisissons la vie ! Puissent un jour les habitants de la cité nous pardonner nos exactions... Oui, nous jurons fidélité à Naborum !

     - Habitants de la cité ! crie Charles, acceptons-nous ces repentants parmi nous ? 

    - Oui ! Libérez-les ! Mais au moindre faux pas, ils sont prévenus, ce sera la mort, sans rémission ! 

     - Nous sommes tous à votre service, dit le prisonnier. Demandez-nous ce que vous voulez ! Nous, nous ne demandons qu'à vivre, vivre une vie sereine, loin de toutes les horreurs que nous avons commises sous les ordres de Khan.

     - Bien ! Vous êtes donc dès maintenant au service des Naboriens, confirme Hugues. Nous ferons appel à vous selon nos besoins.  Vous serez logés dans les dépendances d’Oderfang, en attendant la construction de logements bien à vous !  Vous êtes tous responsables les uns des autres.  Et la moindre exaction de l’un d'entre vous punira tout le groupe, soyez-en bien conscients... »

     Celui qui comprend traduit aux autres au fur et à mesure. Tous acquiescent.

     « Ce sera le bureau des gens d’arme qui gérera vos activités. C'est là que la population viendra solliciter votre aide, selon les besoins de chacun. Et les gens d’arme répartiront les tâches.

     - Voilà dix-sept gaillards qui pourraient faire de bons gardes pour les remparts de Naborum, suggère Jacou à Hugues.

   - Oui, très bonne idée. Charles et moi, nous allons les former... Et encore merci, Jacou, d’avoir présidé ce tribunal ! Restes-tu pour notre cérémonie d’hommage ?

    - Bien volontiers ! »

Les nouvelles habitantes

    

  Après la cérémonie d'hommage, Jacou retourne à Durandalem par la voie des airs. Il est 15 heures. Il salue au passage les gardes du portail est, Jacques Martin et Alexa Dumas.

      Dillon l’accueille et l’informe des nouvelles du jour.

    « Dans les chariots des bandits, nous avons trouvé douze malheureuses filles, esclaves sexuelles de Khan et de ses lieutenants. Nous les avons recueillies et hébergées dans l’ancienne école. 

     - Vous avez très bien fait... Tu me les présenteras !

     - Autre chose : des gardes de l’Empereur sont venus lever une armée pour combattre Khan le terrible. Mais nous les avons informés de notre victoire sur les pillards. Ils sont actuellement aux Thermes, en train de se détendre avec les filles de joie. Et de ton côté, comment s’est passée cette cérémonie d'hommage ?

     - C'était très émouvant. D'autant plus que dix-sept pillards rescapés se sont repentis, et ont juré fidélité aux habitants de la cité, qu'ils ont promis de servir. Les autres sont morts. Hugues a la situation bien en main. »

      Jacou ayant demandé à Dillon de lui présenter les filles, tous deux se rendent à l’ancienne école.

     « Voici Edeltraud Bour, seize ans, seule rescapée de sa famille.  Gertrude Hoff, et sa sœur jumelle Berthe, seize ans. Ses sœurs Paulette et Annie Hoff, quinze et quatorze ans.  Anne Bonté, dix sept ans, et ses sœurs, les triplées Joëlle, Josette et Josiane Bonté, quinze ans. Claudine Schmit, seize ans, et ses sœurs Claudette, quinze ans, et Claudia, quatorze ans. 

     Comme tu vois, Khan ne devait sans doute apprécier que les filles rousses à forte poitrine... Elles sont logées dans les appartement du rez-de-chaussée. »

 

  À l’auberge, après un repas qu'ils ont trouvé excellent, les Sarrois s'apprêtent à reprendre la route.

     Chez Émile, leurs chariots sont prêts. Il y en a cinq, remplis du butin récupéré par les gardes de réserve.

      Sur ordre de Jacou, le banquier Emanuel Frisch, leur offre en outre deux lourds sacs d’or.

      « Ceci est un dédommagement... Acceptez que nous vous aidions à rebâtir votre cité ! » 

Et il leur tend les sacs, qui font quand même soixante-dix livres chacun !

     Joël rapporte leurs braies propres et sèches.

     Une fois de plus, les Sarrois n’en reviennent pas.

     « Encore un de vos pouvoirs !

     - Que nenni... Juste le savoir-faire d’Aline, notre blanchisseuse, et l'ingéniosité de Robert Schmit, notre forgeron vétéran, qui a inventé la machine à laver ! »

 

     Dans l’après-midi, Chantal propose aux filles de leur faire visiter le village, leur nouveau village !

     Il fait bien bon en ce début de printemps, et Chantal les invite à se promener nues comme elle, en toute simplicité. Comprenant qu’elles puissent hésiter, elle précise :

     « Certes, vous n’êtes pas obligées. Mais ici, vous savez, la nudité n’est pas sexuelle.  Personne ici ne vous regardera comme des objets sexuels, mais comme des êtres humains, comme des filles du village ! »

      Dans le village, la nouvelle de ces pauvres filles arrachées aux griffes des pillards s’est répandue. Les nudistes novices suscitent la compassion de tout le monde, et sont chaleureusement accueillies par les habitants.

      Elles arrivent à l’auberge, il est seize heures passées.
    Marion et Julie Wasch les accueillent avec joie, et les installent à une table.

     Les gardes en pause sont étonnés de voir toutes ces belles rousses, rescapées des turpitudes de Khan.

    « Nous sommes tous heureux de vous voir, mesdemoiselles ! dit Gretel.

     - Bienvenue à Durandalem ! ajoute Christiane.

     - Oui ! bienvenue ! » renchérit Child, derrière son comptoir, en levant sa chopine. 

     Et toute l’assemblée lève son verre aux nouvelles habitantes de Durandalem.

Ariston leur présente une tablette où sont inscrits les choix possibles de boissons.

     « Que puis-je vous servir qui vous plairait ?

      - Hélas ! avoue Edeltraud. je ne crois pas qu’une seule d'entre nous sache lire cette

tablette ! »

    Quand il entend ces mots, Apo, qui trinquait tranquillement au comptoir avec Child, intervient dans la conversation.

     « Mesdemoiselles, je me présente : Apollinaire de Valz, maître d'école à la retraite. Voilà l'occasion pour moi de reprendre du service !  Je tiens à vous offrir l’éducation que vous méritez...  Les plus jeunes d’entre vous intégreront l’école dès demain. Celles de seize ans et plus seront mes élèves !

    Je vais vous enseigner la lecture, l’écriture et le calcul, et les choses de la vie, afin que vous soyez les égales de toutes et de tous en ce village ! Dès demain, je me rendrai à votre domicile. Enfin une mission digne de mes vieux jours ... Ce sera un honneur ! 

     Edeltraud le remercie, avec l’assentiment de toutes ses compagnes.

     - L’honneur sera aussi pour nous... L'honneur de suivre votre enseignement !  

     - Bon !  Je vous lis la carte des boissons, faites votre choix ! c’est la maison qui offre ! » dit alors Ariston en souriant.

 

      Les gardes de l’Empereur, après une après-midi chaude, demandent au gérant de l’hôtel, Guillaume Bardot, s’ils peuvent passer la nuit ici. Ils repartiront de bonne heure demain pour Oche.

    « Pas de souci ! Certains d'entre vous connaissent déjà la maison, vous ici êtes chez vous. Les chambres sont à votre disposition vous avez le choix !  Et vous pouvez profiter du coin des boissons. Ce soir, une table vous est réservée...

     - Quelle sollicitude ! dit Jean. L’Empereur sera ravi de savoir comment sont traités ses soldats ! 

     - Cela fait longtemps qu’il le sait...N’est-il pas venu lui-même se reposer en nos murs cet hiver ?

    - Oui da ! sourit Jean, nous en fûmes ! Ah, les filles de Falkenberg... »

     Le soir venu, les gardes de l’Empereur attablés partagent leur repas avec les filles qui les ont accompagnés tout l’après-midi, et qui resteront avec eux encore cette nuit.

 

     À l’ancienne école, Manon et Pénélope ont préparé le repas du soir, qui est à nouveau conséquent, avec les douze filles qui habitent dans les murs ! Une grande table est dressée. Tous les habitants de l’école sont installés.

     Les nouvelles venues racontent longuement leur vie passée... Leurs bonheurs quand elles étaient enfants...Jusqu’au passage de Khan, qui a soudain ravagé leur existence.

    « Demain, annonce Chantal, les coiffeurs des Thermes viendront vous faire belles !  J’ai demandé à Georges Hair et à son assistant Louis Koch de passer. Georges tenait un cabinet de coiffure ici, jadis, dans cette école. Pour ce qui est de coiffer et de sculpter les toisons, c’est un véritable artiste !

     -  Il est vrai que nos touffes ne ressemblent à rien !  admet Edeltraud en se levant et en prenant sa toison rousse à pleine main.

    - Et nous ne connaissons rien de l’amour... Nos pucelages nous ont été volés par Khan et par ses sbires, nous n’avons jamais éprouvé de plaisir de chair !  avouent en chœur les trois jumelles.

    - D’ici peu, leur répond Chantal, les blessures de vos parties intimes seront guéries.  Nous vous montrerons tous les plaisirs que vous pouvez donner et recevoir, entre vous ou avec des garçons !

   - Oh, ce sera formidable ! s'exclament Gertrude et Berthe.

   - Pour l’heure, mesdemoiselles, leur dit Jacou, il est temps pour vous de vous reposer et de passer votre première nuit de liberté dans vos lits... dans de vrais lits !  

     - Et voici une potion qui vous garantira un sommeil profond et réparateur, sans cauchemar, dit Chantal. Après une bonne douche bien chaude, buvez-en chacune une bonne rasade, et couchez-vous tranquillement.

      -  Merci pour tout ce que vous faites pour nous, dit Edeltraud. Nous allons suivre vos conseils !

    - Nous vous souhaitons une bonne nuit ! conclut Chantal.

    - Merci, et bonne nuit à vous aussi... » 

     Et les rousses s'en vont vers leurs appartements.

Mardi 21 mars

 

     La cloche sonne sept heures, Anatole vient frapper aux portes des appartements des jeunes filles.

    « Le petit déjeuner est servi, mesdemoiselles... Rendez-vous à l’étage ! »

 Elles arrivent ensemble, les cheveux hirsutes, et pas encore bien réveillées. Manon leur sert un grand bol de lait chaud.

« Avez-vous bien dormi ?

    - Oh oui, dit Claudine Schmidt, comme des marmottes ! Cette potion que nous avons bue hier soir est vraiment efficace !

    - Ce matin, leur annonce Marianne, les coiffeurs vont venir, d’ici une heure...  Si vous le désirez, nous pouvons faire quelques massages apaisants au niveau des pubis, pour que vous soyez détendues pendant leur travail. Rendez-vous dans la salle de massage, nous serons quelques-unes à œuvrer. »

     Dans la salle de massage, elles sont toutes là, elles sont toutes prêtes : Josiane, Josette, Marianne, Mariette, Chantal et Valérie Burg, Rose Spohr et Zoé Lombard, des Thermes, ainsi qu'Élodie Spohr, de la Résidence. Elles se sont mises toutes d’accord pour donner du plaisir aux jeunes rousses.

     Les filles arrivent, se demandant ce qui va se passer.

     « N’ayez aucune crainte, les rassure Marianne. Cela ne vous fera que du bien !  Installez-vous, allongez-vous sur le dos... »

     Et les masseuses s’enduisent les mains d’une huile fabriquée maison par Chantal. Elles commencent à masser les pubis des filles, qui ressentent une douce chaleur sur leur bas-ventre, et écartent spontanément les cuisses, pour que les mains des masseuses puissent mieux se glisser entre leurs jambes…

 

 

      « Voilà, mesdemoiselles !  conclut Marianne. Ce massage très spécial est maintenant terminé, vous pouvez aller prendre une douche à côté, savonner et sécher vos cheveux et vos pubis. Les coiffeurs ne devraient pas tarder ! »

 

     Il est huit heures, c'est la relève des gardes de nuit. Les gardes de jour prennent leurs postes.  Christina Hahn, Pierre Martinet, Alexa Dumas, Johan Martinet et Guenièvre Spohr sont les gardes de réserve aujourd’hui.

    Aux Thermes, les gardes de l’Empereur déjeunent. Hantz a préparé leurs montures.  Ils s’apprêtent à rejoindre Charlemagne à Oche, et à lui annoncer la nouvelle de la mort de Khan, liquidé par les braves de Durandalem.

     Nathan et Léo, les jeunes forgerons, sont à la ferme Bauer. Ils doivent aménager l’engin agricole à vapeur pour faire les labours. Car le Borgne ne peut toujours pas s’asseoir, à cause de sa blessure à la fesse lors de la bataille. En lieu et place du siège de pilotage, ils installent donc une couchette. Le Borgne va labourer les champs en position allongée, sur le ventre !

     Les aménagements finis, il essaie la machine, qui fonctionne très bien. La vapeur produite remplit parfaitement son rôle. Même tôt le matin, malgré la fraîcheur, la chaudière chauffe assez l'habitacle pour qu'il puisse travailler nu. Quelques coussins parachèvent l’installation.  Quel plaisir de labourer ainsi... Jamais il n’aurait pensé qu’il puisse travailler confortablement couché !

  Les gardes vont devoir se rendre à Strateburgo. Là-bas, la Confrérie de Blauersland pourra leur fournir une grande quantité de pierres. C'est qu'il en faudra beaucoup pour construire les remparts de Naborum !

 

Dillon a désigné Christian Hahn, Jeanne Martinet, et Alice Spohr. Nissa a aussi désigné trois gardes, Christina Hahn, Alexa Dumas, et Pierre Martinet pour les accompagner. Jacou donne ses instructions :

     « Vous irez par la voie des airs, ce sera beaucoup plus rapide. Voici un plan pour vous repérer d’en haut, et trouver facilement votre direction. Il y a trente lieues d'ici à Strateburgo. Si vous partez maintenant, sans vous hâter, vous serez arrivés ce soir ! Restez discrets, évitez les grands chemins. Survolez plutôt les forêts. Vous serez moins repérables...

    La confrérie est nudiste, inutile de vous habiller chez eux. Mais en plus de vos arcs, prenez quand même des vêtements chauds. la saison est encore fraîche, surtout aux aurores ! 

    Voici les recommandations que j’ai notées pour le chef de la Confrérie, et la liste des personnes que vous manderez sur place.  Et voici de quoi vous nourrir en chemin. Voici également de l’or pour traiter les premières commandes, et enfin quelques potions qui pourraient vous servir en chemin. Répartissez tout cela entre vous, pour ne point trop vous charger. Sur ce, vaillantes et vaillants gardes de Durandalem, bonne route ! »

     Et les gardes prennent leur vol, salués au passage par les gardes du portail Est.

     De leur côté, par la voie des airs également, Guenièvre Spohr et Roger Koch partent pour Manderen, afin de trouver des maçons pouvant bâtir les remparts de Naborum. Manderen n'est qu'à dix lieues de Durandalem, ils y seront avant midi.

     Il est neuf heures quand les gardes de l’Empereur quittent à leur tour le village. Jacques Martin et Paul Spohr sont de garde. Jacques actionne la manette, et le portail s’ouvre en grand, laissant sortir les vingt cavaliers, qui repartent pour Oche.

Les soins des filles

 

     À l’ancienne école, les coiffeurs Georges Hair et Louis Koch sont arrivés. Les filles sont installées, confortablement assises. On va d’abord s’occuper des chevelures !

    Petit à petit, leurs tignasses sont raccourcies. Les voilà bientôt avec une belle coupe, qui met en valeur leurs beaux visages. Des visages hélas encore porteurs des stigmates de leur captivité, mais bientôt, grâce à la pommade à la cicatrisante, il n’y paraîtra plus !

     Il est temps maintenant de s’occuper des pubis, qui sont plus ou moins drus. Les filles s'allongent sur les tables de massage. Les coiffeurs peuvent opérer.

 Paulette, Annie, Claudette, Claudia, Joëlle, Josette, Josiane... Les toisons des plus jeunes sont éparses. Et Georges leur propose de couper les poils courts, pour laisser une moquette rousse. Et il supprimera les poils qui descendent à l’entre-jambe.

    De son côté, Louis s’occupe des aînées, Edeltraud, Gertrude et Berthe, Anne Bonté et Claudine Schmit.

     Edeltraud a une pilosité bien fournie ! Louis lui taille quelques poils disgracieux qui s’éparpillent sur les aines, et lui sculpte un magnifique V qui lui va à ravir. Elle est vraiment contente du résultat !

     Gertrude et Berthe sont deux copies conformes. Alors, elles demandent à Louis de leur faire si possible deux tailles différentes, de façon à ce qu'on puisse les distinguer.

     Louis relève le défi, et sculpte sur leurs toisons rousses les initiales de chacune, un grand G et un grand B.

     Voyant le beau résultat sur les jumelles, Anne veut un grand A sur son pubis ! Louis s’exécute et lui taille un beau A, plus court que les poils autour, de façon que la pousse soit toujours proportionnelle, comme chez les jumelles.

     Claudine, elle, a des poils très raides. Louis lui propose une belle demi-lune qui fera ressortir son ventre rond. Il lui dit qu'il devra aussi raser les poils qui poussent sous le pubis entre les cuisses.

     « Oui, dit-elle, tu peux le faire...Grâce aux massages qu'on nous a prodigués, ce sera très supportable, je pense ! »

     Chantal annonce ensuite aux filles :

     « Nous disposons d'une école où les enfants peuvent apprendre à lire, à écrire, à compter, et à connaître les choses de la vie. 

     Apollinaire viendra enseigner les plus âgées d’entre vous, c'est-à-dire Edeltraud, Gertrude et Berthe, Anne Bonté et Claudine Schmit.  Il vous aidera à choisir un métier suivant vos aptitudes.

     Quant à vous, les plus jeunes, Paulette et Annie Hoff, Claudette et Claudia Schmit, Joëlle, Josette et Josiane Bonté, vous irez rejoindre la classe des grands aux Thermes cet après-midi. »

 

 

La veuve Deir

 

     Onze heures, au portail Est. C'est Benoît Spohr qui est de garde, avec Stéphane Spohr. Une charrette se présente, avec à son bord une femme, deux enfants et tout un barda de bagages.

   « Qui va là ?

    - Jeannette Deir, de Naborum.  La veuve de Jean Deir, tué lors de l'attaque. Je voudrais voir votre bourgmestre, Jacou Artz !

    - Il est à l’ancienne école, au bout du village... Je le préviens, et je vous ouvre le portail.

    - Merci !  

Et la charrette pénètre dans le village.

  - Bonjour Jeannette ! dit Jacou. Vous vouliez me voir ? 

     - Oui, monsieur ! Je me trouve maintenant sans ressources... Je n'ai plus les moyens pour élever mes enfants. Les prisonniers germains ne m'ont finalement été d'aucune utilité, je n’avais pas de tâches à leur proposer.

    De plus, mes beaux-parents me rejettent : ils m’accusent d’avoir poussé leur fils à être policier, de l'avoir détourné de la reprise de l’affaire familiale de teinturerie, pour gagner plus d'argent... Mais c'est faux, c'était le choix de Jean, pas le mien ! Maintenant, mon mari est passé du statut de coureur de filles à celui de héros... et c’est moi qu’on met sur la sellette ! Je préfère ne pas rester à Naborum... Auriez-vous un emploi pour moi ?

 - Je comprends votre situation...  Aviez-vous un métier, à Naborum ?

 - J’étais mère au foyer... Mais je me chargeais souvent du lavage des habits de mes voisins.

    - Alors, je crois que je peux faire quelque chose pour vous ! Aux Thermes, certaines de nos buandières commencent à prendre de l'âge. Elles mériteraient bien une relève... Voulez-vous devenir buandière aux Thermes ? 

   - Oh oui ! Je saurai me montrer digne de cette faveur ! Mais... il y a mes enfants... Que vais-je en faire ?  Jeannot a douze ans, et Jorge, dix ans.

 - Ne vous faites pas de souci.  Je vous trouverai un logement, et vos enfants intégreront l’école des enfants de Durandalem. »

   

     Et Jacou charge Adrien Molle, le concierge de la Résidence, de préparer un appartement libre pour une femme et deux enfants.

     « Le numéro 9 est libre, ce sera parfait !

    - Superbe, je te les amène ! »

    Vous, Jeannette, suivez-moi, avec les enfants. Vos affaires seront portées là-bas par nos gardes en réserve.

     Ils arrivent à la Résidence. Adrien les accueille.

    « Bienvenue chez vous !  Voici votre appartement. Il est meublé, vous y trouverez tout le confort :  une chambre pour vous, et une pour vos bambins. 

      Jacou précise à Adrien que Jeannette va occuper un poste de buandière aux Thermes.

       Parfait, cela tombe bien... Les numéros 7 et 8 sont également occupés par des buandières des Thermes, vos voisines pourront tout vous expliquer ! 

     Jacou poursuit.

      - Une chose, encore, Jeannette ! 

      Ici, dans le village, comme tu l’auras constaté, tout le monde vit et travaille nu. C’est notre philosophie. Vous devrez, toi et tes enfants, vous y tenir !

 - Nous serons dignes de votre hospitalité !  promet Jeannette.

 - Voilà, tu peux prendre une douche, et commencer ta nouvelle vie de nudiste dès maintenant.

      Ce midi, toi et tes enfants, vous mangerez à la cantine de la Résidence. Par la suite, vous mangerez aux Thermes le midi, et ici le soir. Tes enfants seront nourris avec les autres au restaurant des Thermes le midi, et avec toi le soir. 

     Cet après-midi, une éducatrice viendra les prendre en charge. 

     Je t’emmènerai aux Thermes pour te présenter les personnes avec qui tu travailleras. »

     Et pendant que Jeannette et ses enfants sont sous la douche, le garde Johan Martinet dépose dans l’appartement le contenu de la charrette.

     En ressortant de la douche, Jeannette est un petit peu gênée. Elle n’a pas l’habitude de se montrer nue, même devant ses enfants.  Mais elle est absolument ravie... Quel plaisir, cette douche ! À Naborum, il y avait bien des douches, mais pas chez elle.

     « Il est midi, allons dans le réfectoire, il est l’heure de manger, je vais vous présenter. »

     Dans le réfectoire, tout le monde est attablé, les mineurs sont là aussi.

     Jacou prend la parole :

    « Je vous présente Jeannette Deir, la veuve du policier tué par Khan à Naborum. Jeannette et ses enfants Jeannot et Jorge sont maintenant citoyens de Durandalem.  Ils habitent ici, à la Résidence, au numéro 9. Jeannette va tenir un emploi de buandière aux Thermes. »

     « Bienvenue Jeannette ! Bienvenue les enfants ! » disent en chœur les résidents attablés.

     Jeannette est aux anges. Jamais elle n’aurait pu imaginer que ses problèmes se résoudraient si vite, et de si belle façon. Elle remercie grandement Jacou pour tout ce qu’il a fait pour elle !

    Après le repas, Agathe Stein et Nadège Schaff, les deux éducatrices, viennent au réfectoire prendre avec elles les deux enfants de Jeannette. Jeannot va intégrer la classe moyenne de Nadège, et Jorge, la petite classe d'Agathe.

     « Nous les libérerons à dix sept heures. Ils pourront alors rentrer dans leur appartement... ou jouer avec leurs nouveaux amis... ou encore venir aux Thermes faire un petit coucou à maman ! »

     Jacou invite Jeannette à le suivre aux Thermes.

   À l'entrée, Jeannette est étonnée de devoir reprendre une douche.

Mais Jacou lui explique.

    « C’est une question d’hygiène. L'hygiène ici doit être irréprochable !  Toute personne qui vient aux Thermes doit passer par la douche. Toi, moi, tous les autres... Même l’Empereur, le mois dernier, a dû prendre sa douche ! Les agents de service sont là pour toi, ils te donneront une serviette pour te sécher, et une autre, sèche, pour t’asseoir si besoin.  Voilà. Nous allons monter au restaurant, je vais te présenter tes collègues. 

    Voici Michel Bern, le gérant du restaurant. Agnès, Angèle, Josiane et Marianne, les cuisinières. Et tes deux collègues buandières, Alice Stone et Agnès Hune. Elle t'expliqueront la tâche. Agnès est par ailleurs ta voisine d'appartement...

    Il y a aussi les deux agents de service, les trois agents d'entretien, l'agent de sécurité... Chaque partie des Thermes a son propre personnel. Tu connaîtras bientôt tout le monde ! 

     Au rez-de-chaussée, par exemple, tu as déjà rencontré les cinq agents de service et le gérant. Il faut y ajouter les agents d'entretien, l'agent de sécurité, les maîtres-nageurs, les masseuses, les gérants du coin des boissons... À l’hôtel : gérant, buandières, agents d’entretien...

     Au niveau des appartements, où est logée la majorité du personnel des Thermes, il y a un responsable d’étage. Et là aussi, buandières, agents de service, agents d’entretien, agents de sécurité... Chacun a une tâche bien précise.

- Oh là-là, s'inquiète Jeannette, ça fait beaucoup de monde ! Jamais je n’arriverai à retenir tous leurs noms...

 - Ne panique pas, cela se fera peu à peu, tu auras tout loisir de faire connaissance !  Bon, je termine : nous avons aussi deux concierges, trois techniciens chaudières, et sept vigiles. Ce qui fait en tout soixante-deux employés dans les Thermes... Et même soixante-trois avec toi, maintenant. Nous formons une grande famille, et je suis sûr que tu t’y plairas vite ! 

     Je t’invite maintenant à faire une séance de sauna. Cela te fera le plus grand bien. Agnès Hune va t'accompagner, vous pourrez papoter !  Agnès, occupe-toi de Jeannette.  Tu lui montreras le métier, ensuite.

    - Avec plaisir, Jacou. Suis-moi, Jeannette... »

L’accueil en classe

 

     Dans les classes des cellules des Thermes, les trois éducatrices font les présentations entre anciens et nouveaux élèves.

C'est Jeanne Muller qui prend la parole en premier.

     « Je vous présente Jeannot et son petit frère Jorge, qui viennent habiter à Durandalem avec leur maman. Leur papa a été tué par les pillards de Khan à Naborum. Jeannot ira dans la classe des moyens avec Nadège, et son frère dans la petite classe avec Agathe.

 - Jeannot, dit Nadège, voici donc tes camarades de classe : Michael Hoste, les jumelles Marguerite et Pétulla Martinet, Bernard Bardot,  et Georgette Hahn .

- Jorge, dit Agathe, voici les tiens :  Manon Hoste, les jumelles Josiane et Joëlle Bardot, Gilles Bardot, Eli Thiel, Abraham Thiel, et les jumeaux Robert et Pascal Schmit.

 - Et enfin, dit Jeanne Muller, je vous présente Paulette et Annie Hoff, C1audette et Claudia Schmit, Joëlle, Josette et Josiane Bonté. Sept filles sauvées des griffes de Khan qui rejoindront ma classe, la grande classe. Elles sont toutes orphelines, leurs parents, leurs frères, ont été tués par Khan.  Mesdemoiselles, voici vos cinq camarades de classe : Piotr Hahn, les jumeaux Jules et Julie Stock, et les jumelles Christine et Christel Martinet. Je vous demanderai beaucoup d'attention et de sollicitude envers vos nouvelles camarades, privées maintenant de l’affection des leurs. Je suis sûre que vous saurez les aider au mieux !

      -  Ho, le coiffeur est passé ! constate Julie Stock. Vous êtes jolies comme cela !

      - Merci à toi, heu...Julie, c’est ça ?!  répond Paulette caressant son pubis. Oui, ce matin, il nous a coiffées et tondues !

      - Madame Muller, demande Jules Stock, vous pouvez nous raconter qui est Khan ?

     Et Jeanne commence son récit. 

     - Khan était un monstre assoiffé de sang. Avec son armée de sauvages, il est arrivé des pays de l’Est, par-delà la grande ville de Strateburgo. C’était un chef de guerre chassé par l’Empereur Charlemagne, et qui s’était enfui dans les montagnes. Il dévastait tout et pillait les villages sur sa route avant de les brûler, en tuant tous les habitants !

     - Oui, même les enfants ! confirme Claudette Schmidt, larmoyante.  Nous ne sommes encore vivantes que parce qu’il aimait les rousses bien formées ! Tous les autres, nos frères et sœurs, nos parents, nos amis, tous ont été égorgés ! 

      - Après avoir mis à sac la ville de Pont-de-Sarre, continue Jeanne, ils sont arrivés à Naborum, Les gardes de Durandalem ont été prévenus, et heureusement, ce jour-là, les anciens soldats de la garde du roi, ceux qui ont fait leur apprentissage à Durandalem, étaient tous réunis chez nous. Avec l’aide des gardes et des habitants du village, ils sont allés tuer Khan et tous ses pillards !

      - En volant ! Je les ai vus passer ! précise Piotr.

      - C’est exact, Piotr. D’en haut, avec leurs flèches, ils ont tué toute l’armée de Khan !

      - Mais il voulait aller où, Khan ? questionne Mikael Hoste. 

      - Il savait qu’à Durandalem, il y a beaucoup d’or, il voulait s’en emparer ! 

      - Mais comment savait-il cela ? interroge Christine Martinet.

      - Grâce à la découverte de l'or, pour améliorer la vie des habitants, Durandalem a pu faire beaucoup de commerce, d’achats de matériaux, dans beaucoup d'autres villages. Jusqu’à Strateburgo, pour les pierres des remparts...  Alors, forcément, la présence d'or à Durandalem a vite été connue un peu partout. Plusieurs bandes de pillards ont essayé de le voler, cet or. Mais tous ont échoué, et la plupart sont morts...

     Vous savez qu'au village nous avons beaucoup de gardes.  C’est la garantie de pouvoir vivre en paix, sans risques d’être attaqués !

     Si Khan avait été au courant de nos moyens de défense, il n’aurait sûrement pas entrepris pareille attaque...  Mais tout cela est fini et bien fini. Maintenant Khan et tous ses guerriers sont enterrés dans une fosse à la sortie de Naborum. Nous allons essayer de vous faire oublier ces affreux souvenirs, et vous faire prendre du plaisir à apprendre la vie, qui est si belle quand on lui prête un peu d’intérêt ! »

 

    À l’ancienne école, dans la grande salle, pour commencer leur enseignement, Apollinaire a réuni Edeltraud Bour, Gertrude et Berthe Hoff, Anne Bonté et Claudine Schmit, les filles les plus âgées.

     « Bienvenue, mesdemoiselles. Vous êtes toutes très belles, mon âge avancé me permet de vous le dire sans arrière-pensées...

     - Merci du compliment, Apollinaire !  disent-elles en chœur.

     - Oh, vous pouvez m’appeler "Apo" tout court, on me nomme souvent comme ça. 

     - D'accord, Apo ! Par quoi commençons-nous ? 

     - Eh bien, nous allons apprendre l’alphabet... »

     Et il caresse d'un regard rêveur les magnifiques lettres sculptées de leurs toisons.

Les remparts de Naborum

 

  • Les tailleurs de pierre de Tenquin

 

     Alix, Armand et Gabin ont été chargés de se rendre à Tenquin pour contacter les responsables de la carrière de pierre.

     Les trois fils du tailleur de pierre Roger Brun, Albert, Robert et Norbert, ont repris le métier de leur père. Armand, fils du tailleur de pierre Aimé Brun, a fait de même. Les livreurs de pierres de jadis, les frères Gotsch, ont cessé leur activité. Ce sont maintenant Colin et Colas, les fils de Nicolas Déreck, qui se chargent des livraisons.  Et ce sont les épouses de Colin et de Colas, Judith et Édith, qui gèrent l'entreprise.

   Arrivés à Tenquin, Alix, Armand et Gabin peuvent lire sur une grande pancarte :

                                               CARRIÈRE DE PIERRE

                                           BRUN-DÉRECK et compagnie

     Les voilà donc à destination !

   Auprès de Judith Déreck, Alix passe commande de vingt charrettes de pierres à livrer à Naborum, pour édifier les remparts. En acompte, il donne à Judith un grand sac d’or. Le prix définitif reste à négocier.

     « Il en faudra sûrement plus !  Quels sont les délais ?  demande-t-il. 

    - Nous pouvons fournir une grande charrette par jour, qui sera livrée à Naborum.  Si vous nous envoyez des charrettes, on peut en charger deux autres par jour. Il faudra compter un mois pour les vingt charrettes. Dans trois jours, vous aurez la première, et même deux autres si vous nous envoyez des charrettes d’ici là.

      - Merci Judith ! Je vais transmettre cela à Jacou, le commanditaire.

     - Jacou Artz, le bourgmestre de Durandalem ? 

     - C'est lui-même !

     - Mais nous le connaissons... Nous sommes allés plusieurs fois aux Thermes ces dernières années.  La première livraison, ce sera l’occasion de nous revoir ! 

     - Il en sera ravi... Je le préviens demain. »

     Pendant ce temps, à Durandalem, dans le champ derrière la ferme Bauer, la machine a fini de retourner la terre. Le Borgne était si bien installé sur sa couchette qu'il s’est paisiblement endormi aux commandes. Heureusement, à ce moment, il a lâché la manette, et la machine s’est arrêtée. 

     Gabriel Holz, qui passait par là, a vu la scène. Il court prévenir Audrey Lemas, la compagne du Borgne, qui s'inquiétait de ne pas le voir revenir.

     Le frère du Borgne, François, rit de bon cœur, ainsi que tous les employés de la ferme.

      « Heureusement que ça s'est arrêté, sinon la machine aurait bien labouré tout le chemin jusqu’à Laudrefang ! »

    

 

Les maçons de Manderen

 

     Roger et Guenièvre ont été envoyés à Manderen pour recruter les maçons qui bâtiront les remparts.

    Après un vol sans histoire, les voici en vue de la cité. Ils se posent dans la forêt afin de se vêtir, et parviennent aux portes du château.

     Le portail est fermé.

     « Qui êtes-vous ?  Que voulez-vous ? demande le garde en faction sur le rempart.

     - Nous voudrions rencontrer les maçons, Wirth, Storm et Bour.

     - D’où venez-vous ? »

     - De Durandalem. C'est Jacou Artz, notre bourgmestre, qui nous envoie.

     - Attendez un instant...

     Au bout d’un moment, le portail s’ouvre.

     Un grand blond s’avance vers eux :

     - Je suis Adrien Wirth, le chef de la corporation des maçons. Vous venez de Durandalem ?

     - C’est exact ! Jacou Artz a besoin de maçons pour aller construire les défenses de la ville de Naborum, récemment attaquée...

     - Entrez, vous nous raconterez cela à table !

     Et Roger et Guenièvre suivent le grand blond.

     Roger explique ce qui s’est passé, l’attaque de Khan, et les gardes de Durandalem qui les ont exterminés, et la décision de construire des remparts avec l’aide de Durandalem.

     Après le repas, Adrien dit :

     « C'est bien volontiers que nous viendrons construire ces remparts. Dès lundi prochain, nous serons à même vous envoyer une dizaine de maçons. Pourrons-nous bénéficier de vos potions pour travailler plus vite, comme nous avions fait à Durandalem ?

      - Bien entendu !

    - Alors c'est dit, nous serons là !

     - Voici de l'or pour les premiers frais, dit Guenièvre en lui tendant un sac plein.

    - Grand merci, gente demoiselle !

    - Maintenant, nous retournons au village. À bientôt, Adrien !

     - À bientôt à Durandalem ! »

     Et Roger et Guenièvre sortent de l’enceinte, et décollent direction Sud vers Durandalem, sous les regards sidérés des habitants du château. Adrien souriant agite le bras, en signe d’au revoir.

Les compagnons du Blauersland

 

     Christian et Christina Hahn, Jeanne et Pierre Martinet, Alice Spohr et Alexa Dumas se sont envolés au petit matin pour Strateburgo. Après quelques heures de vol, les émissaires décident de se reposer et de se restaurer. Ils atterrissent dans une clairière. Il fait maintenant bien bon, et les vêtements deviennent tout à fait superflus ! Ils se mettent donc nus et s'installent pour manger.

      Après ce bon repas, l'on prolonge la pause. Le soleil réchauffe les corps et réveille les désirs. Pierre regarde Alexa avec envie, et cela se voit ! Christian lui aussi aimerait visiblement batifoler un peu, Jeanne l'a remarqué. Et les six gardes se rapprochent, se caressent, s’embrassent, s'enlacent…

 

     Ces ébats improvisés leur ont fait le plus grand bien.  Après s'être donnés à fond, il se reposent couchés dans l’herbe. Mais il faut bien repartir. Les voilà qui reprennent leur vol, sans se rhabiller. Mutuellement, par la pensée, ils se promettent de remettre ça, ce soir, au Blauersland...

    Dans la soirée, ils sont parvenus au-dessus des carrières du Blauersland. Ils atterrissent alors sur la place, effrayant les autochtones... Des gens nus et armés qui arrivent comme ça, par les airs, c’est sûrement diabolique, peut-être dangereux. Ils sont aussitôt encerclés et mis en joue par les gardes. Un grand blond, qui semble être le chef, les interpelle.

     « Qui êtes-vous ?

     - Nous venons de Durandalem, en Austrasie. Nous avons des recommandations pour Clément Sandre, ou Sylvain Cohen !

     - Ah, de Durandalem... Baissez vos armes, vous autres, ce sont des amis !  Sylvain Cohen, c'est moi... le maître compagnon de cette communauté !  Vous dites avoir des recommandations ?

     - Oui, de la part de Jacou Artz !

     - Jacou, dites-vous ? Venez, suivez-moi. J’en connais un à qui cela fera grand plaisir...

     Et Sylvain Cohen emmène le groupe dans une grande hutte.

     « Grand Maître, des envoyés de Jacou Artz, de Durandalem ! »

     Le vénérable maître Clément Sandre, âgé de quatre-vingt-dix ans, se lève alors lentement de son trône.

     « Jacou Artz... Ce bon vieux sorcier vit donc encore ! dit-il en éclatant de rire. Que désire-t-il donc ?

     - Des pierres, Grand Maître, beaucoup de pierres !

     - Et que veut-il en faire, de toutes ces pierres ? Racontez-moi tout...

       C'est Alice Spohr qui entreprend de tout lui expliquer. À l’étonnement de l’assistance, qui n’a pas vraiment l’habitude de voir une femme s'octroyer la parole, et encore moins une soldate toute nue !

     « Tout a commencé quand un bandit, Khan le terrible, avec son armée de pillards, a sauvagement attaqué Naborum, la cité toute proche de Durandalem...

    - Oui, l'interrompt Clément, nous avons entendu parler des ravages qu’il a faits plus au Nord. Il a détruit plusieurs villages, dit-on.

     - Or donc, ce jour-là, nous fêtions tranquillement l’anniversaire de l’école de soldats, avec les vétérans des gardes de Charlemagne, quand nous avons été informés de l'attaque. Aussitôt, sous les ordres de Dillon d’Ortega, nous nous sommes organisés pour riposter.

      Notre maîtrise du tir à l'arc et notre pouvoir de voler nous ont permis de vaincre Khan, et de décimer son armée...  À seulement trente, armés d’arcs et de nombreux carquois de flèches, nous sommes parvenus à tuer Khan et près de cinq cents de ses soudards !

    Néanmoins, ils avaient réussi à pénétrer dans la cité, tuant deux gens d’arme, blessant plusieurs personnes, et brûlant des maisons. Pour éviter qu'une telle intrusion ne se reproduise, le bourgmestre de Naborum, qui n’est autre qu’un des soldats de Dillon, a demandé à Jacou de l’aider à fortifier la ville.

    Voilà pourquoi nous avons été envoyés ici, avec mission de rapporter des pierres pour construire des remparts. Nous escorterons les convois de pierres, si bien sûr cela est possible ! »

     Clément poursuit :

     « C’est formidable, que vous ayez décimé ces chiens. Nous avions envoyé un émissaire à Oche auprès de l’Empereur pour le prévenir !

     - Oui ! lui répond Christian Hahn. Des envoyés de Charlemagne sont d'ailleurs passés à Durandalem.  Ils venaient lever une armée afin de combattre Khan.

    - Mais ce n’était plus la peine, rigole Alice. Nous avions déjà fait tout le boulot ! »

Ce qui fait rire toute l’assistance.

 « Eh bien soit ! Jusqu’au départ des chariots de pierres, vous serez nos invités.  Nous disposons d'une immense réserve. Dès demain, nous pourrons faire partir vers Durandalem cinq grands chariots de quatre chevaux !

    - Avec vos pouvoirs, demande Sylvain, pourrez-vous nous aider à les charger ?

    - Nous avons mieux, dit alors Alexa. Une potion qu’il vous suffira de boire pour acquérir vous-mêmes le don de déplacer les objets par la pensée !

     - Mais ne fallait-il pas passer par une grotte et subir un rituel d’initiation ? demande Sylvain, qui se rappelle être passé par là.

     - Oui da ! mais Chantal et Jacou ont trouvé la formule qui permet de se passer du rituel. La trémulonde est maintenant directement intégrée dans la potion. Un somme provoqué d'une demi-heure suffit pour qu'elle agisse. Et les effets sont permanents, pour peu qu'on utilise ces pouvoirs régulièrement ! »

    

     « Elles sont formidables ! s'exclame alors Léo Cohen, le cousin de Sylvain.

     - Formidables ? demande Clément Sandre. Qui cela ?

     - Mais voyons, les filles de Durandalem !  Quelle prestance, quelle maîtrise, quel charme... Que faites-vous ce soir ?  leur demande-t-il en souriant.

    - Ma foi, rien de spécial... Que proposez-vous ? s'enquièrent alors Jeanne et Christiane.

    - Heu… Je dis cela comme cela... Mais si vous voulez, nous pourrions faire une fête avec vous !

     - Bien volontiers ! acquiescent Alexa, Alice, Christiane et Jeanne, approuvées par les garçons.

     - Oui, se réjouit Christian, faisons la fête ! La fête entre nudistes ! 

     - Alors venez, les invite Sylvain. Je vais vous présenter notre communauté ! Vous allez voir ce que c'est, une fête chez nous. »

     Et ils entreprennent de faire le tour des huttes, disposées tout autour de la place.

     « Voici ma hutte ! dit Sylvain. Je vous présente mon épouse Marie, et mes deux enfants. Juste à côté, la hutte de mon frère Adrien, de son épouse Madeleine et de ses deux jumeaux.  Ici c’est la hutte de mon cousin Théo, de son épouse Margot, et de ses trois filles. Et celle de mon autre cousin Léo, de sa compagne Marion, et de leur fille. 

     Ici nous avons la salle de garde. Voici Vincent Jost, sa compagne Anne, et leurs deux

jumelles. José Blum, sa femme Marie-José, et leurs deux jumeaux. Les frères Lucas et Louis Rosenthal, deux vieux célibataires endurcis !

     Dans les dépendances sont logés les anciens, les gardes à la retraite : Roger Pinot, Ignace et Sylvain Strass, Alfred Muscat, Henri Dawes, Victor et Raoul Schwartz.

     Ici, c’est la hutte de la famille Pinot.  Roger est le père de Georges, lui-même père de triplés. Leur mère est hélas morte en couches.

    Et là, enfin Georges Stand, qui a eu cinq enfants avec plusieurs femmes, tardivement. Et que nous appelons notre étalon, parce que son membre est énorme... enfin, ÉTAIT énorme ! »

 

     Et tout le monde rigole de cette saillie...

 

    « Cela fait beaucoup de jeunes filles et de jeunes garçons, remarque Christian. Cela ne pose pas de problème ?

     - Oh non... Nous pratiquons l’amour libre et consenti. Chacun peut avoir un rapport avec le ou la partenaire de son choix, du moment que les deux sont d’accord !

     - Et le mariage, alors ? demande Alice.

     - C’est un accord, nous faisons des enfants, nous les élevons ensemble, mais nous sommes libres d’avoir des rapports avec qui nous voulons !

    - Alors, si j’ai bien compris, dit Christiane, la fête de ce soir, ce sera aussi chacun et chacune au choix ! 

     - Voilà ! Et si vous participez, vous ne serez pas déçus ! Mais toujours d’un commun accord avec les partenaires, n'est-ce pas... Celui qui déroge est sévèrement puni, et isolé pour un bon bout de temps !

    - Ça va être superbe ! se réjouit Alice.

    - D'autant que nous avons une potion de Jacou pour augmenter le plaisir, et une autre pour éviter de faire des enfants ! rappelle Jeanne.

     - Nous voilà donc parées ! dit Alexa déjà tout excitée. On y va quand ? 

     - Allons d'abord manger, lui répond Sylvain. Et ensuite, sur la place, la fête pourra commencer ! »

   Après le repas, toute la jeunesse se retrouve donc sur la place, et c'est le début des ébats !...

     Laissant la place du village aux jeunes, les parents, eux, se sont réunis dans la grande hutte sous les yeux du vétéran Clément Sandre.

      Les gardes retraités ne sont pas venus, prétextant qu'à leurs âges, ils se couchent comme les poules...

 

 

     Après toutes ces réjouissances, tard dans la nuit, chacun est épuisé ! Les émissaires de Durandalem sont invités à dormir dans les huttes de Sylvain, d'Adrien, et de Théo. Le calme revient sur le Blauersland, et tout le monde se couche et s’endort rapidement.

 

 

 

 

  • Pendant ce temps à Durandalem…

 

     Roger et Guenièvre sont de retour.  Roger fait son rapport à Jacou.

     « Les maçons de Manderen seront là dès lundi. Ils seront une dizaine. Pour aller plus vite, ils demandent à bénéficier de la potion qui permet de soulever les pierres par la pensée...

    - Merci Roger, merci à vous deux pour cette course !  Je vous invite à boire un verre à l’auberge. »

     Là-bas, Albert et Georgette Fart, Georges